À l’OIT, les travailleurs appellent les gouvernements à se ressaisir

Justice sociale par Evelyne Salamero

Intervention de Jean-Claude Mailly, Secrétaire général de FO, lors de la 105e Conférence internationale du Travail.

La Conférence internationale du travail (CIT), réunie au palais des Nations à Genève, a adopté une résolution sur la justice sociale. Sur ce sujet, FO a d’ailleurs interpellé la ministre du Travail Myriam El Khomri sur la situation actuelle en France.

En juin 2008, dans une « Déclaration sur la justice sociale pour une mondialisation équitable », les représentants des gouvernements et des employeurs au sein de l’Organisation internationale du travail s’étaient engagés à « prendre et renforcer des mesures de protection sociale », et à « promouvoir le dialogue social ».

Mais la crise est passée par là. Plans d’austérité et réformes structurelles n’ont plus cessé de pleuvoir, balayant de fait ces engagements. Cette année, un nouveau texte a donc été adopté qui réaffirme que le respect de la liberté syndicale et de négociation collective est un moyen de faire face à la crise.

FO interpelle la ministre du Travail française, Myriam El Khomri

En assemblée plénière de la CIT, le secrétaire général de la confédération FO, Jean-Claude Mailly, a souligné le 9 juin : « Nous souhaitons que les interlocuteurs sociaux ici présents amènent les gouvernements à se ressaisir et à redonner toute sa place au dialogue social et à la négociation collective. »

La veille déjà, la délégation FO, s’adressant à la ministre du Travail française Myriam El Khomri, avait rappelé « la situation de blocage dans laquelle se trouve le dialogue social aujourd’hui » en France, dénonçant « une forme d’autoritarisme de la part du gouvernement ». 


DISCOURS DE JEAN-CLAUDE MAILLY EN SALLE DES ASSEMBLÉES DU PALAIS DES NATIONS MERCREDI 8 JUIN 2016

Un constat s’impose aujourd’hui :

- Face, voire contrairement, à l’adoption de la Déclaration sur la justice sociale de 2008 et du Pacte mondial pour l’emploi de 2009, la réponse apportée par les gouvernements, coordonnée ou relayée par le système financier et la Troïka en Europe est celle de l’austérité, de réformes structurelles et de déréglementation des systèmes sociaux et de relations du travail.

- Aucune région du monde n’est épargnée. Force est de constater, en particulier en Europe, y compris en France, qu’on est loin du consensus de 2008 et 2009. Le constat aujourd’hui, c’est que du Portugal jusqu’à la Finlande, en passant par l’Espagne, l’Italie, la Belgique ou la France, les politiques d’austérité et de déréglementations du marché du travail affaiblissent le modèle social et sont source d’inégalités et de précarité.

Concernant la situation française c’est le cas avec la loi travail, dont le coeur consiste à dévitaliser la négociation collective de branche, nationale, en renvoyant à la primauté du niveau de l’entreprise.

- Aujourd’hui après un affranchissement de la consultation effective des partenaires sociaux, les soutiens de cette loi sont minoritaires, y compris parmi les partenaires sociaux, employeurs comme travailleurs.

- Les exemples donnés dans les pays où ce type de réforme ont été mises en œuvre précédemment ont débouché sur la création d’emplois précaires à l’opposé de l’objectif de travail décent et à un effondrement du nombre de salariés couverts par une convention collective.

- Je rappelle pourtant que la France avait porté en 2011 un projet sur la cohérence au sein du système multilatéral. Les gouvernements doivent s’assurer de la cohérence des décisions prises au niveau international et dans le cadre de leur mise en œuvre nationale. L’OIT doit être au cœur de cette cohérence dans le concert des institutions internationales et multilatérales.

• Rôle fondamental de l’OIT / cohérence

- Nous souhaitons que les interlocuteurs sociaux ici présents amènent les gouvernements à se ressaisir et à redonner toute sa place au dialogue social et à la négociation collective car c’est la seule issue afin de redonner tout son sens à l’économie productive et afin de répondre aux besoins des populations, aux défis climatiques et à la création d’emplois décents.

- Dans ce contexte, FO renouvelle son soutien à la déclaration sur la justice sociale et appelle les gouvernements à renouveler leur soutien à un système de contrôle et de supervision des normes fort et rappelle son attachement aux valeurs fondatrices de l’Organisation en 1919 et à son mandat de justice sociale.

- Je citerai pour terminer un syndicaliste français qui a joué un rôle important à l’OIT, Léon Jouhaux : « la paix doit être fondée sur la justice sociale et l’amélioration de la condition de la classe ouvrière ».


Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante