Note revendicative de la confédération générale du travail Force Ouvrière

Coronavirus / Covid19 - Pandémie

Article publié dans l’action Coronavirus / Covid19 - Pandémie

Réunion Gouvernement – Interlocuteurs sociaux du 17 juillet 2020

Crise sanitaire et Covid-19

La situation sanitaire du fait de l’épidémie de Covid-19 n’est pas résolue, et demeure incertaine aujourd’hui pour les semaines et mois à venir. Comme elle l’a fait depuis le début, la confédération appelle à ce que la priorité demeure la santé de la population, des travailleurs en particulier.

A cette fin, la confédération revendique un point d’information régulier sur les moyens requis (équipement de protection individuels, tests et politiques de dépistage, organisations du travail et du trajet domicile – travail garantissant le respect des « gestes barrières », équipements et matériels médicaux, médicaments) et mis en œuvre tant au niveau national que local et des entreprises et administrations.

Sur ce dernier aspect, cela conduit la confédération FO à réaffirmer la nécessité de préserver et rétablir les CHSCT, là où ils ont été supprimés. A ce sujet, FO rappelle que leur rôle ou celui des représentants du personnel qui en avaient encore les formations et l’expérience, a été déterminant au moment du confinement pour assurer soit l’arrêt des activités non indispensables, soit la continuité des activités essentielles et des services publics en agissant pour la mise en œuvre des moyens et organisations du travail protecteurs des salariés.

FO est et sera attentive à ce que soient particulièrement suivis à cet égard les situations où les salariés se trouvent isolés (services à la personne à domicile – assistantes maternelles, aides aux personnes âgées, porteuses de handicap, dépendantes ; salariés d’entreprises sous-traitantes dont le secteur du nettoyage-propreté et la prévention-sécurité).

Préalablement à la survenue de la crise sanitaire, la confédération FO a particulièrement œuvré à l’ouverture d’une négociation en vue d’un accord national interprofessionnel sur la santé au travail. Cette négociation, initialement prévue en février – mars, a pu débuter. FO estime que cette négociation, qui doit permettre de renforcer les dispositions de prévention en matière de santé au travail, devra intégrer les leçons à tirer de la crise sanitaire du Covid-19. Elle entend s’y impliquer pleinement et attend des pouvoirs publics qu’ils respectent la liberté de négociation.

La situation de confinement a mis en lumière les questions importantes que soulèvent le « télétravail », tant du point de vue du collectif de travail, des conditions de travail, de l’articulation vie privée / vie professionnelle, que de la santé au travail comme du droit syndical. Depuis 2017, la confédération FO est demandeuse d’une négociation au niveau national interprofessionnel sur le télétravail, qui permette de définir un cadre régulateur renvoyant à des négociations de branches et d’entreprises. FO maintient la nécessité d’y parvenir, et c’est dans cet esprit qu’elle s’est inscrite dans les réunions, entre les organisations d’employeurs et confédérations syndicales, qui ont débuté en juin dernier.


Secteur de la santé

La confédération tient en premier lieu à souligner le rôle déterminant de la Fédération FO des services publics et de santé et de l’ensemble de ses syndicats du secteur hospitalier, de la santé privée et du secteur médico-social, dans le cadre des négociations qui ont porté, et permis un accord majeur, sur les situations salariales, catégorielles et statutaires des personnels de la santé. Notre fédération vous l’a dit, l’attention doit porter sur la nécessité de décliner ces avancées au profit des agents du secteur social et médico – social.

Au-delà de l’augmentation des salaires, qui est un axe de reconnaissance indispensable, des créations d’emplois à hauteur de 7 500 postes, qui ont été associées à cet accord, et de l’engagement sur l’arrêt des fermetures de lits et services, les réponses, sur les conditions de travail, le financement et l’investissement des hôpitaux, ne sont pour l’instant pas à la hauteur des attentes qu’a rappelées justement notre fédération. FO soutient donc sa fédération dans sa demande de poursuite de négociations sur ces questions.

Lutte contre le chômage et pour de véritables emplois

Dès le début du confinement, la confédération FO a milité pour que l’emploi et les salaires des salariés soient protégés, tant immédiatement qu’à plus long terme, dans le contexte d’une reprise d’activité qui serait progressive et partielle selon les secteurs.

FO a demandé, en particulier, que soient suspendues les procédures de licenciements en cours, compte – tenu des difficultés, voire impossibilités, pour les salariés concernés de faire valoir leurs droits dans les meilleures conditions (accompagnement par un délégué, un conseiller du salarié, fonctionnement suspendu ou dégradé des prud’hommes). Dans un contexte particulièrement instable, et alors que les syndicats et Unions départementales FO constatent la multiplication de ruptures de contrats de travail individuels, FO renouvelle sa revendication d’un contrôle strict des procédures de licenciements, afin d’éviter les détournements de procédures et abus. Cela demande que les moyens et missions de l’inspection du travail soient renforcés en ce sens.

FO a plaidé en faveur des dispositions d’activité partielle (ou chômage partiel), qui ont été mises en œuvre massivement afin d’éviter le basculement dans le chômage. FO avait alerté immédiatement sur la situation des intérimaires et salariés en CDD ou période d’essai qui risquaient de voir leurs contrats non renouvelés ou rompus au moment du confinement. Cela s’est malheureusement vérifié à grande échelle avec le basculement de centaines de milliers de salariés en catégorie A de Pôle emploi. Si, aujourd’hui, l’activité partielle de longue durée doit permettre d’éviter des suppressions d’emplois dans les secteurs où la reprise d’activité est progressive et partielle, force est de constater cependant que les salariés intérimaires ou en CDD demeurent laissés pour compte. Cela amène la confédération FO à poser de nouveau la question des dispositions de l’assurance chômage permettant de lutter contre les abus de contrats courts. FO rappelle qu’elle avait, à ce sujet, fait des propositions efficaces.

Assurance chômage

La confédération n’a eu de cesse de mettre en garde contre, puis de dénoncer, les dispositions de la réforme des règles d’indemnisation chômage, imposée par le gouvernement en juin 2019 contre l’avis de l’ensemble des confédérations syndicales, alors que les dispositions de la convention négociée en 2017 auraient dû demeurer en vigueur jusqu’à la fin de l’année 2020.

La crise sanitaire, le confinement et le contexte actuel de reprise de l’activité ont mis plus encore en exergue les défauts, pénalisant les salariés demandeurs d’emplois, notamment les plus précaires, de cette réforme, particulièrement sur l’entrée dans les droits (passage de 4 mois sur 28 mois à 6 mois du 24 mois qui bloque de l’ordre de 12 000 demandeurs d’emplois chaque mois, passage pour le rechargement des droits de 1 mois à 6 mois, calcul du SJR sur la période et non sur les jours travaillés, dégressivité de l’allocation chômage).

FO appelle en conséquence à son abandon pur et simple et au retour immédiat aux dispositions de la convention préexistante.

Aides publiques aux entreprises et activité partielle

De même que, d’une façon plus générale, FO appelle à un conditionnement et à un contrôle strict des aides publiques, la confédération a exprimé à plusieurs reprises la demande que la mise en œuvre de l’activité partielle et de l’activité partielle de longue durée (APLD) soit conditionnée à l’interdiction de licenciements, sous la forme de PSE, sur la période concernée.

Tout en se félicitant d’avoir obtenu le maintien de l’indemnisation des salariés à hauteur de 70% du salaire brut, soit de 84% du salaire net, dans le cadre de l’activité partielle de longue durée, FO rappelle cependant que la perte de pouvoir d’achat peut être plus conséquente du fait que tous les éléments de rémunération ne sont pas pris en compte. FO milite en conséquence pour que les entreprises maintiennent la rémunération des salariés intégralement.

