Le niveau de vie des retraités va baisser par rapport aux actifs

Réformes des retraites par Clarisse Josselin

Selon une étude de l’Insee parue le 15 avril, le niveau de vie moyen des retraités ne devrait plus représenter en 2060 que 70% à 85% de celui des actifs.

Les différentes réformes menées depuis la fin des années 1970, le développement des carrières plus longues et la montée en puissance des retraites complémentaires avaient permis de diminuer le taux de pauvreté des retraités. Aujourd’hui, leur niveau de vie atteint quasiment celui des actifs. Mais cet équilibre est désormais terminé, selon une étude de l’Insee parue le 15 avril et portant sur les conséquences de vingt ans de réformes des retraites, dont celle de 2014. D’après les simulations de l’institut de statistique, l’écart va se creuser d’ici à 2060 pour atteindre une différence de 15% à 30% selon les scénarios.

Certes, les montants des pensions à la liquidation devraient continuer à augmenter grâce aux effets de la croissance. Mais l’évo­lution des règles de revalorisation, à la fois des salaires au cours de la carrière, qui servent à calculer le montant de la retraite, et des pensions en cours, va entraîner un décrochage.

Pour le secteur privé, cette revalorisation est, depuis la fin des années 1980, indexée sur les prix. Il en est de même pour la fonction publique depuis 2003. « La revalorisation sur les prix assure aux retraités un pouvoir d’achat constant. En revanche ils ne bénéficient plus des effets de la croissance, à l’inverse des salaires », explique l’Insee. Et l’écart se creusera davantage dans les scénarios de croissance forte. « Une croissance plus rapide se traduit ainsi non seulement par des premières pensions plus basses en proportion du salaire courant, mais aussi par un écart qui se creuse ensuite plus rapidement. »

Partage des richesses

Si l’on avait conservé l’intégralité des règles qui ont prévalu jusqu’au milieu des années 1980, les dépenses de pension représenteraient de 20% à 21% du PIB en 2060, selon l’Insee. Or après les « nom­­breux changements visant à limiter [leur] progression », cette part se situerait entre 12% et 15% du PIB selon les hypothèses du taux de croissance.

« Entre 1960 et 2010, les pensions de retraite ont gagné 10 points de PIB sans poser de problème, constate Philippe Pihet, Secrétaire confédéral FO chargé des retraites. Mais une hausse de 7 points sur les cinquante ans à venir, ça semble l’apocalypse. Le fonds du sujet, c’est le partage des richesses. »

Ces résultats auraient été encore plus marqués si l’Insee n’avait pas appliqué divers calculs chargés de « corriger l’écart entre les deux catégories de population ». Les revenus relatifs des ménages ont été rapportés au nombre de membres de chaque ménage, les foyers de retraités étant de plus petite taille. Les calculs prennent en compte d’autres sources de revenus comme le patrimoine, généralement plus élevé dans les ménages de retraités, ou les prestations sociales. Ils intègrent aussi le fait que ces ménages sont plus souvent propriétaires de leur logement, « ce qui tend à améliorer le ratio », reconnaît l’Insee. Sans ces « miroirs déformants », selon Philippe Pihet, le ratio entre les revenus des retraités et des actifs, qui était de 66% en 2010, serait de 48% à 57% en 2060 selon les scénarios.

« Cette étude est la confirmation statistique de ce que nous dénonçons depuis quinze ans et nous conforte dans notre revendication d’une indexation sur les salaires, ajoute le Secrétaire confédéral. L’indexation sur les prix, appliquée en douce par décret en 1987, a un effet dévastateur. C’est ce qui a coûté le plus aux retraités, plus que la hausse du nombre de trimestres. »

 Voir en ligne  : INSEE - Site Internet

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante