Grève chez Free contre l’annualisation du temps de travail

Télécoms par Clarisse Josselin

À Bordeaux et Marseille, les salariés se battent contre l’élargissement des amplitudes horaires, la saisonnalité des plannings et l’introduction du samedi travaillé sans compensation financière.

Refusant la flexibilité, les salariés des centres d’appels de Free à Marseille et Bordeaux ont enchaîné débrayages et manifestations depuis le 25 mars, à l’appel de plusieurs syndicats dont FO. Ils protestent contre un projet d’annualisation du temps de travail sans contreparties.

Ces deux sites, chargés d’assurer les relations techniques et commerciales avec les clients, ont été rachetés à Alice par l’opérateur de téléphonie en 2008. Comme les autres centres d’appels de Free, ils ont été filialisés il y a quinze mois. Le centre de Bordeaux est devenu Equaline, celui de Marseille Certicall.

Sur ces deux sites, qui comptent près d’un millier de salariés, les accords sur le temps de travail expiraient le 31 mars dernier. Les négociations de nouveaux contrats ont démarré en octobre. À Bordeaux comme à Marseille, les directions ont tenté d’imposer l’annualisation du temps de travail avec l’introduction du samedi parmi les jours normalement travaillés (et non plus sur la base du volontariat) et de plus grandes amplitudes horaires. Le projet compte jusqu’à douze semaines hautes (39 ou 40 heures), compensées par des semaines basses (30 ou 31 heures), en fonction de la charge de travail, pour éviter les heures supplémentaires.

Pour être validé, un accord d’annualisation doit être signé par au moins 30% des syndicats représentatifs et ne pas être refusé par plus de 50% d’entre eux. Interrogés par les délégués, les salariés des deux sites l’ont très massivement rejeté. « Ils se plaignent déjà des conditions de travail et de la pression depuis la filialisation, explique David Mégard, délégué FO à Bordeaux. Notre taux de productivité explose les plafonds, ils ne se voient pas passer huit heures d’affilée au téléphone. Ils se disent prêts à faire de nouveaux efforts, mais en échange de compensations. »

CHANTAGE DE LA DIRECTION

Sur les deux sites, FO et d’autres syndicats ont revendiqué 5 jours de congés payés supplémentaires et une hausse de salaire de 100 euros par mois. La direction s’est limitée à deux jours de congés payés, sans prime. Du temps d’Alice, le travail du samedi était compensé par 12 jours de RTT. Les salariés sont d’autant plus remontés que les augmentations de salaires plafonnent à 1% lors des NAO, alors que le patron de Free, Xavier Niel, se vante d’avoir engrangé 1,2 milliard d’euros de bénéfices en 2013.

À Marseille, la CFDT était sur le point de signer l’accord. Elle s’est finalement rétractée face à la forte opposition des salariés et des autres syndicats, qui ont lancé des débrayages très suivis le 25 mars. Si le danger semble écarté, la mobilisation ne faiblit pas. « On ne lâche pas, la direction veut maintenant mettre en place une modulation sur quatre semaines sans accord collectif, explique Patrick Gauci, délégué FO. Elle nous fait du chantage en menaçant aussi de faire passer les pauses déjeuner à deux heures et d’augmenter les amplitudes horaires. »

À Bordeaux, l’intersyndicale initiale a explosé. Deux syndicats, dont FO, ont rejeté l’accord, signé par l’UNSA et la CFDT, représentant 50,3% des salariés. Il devrait entrer en vigueur en juin, mais, là aussi, les salariés se sont mis en grève. « Nous continuons à nous battre, d’autant plus que les NAO vont bientôt démarrer, ajoute David Mégard. Et si l’accord passe, nous tenterons dans le futur d’aligner notre organisation du temps de travail sur celle de Marseille, dans le cadre de l’union économique et sociale. »

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

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