La « taxe pro » manque aux collectivités

Actualités par Valérie Forgeront

En 2012, les dépenses de fonctionnement des collectivités locales ont augmenté de 3,1% tandis que leurs recettes n’ont progressé que de 1,7%. Alors que ces recettes proviennent principalement de la fiscalité et des dotations de l’État, ces deux composants posent désormais problème. En effet, au nom de la réduction des dépenses publiques (50 milliards d’ici à 2017) l’État a décidé de poursuivre le régime qu’il impose déjà aux collectivités depuis 2011, même si la dette de ces collectivités (173,7 milliards en 2012) pèse seulement pour 9,5% dans la dette publique nationale. Après des années de gel de son concours financier, l’État a annoncé une baisse des dotations. Initialement, elles devaient être abaissées de 1,5 milliard en 2014 et en 2015. Mais sur les 55 milliards de dotations annoncées, le gouvernement a prévu d’ôter encore 1,5 milliard en 2015. Opération qu’il renouvellera jusqu’en 2017. Pour les collectivités, cela signifie une perte de 10 milliards d’euros en quatre ans. Alors qu’une part des dotations sert à compenser des exonérations et autres suppressions d’impôts, les collectivités s’inquiètent. Les dotations de l’État pèsent en effet désormais pour 45% dans leurs ressources. Cette situation renvoie à l’évolution de la fiscalité locale, de plus en plus dépendante des décisions de l’État. Celle, par exemple, de la suppression en 2010 de la taxe professionnelle payée par les entreprises aux collectivités. La taxe apportait plus de 30 milliards de recettes annuelles.

Un poids fiscal sur les ménages

L’État a toutefois décidé de la remplacer par la contribution économique territoriale (CET). Celle-ci est composée d’une cotisation foncière des entreprises (CFE), perçue par les communes et intercommunalités, et d’une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), répartie entre les Régions, les départements et les communes. La CFE a induit 6,65 milliards de recettes en 2012, la CVAE 15,18 milliards. Pas suffisant. L’État a été contraint de compenser dès 2011 la suppression de la taxe professionnelle. Il a ainsi inclus dans son concours annuel aux collectivités une « dotation de compensation » (DCRTP), dont le montant a été figé dans le temps. Il a aussi créé le Fonds national de garantie individuelle de ressources (FNGIR), censé établir une péréquation de ressources entre les collectivités. En 2012, la DCRTP et le FNGIR représentaient à eux deux 7,5 milliards de compensation. La suppression de la taxe « a eu pour conséquence de réduire la part de la fiscalité directe dans les ressources des collectivités territoriales », notamment pour les départements, remarque la Cour des comptes. L’instauration de la CET a modifié la part des différents contribuables locaux. Ainsi, quand en 2010 les ménages payaient 10 milliards au titre de la taxe d’habitation, en 2012 ils payaient plus de 13,2 milliards. Dans le même temps, quand en 2010 les entreprises s’acquittaient de 31,3 milliards au titre de la taxe professionnelle, en 2012 elles ne payaient plus que 23,7 milliards au titre des nouvelles taxes économiques, dont la CET... L’État a donc fait un cadeau de huit milliards aux entreprises, tandis que le produit des impôts locaux sur les ménages a augmenté.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

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