L’entreprise, numéro trois des liaisons maritimes transmanche, est dans le collimateur de l’Autorité de la concurrence britannique depuis un an. Cette dernière reproche à Eurotunnel, propriétaire des bateaux et par ailleurs exploitant du tunnel sous la Manche, un abus de position dominante. Le 20 mai, elle a interdit, dans une décision préliminaire, à MyFerryLink d’exploiter ses ferrys de Douvres vers Calais. Elle rendra très prochainement son avis définitif.
« On ne se fait pas d’illusions sur cet avis, mais nous allons faire appel en espérant qu’il sera suspensif et nous comptons ensuite sur une intervention du gouvernement », explique Thierry Haxaire, délégué FO et officier mécanicien sociétaire de MyFerryLink.
En attendant, les marins poursuivent l’aventure. Tous les salariés sous contrat CDI sont sociétaires. Après une souscription initiale de 50 euros chacun, ils reversent chaque mois 2% de leur salaire à la Scop. Le capital atteint désormais 500 000 euros. Sans l’aide d’Eurotunnel, qui a racheté les bateaux 65 millions d’euros pour les louer ensuite à MyFerryLink, la Scop n’aurait jamais vu le jour. Et sa situation reste précaire.
Sacrifices
Depuis qu’ils sont aux commandes, l’attitude des salariés a radicalement changé. « Ils ont compris qu’ils travaillent pour eux, ils ne comptent plus leurs heures et font attention à ce qu’ils dépensent, les budgets ont baissé, explique le délégué FO. Il y a eu de réels sacrifices. Sur l’année, on a 30% de travail en plus et 2% de salaire en moins. Des primes et des accords ont disparu, mais c’était ça ou on perdait tout. »
Il arrive que des conflits émergent, mais sans déboucher sur des grèves comme auparavant. « Le président et le directoire prennent les décisions en toute indépendance, mais à tout moment le conseil de surveillance peut les faire tomber, ajoute Thierry Haxaire. Il y a davantage de débats et de démocratie, c’est intéressant mais ce n’est pas non plus évident car nous n’avons pas reçu de formation. Chacun doit rester raisonnable. »
Il a monté fin mars le syndicat FO, face au syndicat historique. « Au début, je pensais qu’un syndicat était inutile dans une Scop, mais ça reste une grosse entreprise et les chefs ne sont pas toujours irréprochables, ajoute-t-il. C’est bien de peser dans les débats et que les salariés ne se retrouvent pas seuls face à la direction. Mais sans l’esprit de la Scop, je n’aurais jamais franchi le pas. »