Assurance chômage : les droits des allocataires sur la sellette

Emploi et Salaires par Clarisse Josselin

La renégociation de la convention d’Assurance chômage, qui expire le 30 juin 2016, a démarré le 22 février au siège du Medef. Face à la dette de l’Unédic (30 milliards d’euros fin 2016), le patronat, incité en ce sens par le gouvernement, sera sans doute tenté de réduire les droits des demandeurs d’emploi, notamment avec la dégressivité des allocations. FO lui opposera d’autres revendications. Voici un aperçu des thèmes de négociation probables.

Stéphane Lardy, à la tête de la délégation FO, négocie la prochaine convention d’Assurance chômage. Photographie : F. Blanc / FO Hebdo - CC BY-NC 2.0

La dette de l’Unédic devrait atteindre 29,4 milliards d’euros fin 2016. Pourtant la balance ressources − dépenses sur l’indemnisation est équilibrée : 34,8 milliards d’euros de contributions pour 34,7 milliards d’euros d’allocations versées.

Un aspect peu évoqué est celui de la contribution de l’Unédic au budget de Pôle emploi. En effet, jusqu’à la fusion ANPE/Assedics en 2008, l’Unédic affectait 7 % du montant des cotisations chômage au financement des Assedics. Cette contribution est passée à 10 %. S’il est évidemment nécessaire que Pôle emploi bénéficie des moyens indispensables à ses missions, FO estime que la prise en charge de ce financement complémentaire mérite d’être posée, a fortiori en période de fort endettement du régime.

Seniors, dégressivité... les pistes libérales

Pour être indemnisé, il faut actuellement avoir cotisé au moins 4 mois dans les 28 derniers mois (les 36 derniers mois pour les 50 ans et plus). La règle est ensuite un jour indemnisé pour un jour travaillé. La durée d’indemnisation maximale est de 24 mois pour les moins de 50 ans et de 36 mois à 50 ans et plus. Le patronat et la CFDT veulent repousser l’âge charnière, au moins à 52 ans. Si en moyenne les seniors ne vont pas au bout de leurs droits, FO souligne qu’un tiers d’entre eux les consomment tous. Repousser le seuil à 52 ans placerait 14 000 personnes en grande précarité, pour une économie de 183 millions d’euros.

Mettre en place une indemnisation dégressive dans le temps est un faux débat pour FO. Ce système, déjà expérimenté en France, a même accentué le chômage de longue durée des moins qualifiés. Et la dégressivité existe déjà : 25 % des allocataires arrivent en fin de droits entre le quatrième et le huitième mois d’indemnisation et voient leurs revenus chuter d’au moins 50 % en passant à l’ASS (allocation de solidarité) ou au RSA.

Pour FO, il faut augmenter les ressources de l’Unédic

Les contrats précaires (CDD, intérim) produisent de fait moins de cotisations alors que donnant lieu à de plus fréquentes indemnisations. Leur nombre explosant, FO propose d’instaurer un système de bonus/malus sur la cotisation chômage de l’employeur selon son taux de recours aux contrats précaires, sur le modèle ATMP. Ce système, qui pourrait générer un gain de 4 milliards d’euros, vise surtout à modifier le comportement des employeurs.

FO revendique aussi la contribution obligatoire à l’Assurance chômage de tous les employeurs publics employant des salariés privés, au lieu d’une gestion directe de l’allocation chômage avec parfois des dysfonctionnements. Ce système, plus juste pour les allocataires, permettrait, selon les estimations, d’augmenter les ressources de 1 milliard d’euros.

Infographie : F. Blanc

Autre levier, augmenter les cotisations de 0,1 point fait gagner 500 millions d’euros. FO propose aussi de déplafonner les contributions des plus hauts revenus. Doubler le plafond de cotisation à l’Assurance chômage permettrait de gagner 660 millions d’euros.

En application de l’accord de novembre 2014 sur les retraites, les interlocuteurs sociaux doivent aussi négocier une « contribution » pour les employeurs qui se séparent de salariés seniors. Pour FO, cette taxe doit être reversée à l’Unédic et non à l’Arrco comme c’est envisagé.


Zoom : Les intermittents négocient à part
La loi du 17 août 2015 impose une nouvelle procédure de négociation des annexes 8 et 10 de la convention Unédic.
Les branches couvrant les artistes et techniciens intermittents du spectacle peuvent négocier leurs règles spécifiques d’indemnisation chômage, mais dans le respect d’un document de cadrage (objectifs généraux et financiers, délais) fixé par les organisations interprofessionnelles. S’il respecte ce cadre, l’accord sera repris dans l’accord interprofessionnel d’Assurance chômage. S’il ne le respecte pas, ou faute d’accord, la négociation interprofessionnelle reprendra la main. La Fasap FO craint une négociation très difficile, sous contrainte budgétaire.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante