Depardieu mis en planches par Sapin

Bande dessinée par Michel Pourcelot

Le petit BD-reporter Mathieu Sapin frappe à nouveau. Face à lui, un monstre sacré : Depardieu. Avec Gérard, cinq années dans les pattes de Depardieu, le neuvième art rencontre le septième art. Et ça provoque des bulles.

Depardieu lui-même l’a baptisé Tintin. Ils se sont liés dans un pays de l’or noir, l’Azerbaïdjan. Mathieu Sapin en a fait une BD-reportage. A l’heure où les personnages cultes du neuvième art sautent allègrement au grand écran (Spirou, Valérian et même Bécassine), voici un monstre sacré du septième art qui fait le chemin inverse et qui se retrouve à buller dans des cases qui s’adaptent à la dimension rabelaisienne de son sujet. A la plume pour croquer l’« hénaurme » Gérard, Mathieu Sapin se fait tout petit, car c’est ainsi qu’il se représente aux côtés de l’acteur hyperbolique qui lui évoque le capitaine Haddock. On parle beaucoup d’Obélix à propos de Gérard Depardieu, vu son physique et comme il a joué ce rôle, mais il me fait plutôt penser au capitaine Haddock. Comme lui, il est bourru, souvent de mauvaise humeur et il a un problème avec l’alcool. Et comme le personnage d’Hergé, il est très attachant, raconte le dessinateur qui se remémore : Dans la voiture, on parlait beaucoup. [...] Il disait des choses profondes qui m’ont marqué aujourd’hui, comme à propos de la mort. Mais Depardieu n’est pas encore prêt à se mettre en quatre planches.

La plume et le panache

Du coup, plus que les aventures de Sapin reporter, ce sont les aventures du capitaine Depardieu qui sont contées. Cinq années de mouvement et d’action, du Caucase au Portugal en passant par Paris et Moscou : tournages, lectures, déjeuners d’affaires... Tous deux avaient fait plus ample connaissance, et Dieu sait si l’acteur est ample, à l’occasion du tournage, en 2012, d’un documentaire en Azerbaïdjan, à l’imitation du voyage dans ce pays, en 1859, d’Alexandre Dumas pour un livre illustré par un peintre qui l’accompagnait, Jean-Pierre Moynet. La plume et le pinceau. Sapin reprend la fonction de Moynet. Mais là on est plus dans le crayon et plume à chapeau style Cyrano. Comme à son habitude, l’auteur-dessinateur, qui n’en est pas à son premier essai dans la BD-reportage (Journal d’un Journal, éditions Delcourt, 2011, Campagne présidentielle, 2012, et Le Château - Une année dans les coulisses de l’Élysée, 2015, chez Dargaud), rend compte avec minutie, fort des nombreuses notes qu’il prend consciencieusement. Et il sert bien le panache.

 

Gérard, cinq années dans les pattes de Depardieu, de Mathieu Sapin, publié aux éditions Dargaud, le 17 mars 2017. 160 pages. Prix : 19,99 euros.

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Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante