Déneigement de ses routes : le Haut-Rhin délaisse 665 km

Service Public par Valérie Forgeront

Manifestation contre le service public low cost du déneigement dans le Haut-Rhin, le mercredi 23 novembre 2016 sur le parvis de l’Hôtel du Département à Colmar.

Après avoir annoncé qu’il ne traiterait plus 665 km de ses routes en cas de verglas ou de neige, le conseil départemental du Haut-Rhin est revenu sur sa décision. Enfin presque. En cas de verglas les axes seront salés. Mais en cas de neige… Il n’y aura aucun déneigement. FO mène le combat contre l’abandon de cette mission publique essentielle à la sécurité des usagers de la route.

Si l’affaire n’était pas si sérieuse, elle pourrait prêter à rire. En ce début d’hiver et notamment à la veille du réveillon du 1er de l’An, le Conseil départemental du Haut-Rhin appelait les automobilistes à la plus grande prudence sur les routes. Jusque-là, rien de bien original, la collectivité territoriale est dans son rôle.

L’histoire devient toutefois plus croustillante lorsque que l’apprend l’installation récente sur les axes gérés par le département de panneaux signalant les routes pas déneigées. Et ces routes sont nombreuses. Humour, goût du cocasse ? Des panneaux pneus neige admis sont censés compléter la première information.

Au-delà de faire rire ou d’activer les critiques des usagers des routes, cette affaire de « non déneigement » renvoie à la réalisation -ou non- de la mission de service public portant sur le traitement hivernal des routes dans le département du Haut-Rhin.

Le 9 octobre dernier, le président du Conseil départemental (2 400 agents) du Haut-Rhin avait annoncé officiellement la fin du déneigement pour 665 km de routes de plaine, soit environ un quart des axes relevant de la responsabilité du département.

Deux manifestations à l’appel de FO

Cette mesure votée à l’unanimité par l’assemblée départementale en juin 2016 et visant à réaliser une économie de 300 000 euros (sur un coût global de plan de 2,8 millions d’euros en moyenne par an sur ces vingt dernières années) a été révélée par le syndicat FO du conseil départemental.

Majoritaire avec 60% des voix aux élections de 2014 (contre 20% des voix en 2008) le syndicat qui a connu ces dernières années une progression fulgurante de sa représentativité a demandé au Conseil départemental du Haut-Rhin d’abandonner cette mesure détériorant la mission de viabilité hivernale.

La mesure avait déclenché aussi la colère de nombreux maires du département ou encore avait amené 200 citoyens des communes de Bourbach-Le-Bas et de Roderen, distantes de cinq kilomètres, à manifester le 17 décembre leur mécontentement sur la route départementale RD35, une des routes qui ne seraient plus déneigées.

Le maire de Roderen rappelait alors que de nombreux automobilistes l’utilisent pour se rendre au travail mais aussi des bus scolaires. C’est une route avec de la pente, des virages. En hiver quand il y a du vent et de la neige, il y a des congères qui se forment.

Les 3 et 23 novembre, le syndicat FO avait organisé de son côté deux manifestations réunissant à chaque fois quelque 150 agents devant l’hôtel du Département à Mulhouse. Depuis s’irrite FO, le Président du département a engagé des procédures disciplinaires contre une vingtaine d’agents des routes venus manifester le 23 novembre avec des engins de déneigement.

Une demi-décision aberrante

Ces actions syndicales mais hélas aussi quelques récents et graves accidents sur des routes verglacées et non traitées ont conduit la collectivité à tempérer sa mesure s’affichant soudain comme « expérimentale ».

Le 30 décembre, la collectivité expliquait en substance dans une note qu’elle abandonnait l’idée de ne plus traiter ces 665 km de routes. Le nouveau plan hivernal –qui ne concerne pas les routes de montagne, donc les stations de ski remarque FO- consisterait finalement à réaliser des patrouilles et des opérations de salage des routes en cas de verglas. En cas de verglas seulement…

Le département précise en effet que les routes signalées comme non déneigées ne sont pas traitées en cas de chutes de neige. Les automobilistes sont invités à utiliser des pneus neige ou des chaînes.

Pour Christophe Odermatt, le secrétaire général du syndicat FO, ce plan hivernal vire à l’ubuesque. Cette demi-décision n’est évidemment pas logique car la neige se transforme souvent en verglas rappelle-t-il avec humour. Pour le militant, ce premier recul de la collectivité n’est donc pas suffisant.

La bataille pour la réalisation de la mission publique de viabilité hivernale continue. FO demande que toutes les routes à la charge du département soient déneigées et traitées. Le syndicat conteste aussi le fait que le département, cherchant à réaliser des économies, a décidé de raccourcir de quinze jours la durée de la période hivernale.

Remise en cause des plans de viabilité hivernale

Celle-ci a débuté le 1er décembre contre le 15 novembre les années précédentes. Or explique Christophe Odermatt, cette mesure aberrante va s’avérer coûteuse. Le coup de froid qui a eu lieu pendant la deuxième moitié de novembre, donc hors plan hivernal, a entraîné la réalisation par les agents de davantage d’astreintes lesquelles sont alors majorées…

Au nom des économies à réaliser, la collectivité a par ailleurs cessé de faire appel à la vingtaine de vacataires qui venaient renforcer chaque année l’équipe des 180 agents dédiés au plan de viabilité hivernale.

Autre mesure contestée par FO, vingt circuits de patrouilles hivernales sur soixante ont été supprimés dans le département tandis que les quarante autres ont été allongés. FO s’interroge ainsi très sérieusement sur les capacités du département à pouvoir faire face à une situation de neige ou de verglas.

Les moyens accordés à un plan hivernal –en général plusieurs millions d’euros par département- ne posent pas de problèmes que dans le Haut-Rhin constate Christophe Odermatt. Le département du Doubs risque lui aussi d’appliquer un plan allégé. Déjà le département rappelle qu’il cherche à « maîtriser les coûts ».

Alors que le Territoire de Belfort garde intact son plan hivernal et s’inquiète de subir les conséquences des mesures du Haut-Rhin car les engins de ce département assuraient jusque-là la viabilité des axes frontaliers, dans les Vosges, 200km de routes pourraient ne plus être déneigées indique Christophe Odermatt. Dans la Creuse, les personnels FO du département contestaient eux cet automne un plan réduisant de plusieurs semaines les périodes d’astreintes des agents.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante