Le travail des femmes paraît encore illégitime

Égalité professionnelle par Clarisse Josselin

Une étude du CESE alerte sur les inégalités persistantes entre les hommes et les femmes et la précarisation des travailleuses les moins diplômées.

Avec 13,5 millions de travailleuses, les femmes représentaient en 2011 presque la moitié de la population active. Pourtant, leur travail reste moins reconnu, moins valorisé et moins visible que celui des hommes. C’est ce que pointe une étude réalisée par la Délégation des droits des femmes et à l’égalité du Conseil économique, social et environnemental (CESE) intitulée « Les femmes éloignées du marché du travail », et rapportée fin février par Hélène Fauvel, du groupe FO.

Certes, depuis 1965 les femmes n’ont plus besoin de l’autorisation de leur mari pour travailler, mais les mentalités peinent à évoluer. Leur salaire annuel reste en moyenne de 27% inférieur à celui des hommes. « Le droit à l’autonomie économique des femmes grâce à leur travail n’est pas encore pleinement reconnu et la notion de salaire d’appoint reste encore très présente », constate Hélène Fauvel.

Selon une étude de l’Insee de 2011, un quart des Français (mais davantage les personnes âgées que le jeunes) estiment qu’en période de crise économique il faut donner la priorité à l’embauche masculine.

Ce manque de légitimité touche particulièrement les femmes les moins diplômées. Car l’étude constate aussi que l’écart se creuse au sein de la population féminine elle-même. Tandis que les plus qualifiées progressent, les moins qualifiées glissent vers la précarité.

L’enquête, qui s’est focalisée sur ces dernières, analyse les différents freins qui restreignent leur insertion professionnelle : difficultés de retour à l’emploi après une naissance, manque de qualifications et déséquilibre dans le partage des responsabilités familiales avec leur conjoint.

71% DES FEMMES SANS DIPLÔME NE TRAVAILLENT PAS

La question des enfants est centrale, d’autant plus que la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle « ne s’applique exclusivement qu’aux femmes dans l’esprit des employeurs comme aux yeux de l’opinion publique » (voir interview). Hélène Fauvel préconise donc de développer et diversifier les gardes d’enfants, avec une prise en compte des contraintes horaires et financières. Elle appelle aussi les entreprises et les pouvoirs publics à encourager le partage des charges parentales.

Le niveau de qualification est également essentiel. Seules 29% des femmes sans diplôme travaillaient en 2011, contre 52% des hommes dans la même situation. Et près de la moitié d’entre elles étaient employées dans quelques métiers typiquement féminins et précaires. Ces conditions de travail contraignantes et peu épanouissantes ne les encouragent pas à conserver leur emploi après une naissance.

Pour favoriser l’égalité des chances et laisser le choix aux femmes de travailler ou non, Hélène Fauvel émet des préconisations. L’une d’elles consiste à mettre en œuvre une politique active de mixité dès l’école primaire, pour encourager les femmes les moins qualifiées à accéder à des métiers vus comme masculins, dans les filières scientifique ou technologique.

Une autre recommandation est d’encourager leur accès à la formation continue et à la validation des acquis de l’expérience (VAE) pour valoriser leurs « compétences invisibles ».

Cela pourrait permettre ensuite de réévaluer le niveau de qualification d’un grand nombre d’emplois féminins. Car pour la délégation du CESE, « œuvrer pour une meilleure insertion professionnelle des femmes, c’est tout à la fois conforter leur statut social et garantir leur autonomie financière et familiale ».

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante