TDF 2016 - Christian Prudhomme : « L’effet du Tour sur les gens est dingue »

Le Tour Entretien

Des supporters au bord de la route, entre Mende et Valence.

Le directeur du Tour de France se félicite de la ferveur suscitée par l’épreuve, Notamment à l’étranger.
Et explique certains choix, notamment sur le parcours de cette édition 2016.

FO Hebdo : Comme l’an dernier, ce Tour est très montagneux, alors qu’en 2012 les contre-la-montre primaient. Pourquoi cette évolution ?

Christian Prudhomme : 2012 était une exception : la tendance est à la baisse des distances contre-la-montre depuis longtemps. Aujourd’hui, les chronos font plus d’écarts que les étapes de montagne. Mais le seul dogme, c’est qu’il n’y a pas de dogme, comme je le répète souvent ! Cette année on a deux contre-la-montre difficiles, et on est heureux de remarquer que depuis le début de la saison le niveau se resserre en contre-la-montre, ce qui nous va très bien...


L’idée c’est de donner la prime aux grimpeurs, donc au spectacle ?

On veut surtout donner la prime à l’indécision, au suspense. Tous les amoureux du vélo préféreront que la sélection se fasse par l’avant plutôt que par l’arrière. De toute façon, on ne sait jamais ce qui peut se passer à l’avance. Qui aurait imaginé, au départ du Tour 2014, que ni Contador ni Froome ne seraient plus en course au bout d’une semaine, et que Pinot et Peraud seraient sur le podium final ?


Il y a beaucoup moins de « pièges » sur ce parcours que ces deux dernières années, où l’on avait vu des pavés, des arrivées au mur de Huy ou à Mûr-de-Bretagne... Pourquoi ?

Il faut bien faire avec la géographie de la France : au-dessus d’une diagonale Pays basque – Alsace, il n’y a pas de montagne ! En revanche il y a de grandes régions de vélo, comme la Bretagne, où il nous faut aller régulièrement. On utilise alors ce que l’on peut pour donner du suspense, de l’émotion à la course. Cette année, la montagne arrive dès la 5e étape pour ne s’arrêter qu’à la veille des Champs-Élysées : il était donc moins nécessaire de pimenter le reste. On a aussi remarqué que les chutes se multiplient, ces dernières années, à cause de la nervosité du peloton. En introduisant une étape de montagne très vite, on décante la course et cela fait retomber cette nervosité.


Une autre solution souvent avancée serait de réduire le nombre de coureurs, en passant de neuf à huit par équipe ?

On le demande depuis longtemps ! Cela serait très bénéfique pour la sécurité des coureurs. Mais il y a quatre ou cinq équipes qui s’y opposent encore.


On retrouve beaucoup de villes-étapes inédites sur cette édition 2016. C’est important pour le Tour de toujours se réinventer ?

La spécificité du Tour, c’est qu’on y retrouve à la fois des petits villages, des villes moyennes et des grandes villes. Et il faut varier les plaisirs. Le Tour doit pouvoir aller partout, et il le fait de plus en plus, car l’idée c’est que l’on peut trouver des solutions pour passer partout, ponctuellement, même là où c’est a priori compliqué. Rien n’est inenvisageable.


En 2017, le Tour partira de Düsseldorf, en Allemagne, donc de l’étranger à nouveau. C’est de plus en plus souvent le cas. Jusqu’où ?

On va là où est la passion. Si la Belgique, terre de vélo, était à 20 000 km de la France, il faudrait trouver une solution pour lui rendre visite. À l’étranger, la passion et la ferveur de la foule font du bien au Tour, et du bien à la France. Dans notre pays qui se replie sur lui-même, rendre visite aux étrangers est un atout. On ne s’en rend pas bien compte, mais partout où le Tour passe, l’effet sur les gens est totalement dingue.