FO estime qu’il s’agit à la fois d’une question de justice, rappelant que le salaire médian se situe aux environs de 1800 € nets, et d’un facteur économique important pour nombre de secteurs à fort potentiel d’emplois, dont l’activité est portée principalement par la consommation des ménages.

De ce point de vue, FO renouvelle sa demande d’une disposition interdisant le versement de dividendes aux actionnaires, généralement improductifs et facteurs d’accroissement d’inégalités, dans le cadre du bénéfice de l’activité partielle de longue durée, comme de manière plus générale lorsqu’une entreprise bénéficie d’aides publiques sous diverses formes (crédits d’impôts, prêts garantis par l’état, exonération de charges et cotisations).

De façon plus générale, comme indiqué ci-dessus, FO réaffirme la nécessité d’une évaluation générale des aides publiques (dont le montant total était estimé, avant la crise sanitaire, à 140 milliards d’euros annuels), d’un conditionnement systématique, d’un contrôle et de sanctions en cas de non-respect des conditions.

FO estime indispensable, dans ce cadre, la mise en œuvre d’un processus de responsabilisation des donneurs d’ordre sur les sous-traitants et l’ensemble de la chaîne de valeurs, de même que des groupes capitalistiques sur leurs filiales, afin d’empêcher que les salariés des entreprises en bout de chaîne soient laissés pour compte.

FO revendique également que toute exonération de cotisations sociales soit compensée intégralement.

Concernant la mise en œuvre de l’APLD, la confédération FO considère nécessaire un suivi effectif notamment afin de s’assurer que les TPE et PME, comme les plus grandes entreprises, privilégient ce dispositif aux suppressions d’emplois (PSE, RCC ou PDV) dans le contexte d’une reprise d’activité partielle. A ce titre, le suivi devrait relever des Direccte avec une information – consultation régulière des organisations syndicales au niveau départemental. Un dispositif de suivi national, avec une information – consultation des confédérations syndicales, devrait permettre de veiller au bon fonctionnement du dispositif, en évaluer les effets et vérifier la réelle information trimestrielle des CSE sur la conduite des accords APLD dans les entreprises.

Concernant le dispositif de prêt main d’œuvre prévu par le code du travail, ayant vocation à maintenir l’activité des salariés dont l’entreprise rencontre des difficultés, FO s’attend à ce que le respect des dispositions réglementaires soient contrôlées effectivement dont le volontariat, la garantie de retour à son poste avec maintien de la rémunération, le maintien intégral du salaire et des cotisations sociales durant la période de mise à disposition, l’information du CSE.

Discriminations

Dans ce contexte tendu pour l’emploi, FO appelle à ce que les dispositifs destinés à empêcher toute forme de discrimination à l’embauche, dans l’emploi, sur les rémunérations, soient renforcés. Cela concernant notamment les risques de discrimination ou mise à l’écart en fonction du handicap, de l’âge, de l’origine supposée, sociale, géographique, de la couleur de peau.

FO est tout autant attentive à ce que l’égalité Femme – Homme soit effective pour l’accès à l’emploi, la carrière et le salaire.

Formation, emploi des jeunes

Concernant les dispositifs de formation associés ou non à l’APLD, notamment à destination des jeunes, FO réitère sa position selon laquelle le seul financement ne suffit pas, considérant nécessaires les moyens et effectifs (Pôle emploi et missions locales) pour un réel accompagnement des salariés concernés, des demandeurs d’emploi et des jeunes.

FO insiste également sur l’attention à porter sur la qualité des formations afin de permettre un accès à des formations qualifiantes et certifiantes.

Si des mesures d’urgence peuvent être bienvenues, afin d’éviter de laisser des jeunes sans emplois, formations et perspectives immédiates, FO insiste sur la nécessité d’une projection et d’un suivi à plus long terme, faisant en sorte que ces dispositions d’urgences (du type contrats d’insertion, …) permettent de déboucher sur un véritable emploi.

En la matière, comme pour ce qui concerne la prise en charge par l’État pour le compte des entreprises des coûts des contrats d’apprentissage, autant cela doit éviter de laisser des jeunes apprentis sans contrats, leur permettant d’achever ou démarrer leur formation, autant il doit être contrôlé que cela ne donne pas lieu à effet d’aubaine, transformant un véritable emploi en contrat d’apprentissage.

Dans les situations où les apprentis n’obtiennent pas de contrat de travail, FO considère qu’un dispositif passerelle entre CFA et lycée professionnel devrait être mis en place pour faciliter une telle transition.

La confédération renouvelle sa demande que soit examinée la mise en œuvre, à tout le moins durant la période de reprise d’activité, d’un dispositif favorisant l’emploi de jeunes dans le cadre de départs anticipés de séniors, du type Allocation de remplacement pour l’emploi (ARPE) mise en œuvre à la fin des années 90.

Plan de relance

Au-delà des mesures de soutien à l’emploi, FO estime nécessaire que l’État remplisse pleinement son rôle en matière de relance de l’activité à plus long terme, conduisant à rompre avec les politiques qui ont mené à la désindustrialisation et à la délocalisation des emplois.

Le salaire n’est pas l’ennemi de l’emploi, au contraire !

En préalable, la confédération FO estime nécessaire de rompre avec le maître mot « compétitivité ».

Elle adhère pleinement au propos tenu par le Directeur général de l’OIT, lors de son premier rapport devant la Conférence internationale du travail en 2013 : En premier lieu, s’il est vrai que l’amélioration de la compétitivité est un objectif légitime pour une économie ou une entreprise, il est logiquement impossible pour toutes de devenir plus compétitives : par définition, un gain de compétitivité obtenu par une économie ou une entreprise signifie nécessairement une perte de compétitivité pour une autre. De même, tous les pays ne peuvent pas sortir de la crise grâce à leurs exportations puisque les exportations d’un pays sont les importations d’un autre. A ne pas appréhender cette logique simple et à ne pas agir en conséquence, on risque de créer un effet de spirale qui tirerait vers le bas les salaires et les prestations, risque contre lequel l’OIT a mis en garde, par exemple dans le Pacte mondial pour l’emploi de 2009, et qui ne peut profiter à personne à long terme.

C’est pourquoi, la confédération FO estime indispensable que les politiques de sortie de la crise sanitaire, économique et sociale actuelle fassent l’objet d’une coordination aux niveaux européen et international, tournant le dos à l’austérité et aux réformes structurelles imposant la rigueur budgétaire comme pilote des politiques sociales, notamment en matière de services publics et de sécurité sociale, et donnent au contraire la priorité aux droits des travailleurs et au progrès social.

FO revendique que l’accent soit mis sur la réglementation des marchés financiers, la lutte contre les paradis fiscaux, l’évasion et l’optimisation fiscales, et la spéculation boursière improductive.

FO rappelle qu’un rapport de l’OIT de 2016 sur la « financiarisation de l’économie » soulignait que, cinq ans à peine après la crise financière de 2008, le marché des dérivés, pourtant à l’origine de cette crise, représentait 700 000 milliards de dollars, soit 10 fois le PIB mondial, alors qu’il n’existait pas en 1990. Ce même rapport ajoutait que seulement 7 à 8% des dérivés échangés chaque jour ont pour objet la couverture des opérateurs finaux non financiers.

La confédération FO considère en conséquence parfaitement légitime que les politiques de relance s’appuient sur l’instauration de dispositifs garantissant des salaires minima là où ils n’existent pas, l’augmentation des salaires, dont en France le Smic et le point d’indice de la Fonction publique.

FO rappelle qu’augmenter le salaire, net et différé – autrement dit la cotisation sociale – contribue à augmenter les recettes des systèmes de protection sociale (santé, retraite et assurance chômage notamment).

Partage de la valeur – salaire, intéressement et participation

FO souligne en premier lieu que le principal avantage pour les entreprises des dispositifs d’intéressement et de participation est qu’ils sont exonérés de cotisations sociales. Ils viennent donc de fait souvent en concurrence avec les salaires proprement dits et génèrent un manque à gagner conséquent pour les régimes de sécurité sociale. FO demande à ce sujet une évaluation précise actualisée de ce manque à gagner.

En outre, la participation consistant en un revenu différé aura un impact très limité du côté de la stimulation de la demande. Sans compter qu’un certain nombre d’entités ne sont pas concernées par ces primes ou peuvent difficilement les mettre en place compte tenu de leurs finalités (mutuelles, associations à but non lucratif etc.).

Aussi FO revendique notamment, en la matière, l’instauration d’une hiérarchie claire des thèmes de négociation, lors des négociations obligatoires sur les salaires (NAO), entre négociation salariale et négociation des dispositifs d’épargne salariale, ainsi que le conditionnement de la conclusion ou de la reconduction d’un accord d’intéressement à des accords salariaux.

Métiers « essentiels » et métiers en tension

Les négociations dans le secteur de la santé, ont permis d’apporter de premières réponses conséquentes à l’insuffisante considération apportée à ces personnels. FO constate que ce n’est pas le cas pour les salariés dits de la « deuxième ligne », qui ont permis d’assurer, pendant la période de confinement, à la fois l’approvisionnement (de la production agricole, aux caisses des commerces de proximités, en passant par le conditionnement, la transformation, le transport), la protection de la population (services d’aide à la personne à domicile), le nettoyage et la désinfection des locaux, le ramassage des ordures, les services publics de base… Au-delà des paroles reconnaissantes, aucune mesure de revalorisation de ces métiers, trop souvent payés au minimum, à temps partiel et précaires pour nombre d’entre eux, n’a été encore mise en œuvre.

FO appelle donc à un processus d’ouverture de négociations portant sur la reconsidération d’ensemble de ces métiers (qualifications, formations, rémunérations, conditions de travail, nature des emplois, perspectives d’évolution). Dans la mesure où nombre des salariés concernés sont aujourd’hui des femmes, cela répondrait à la volonté affichée d’amplifier les actions en matière d’égalité Femmes/ Hommes.

Dans le même esprit, une démarche d’évaluation précise des métiers dits en tension et ceux où prédomine le travail détaché (type d’emploi, raisons de l’inadéquation offre – demande) demande à être engagée afin d’identifier les actions, pouvant donner lieu à des négociations, permettant de rendre attractifs ces métiers dès les parcours d’orientation et de formation requis.

Relance industrielle, des services et développement durable

Transformer notre appareil productif en conciliant développement des technologies d’avenir et réduction de l’empreinte carbone en vue d’agir sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, doit également garantir un emploi décent, au sens de l’OIT, à chacun et chacune. FO ne croit pas à la décroissance verte mais appelle à une transition socialement juste.

Pour FO le salaire n’est pas l’ennemi du climat. Au titre de la « conciliation transition écologique et pouvoir d’achat », la généralisation de la prime de transport figurait ainsi dans la plateforme des revendications FO de mars 2019, de même que la création d’un prêt à taux zéro en complément de la prime à la reconversion perçue comme trop élitiste. La rénovation des passoires thermiques ne peut pas porter sur les ménages dont les moins favorisés seront les plus impactés, mais doit faire l’objet d’un véritable programme d’investissements publics qui constituerait un gisement d’emplois important.

La confédération FO est représentée au sein du CNI (Conseil national de l’industrie) et des Comités stratégiques de filières).

Dans la situation actuelle et pour les années à venir, comme au regard de l’enjeu du changement climatique et de l’environnement, l’État, les pouvoirs publics, doivent intensifier leur rôle à la fois stratège, d’impulsion de grands travaux par la commande publique, d’opérateur quand l’initiative privée est défaillante, afin de favoriser la reconquête industrielle et des services – notamment numériques.

Il revient de s’attacher à ce que la BPI (Banque publique d’investissement) définisse ses politiques d’investissement, de prêts, de financements directs en ce sens, en s’appuyant sur les travaux du CNI et des comités stratégiques de filières (particulièrement de l’aéronautique en y incluant le transport aérien, agroalimentaire, automobile, bois, chimie et matériaux, construction, eau, électronique, ferroviaire, mer, mines et métallurgie, énergie et nucléaire, numérique, santé, déchets).

FO estime que devraient être notamment explorées plus intensément les filières de transports (fret ferroviaire et ferroutage, navigation fluviale) ; du recyclage à tous les niveaux, du secteur des navires aux procédés de réduction et recyclage des déchets depuis le niveau local…

Pour FO, une politique de rénovation et d’investissement dans les services publics, à commencer par leurs locaux (écoles, collèges, lycées, universités, hôpitaux, Ehpad, commissariats, prisons, …), est indispensable afin de permettre aujourd’hui, face au risque sanitaire, et demain, une meilleure qualité pérenne du service public et des conditions de travail des agents. A ce titre, et au titre de la proximité, FO renouvelle son appel à l’arrêt des fermetures de services, écoles, trésoreries, maternités, hôpitaux… et à une relocalisation de proximité des services publics, à laquelle ne répond pas, loin s’en faut, le dispositif des maisons de services publics.

Dialogue social

A plusieurs reprises, FO a protesté contre les dispositions d’exception résultant du régime de l’état d’urgence sanitaire consistant à mettre en cause un dialogue social fondé sur le respect des libertés syndicales. FO a pointé en particulier les dispositions conduisant le gouvernement à s’affranchir des consultations obligatoires prévues notamment par le code du travail. FO demande que soit mis fin aux dispositions des ordonnances permettant, jusqu’au 31 décembre 2020, de s’affranchir de la négociation collective pour ce qui concerne les jours de repos (JRTT), ceux prévus par une convention de forfait et les jours pris sur le CET dans la limité de 10 jours au total, ou encore permettant, potentiellement, de déroger à la semaine de 48 heures, au temps de repos et à l’interdiction du travail du dimanche. FO demande aussi que soient rétablis les délais classiques de consultation du CSE ainsi que ceux relatifs aux demandes d’expertises, avant l’échéance du 23 août 2020.

D’une manière plus générale, FO estime nécessaire que soit évalué objectivement l’impact sur le dialogue social des réformes récentes du code du travail (loi et ordonnances travail). FO souligne qu’à un moment où le discours du gouvernement met l’accent sur la proximité, ces réformes ont notamment conduit au regroupement et à une certaine centralisation d’instances représentatives du personnel néfaste à l’efficacité de cette représentation de terrain. Cela vaut en particulier, comme déjà indiqué plus haut, pour ce qui concerne les CHSCT supprimés pour les entreprises de moins de 300 salariés, et transformés en Commission du CSE au-delà.

Nombre de « réformes » de ces dernières années ont été contestées, parfois par l’ensemble des organisations syndicales concernées (transformation de la fonction publique, éducation nationale, santé, …), dont FO demande l’abandon. FO estime là aussi que le dialogue social devrait conduire, à tout le moins, à en suspendre l’application et à revenir à la table des discussions et négociations véritables.

CESE

Concernant le CESE (Conseil économique, social et environnemental), outre qu’elle contestait l’article 6 du projet de loi organique qui conduisait à affaiblir une nouvelle fois le rôle des interlocuteurs sociaux et donc du dialogue social, FO s’est adressée au premier ministre le 30 juin dernier pour lui rappeler que, plus largement, dès les débuts, en 2018, des discussions sur la réforme du CESE, elle avait fait connaître son attachement à ce que demeure une représentation spécifique et effective de la dimension « vie économique et dialogue social ». Nous interrogions aussi sur le mode de saisie pétitionnaire tendant à opposer démocratie dite participative à démocratie représentative à laquelle, FO, vous le savez, est attachée. Nous avons aussi réaffirmé, dans cet esprit, notre attachement au caractère consultatif du CESE (FO s’étant opposée en 1969 à la fusion du CES – Conseil économique et social – avec le Sénat).

FO demande en conséquence que le temps de la consultation avec les organisations composant le CESE soit donné avant toute modification substantielle de son organisation, fonctionnement et composition.

Décentralisation

Concernant la décentralisation, FO a fait connaître, à plusieurs reprises déjà, qu’elle contestait le principe de « différenciation » en ce qu’il conduirait à établir des normes sociales différentes d’une région à l’autre, d’un « territoire » à l’autre, ce qui serait un recul, ou retour en arrière. Outre que cela irait à l’encontre du principe d’égalité républicaine, ce n’est pas cohérent avec l’objectif d’une harmonisation sociale par le haut au niveau européen, ni de celui du respect effectif des normes internationales du travail.

Sécurité sociale, dépendance et retraite

De longue date, la confédération FO milite pour le maintien d’une sécurité sociale solidaire fondée sur les besoins des assurés.

Dès le début des années 90, avec la création de la CSG et le mouvement vers l’étatisation de la sécurité sociale, la confédération FO a revendiqué une clarification entre ce qui relève de l’intérêt général, donc du financement par l’impôt et de l’arbitrage de l’État, et ce qui doit continuer de relever du paritarisme fondé sur la négociation collective entre confédérations syndicales et organisations d’employeurs et sur le financement par les cotisations et contributions sociales.

Cette revendication demeure et nous paraît plus que légitime aujourd’hui.

Dépendance

Elle vaut pour l’enjeu de la dépendance liée au grand âge, que FO distingue d’une prise en charge d’ensemble de l’autonomie. FO estime en effet que la prise en charge de la dépendance devrait relever de l’assurance maladie afin d’éviter la dérive d’une différenciation de la prise en charge des soins des personnes âgées.

Retraite

L’une des raisons de notre opposition – qui demeure intacte – au projet de régime unique de retraite par points, dit « système universel de retraite par points », est qu’il conduirait immanquablement à donner le pouvoir à l’État en dernier ressort sur l’ensemble des paramètres du système (valeurs du points, taux de rendement, âge pivot ou d’équilibre, …) et donc sur le niveau des pensions et l’âge effectif de départ auquel, selon les situations, les salariés pourraient demain bénéficier d’une retraite décente.

Nul ne l’ignore. Notre position est que ce projet doit être abandonné. Reprendre aujourd’hui des arguments erronés, auxquels FO a systématiquement apporté des réponses, qui n’ont pas été contredites, ne la modifiera pas. Nous ne pouvons que rappeler qu’au terme de deux années et demie de concertations et débats en tous genres, le gouvernement n’a réussi ni à en expliquer le bien fondé, ni à convaincre de ses avantages. Mais nous ajoutons que l’heure est d’autant moins à sa reprise que la priorité doit porter sur la crise sanitaire, qui, malheureusement, n’est pas derrière nous, et sur ses conséquences sociales et économiques.

Concernant la question de l’équilibre du système de retraite actuel, FO rappelle les désaccords sur la nature et les causes du déséquilibre évalué par le COR à l’automne dernier et conteste la démarche consistant à demander aux interlocuteurs sociaux de résorber, au sein du système de retraite, le déficit de recettes lié à la crise sanitaire et au confinement. Une telle démarche conduirait en effet inévitablement à privilégier la voie du recul de l’âge de départ sous une forme ou une autre. Une telle solution serait à la fois injuste et contreproductive du point de vue de l’enjeu de l’emploi des jeunes.

Dette Covid-19

FO estime que le traitement de la dette dite dette Covid-19 doit être global et, y compris, concerté et coordonné au niveau européen et international (OCDE) dans la mesure où l’ensemble des pays ont été touchés par la pandémie et ont dû y faire face par un accroissement de l’endettement public, afin d’éviter que ce ne soient les populations et les salariés qui en subissent, aujourd’hui ou demain, les conséquences.