Assurance chômage : le déficit de l’Unedic devrait continuer à se creuser

Emploi par Clarisse Josselin, Michel Beaugas

L’Unedic, l’organisme qui gère l’assurance chômage, a présenté le 20 septembre ses prévisions financières jusqu’en 2019. En raison du faible taux de croissance, il envisage une dégradation dès 2017 avec une remontée du chômage et des comptes toujours plus dans le rouge. Mais pas d’inquiétude, les allocations chômage seront bien versées.

L’Unedic, l’organisme paritaire qui gère l’assurance-chômage et où siège FO, s’attend à une nouvelle détérioration sur le front de l’emploi. Il a publié le 20 septembre ses prévisions financières jusqu’en 2019. Pour 2016, il anticipe une baisse du nombre de chômeurs en métropole, avec 124 000 personnes en moins inscrites en catégorie A, sans aucune activité. Mais ce nombre repartirait à la hausse dès 2017 avec 79 000 chômeurs supplémentaires.

Le taux de chômage au sens du BIT passerait ainsi de 9,4 % fin 2016 à 9,5 % fin 2017. Selon les projections de l’organisme, il stagnerait en 2018 pour atteindre 9,6 % de la population active fin 2019.

Les comptes de l’Unedic resteraient dans le rouge. Le déficit serait de 4,3 milliards d’euros fin 2016, puis de 3,8 milliards d’euros fin 2017, portant la dette cumulée à 33,8 milliards d’euros fin 2017. C’est presque le montant des recettes annuelles de l’organisme, évaluées à 35,1 milliards d’euros en 2016.

Un taux de croissance de 1,2 % en 2017

Ces sombres perspectives sont dues à un « ralentissement de la croissance », déterminant principal sur les finances de l’Unedic. Ce dernier se traduit par une hausse du chômage, donc des dépenses d’allocations versées aux chômeurs indemnisés et une baisse des contributions au régime.

L’analyse, toute théorique, se base sur un taux de croissance prévisionnel de 1,2 % en 2017, un chiffre « qui fait consensus parmi les économistes » a précisé Alexandre Saubot, président (Medef) de l’Unedic, lors d’une conférence de presse. Il a expliqué cette faible croissance par les incertitudes liées au Brexit. De son côté, le gouvernement table sur un taux de croissance de 1,5 % l’an prochain.

L’Unedic anticipe également une baisse des créations d’emploi par une « atténuation des effets des politiques d’emploi », notamment une stabilisation des contrats aidés et « la fin de la montée en charge » du Pacte de responsabilité. Il table sur la création de 143 000 emplois affiliés à Pôle emploi en 2016, mais seulement 76 000 en 2017.

Le Medef refuse obstinément de mettre la main à la poche

La croissance ne repartirait ensuite que faiblement, avec un taux de 1,5 % en 2018 et de 1,4 % en 2019. Selon les projections de l’organisme, la dette cumulée atteindrait alors 37,8 milliards d’euros fin 2018 puis 41,4 milliards d’euros fin 2019.

« Ce n’est pas une surprise, la situation ne va pas s’améliorer tant que le taux de croissance est faible et qu’on ne change pas de politique économique, commente Michel Beaugas, secrétaire confédéral FO chargé de l’emploi. Mais le régime est bien géré et n’est pas en faillite, l’indemnisation des demandeurs d’emploi n’est pas en danger ».

Ces projections se basent aussi sur les règles d’indemnisation chômage actuelles, mais qui sont amenées à évoluer. En juin dernier, le Medef, qui refuse obstinément de mettre la main à la poche, avait fait échouer la renégociation de la convention d’assurance chômage. Les règles actuelles ont été prolongées dans l’attente d’un nouvel accord. Le retour à la table des négociations semble inutile tant que le Medef persiste dans son refus « d’augmenter le coût du travail ».

L’abus de CDD fragilise le régime

Lors des dernières négociations, les organisations syndicales avaient unanimement réclamé une surtaxation des contrats courts pour améliorer les comptes du régime. Et le rapport sur les perspectives financières de l’Unedic, remis au gouvernement et au Parlement le 20 septembre, confirme le bien fondé de cette revendication.

L’organisme s’est penché sur « les effets de la fragmentation croissante du marché du travail » avec le développement des contrats courts, d’une durée d’un mois ou moins. Si le taux d’emplois en CDI reste stable, autour de 76%, le nombre de CDD courts a plus que doublé depuis le début des années 2000, révèle l’Unedic. Ils représentent aujourd’hui 69% des embauches.

Or les CDD coûtent 3,3 fois plus au régime qu’ils ne rapportent : en 2015, les fins de CDD ont entraîné le versement de 8,9 milliards d’euros d’allocations alors qu’ils avaient rapporté 2,66 milliards d’euros de cotisations. Pour l’intérim, le ratio est également négatif de 2,7 fois (1 milliard d’euros de recettes pour 2,8 milliards d’euros de dépenses).

Pour les emplois en CDI, en revanche, ce ratio est positif de 0,6. L’an dernier ils ont rapporté 29,3 milliards d’euros de cotisations, pour un versement de 19 milliards d’euros d’allocations chômage. Soit un gain annuel pour le régime de près de 10 milliards d’euros.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

Michel Beaugas Secrétaire confédéral au Secteur de l’Emploi et des retraites