En 2015, la lutte contre la fraude fiscale et sociale a battu tous les records

Economie par David Rousset

L’augmentation des résultats est en grande partie due au croisement des fichiers informatiques.
InFOgraphie : F. Blanc / FO Hebdo
Article publié dans l’action Dossier fiscalité

En 2015, les services de l’État ont procédé à plus de 21 milliards d’euros de redressements fiscaux, soit une augmentation de plus de 10 % en un an. Quant à la fraude sociale détectée par les organismes de Sécurité sociale, elle atteint plus d’un milliard d’euros, soit une hausse de 17,35 %.

Dire que le ministre de l’Économie, Michel Sapin, le secrétaire d’État chargé du Budget, Christian Eckert, et la ministre du Travail, Myriam El Khomri, n’ont pas boudé leur plaisir lors de la réunion du Comité national de lutte contre la fraude, relève de l’euphémisme. Les résultats annoncés sont, il est vrai, historiques.

Au-delà des chiffres bruts, l’analyse des principaux mécanismes de fraude donne une idée assez précise de leurs auteurs. Contrairement à un discours un peu trop colporté, la fraude est très majoritairement l’apanage des entreprises plus que des particuliers. En matière fiscale, qu’il s’agisse de la fraude à la TVA, de l’utilisation de logiciels de caisse qui permettent aux commerçants de diminuer frauduleusement leur recette ou de complexes mécanismes impliquant des filiales à l’étranger et chers aux grandes entreprises, l’imagination semble sans limite. Ainsi, les cinq plus gros dossiers traités par Bercy en 2015 représentent 3,3 milliards d’euros et concernent des multinationales dont Michel Sapin n’a pas révélé l’identité, se contentant de préciser qu’elles avaient « des noms en anglais »…

Les cinq plus gros fraudeurs sont des multinationales anglo-saxonnes

Idem pour ce qui est de la fraude sociale prise sous ses deux versants : la fraude aux cotisations et celle aux prestations. La lutte contre la fraude aux cotisations sociales et contre le travail illégal a progressé de 16 % et culmine à 497 millions d’euros. Les inspecteurs du travail méritent une mention particulière pour les efforts menés contre la fraude aux travailleurs détachés : leurs interventions ont quadruplé en un an et se sont traduites par plus de 3 millions d’amendes dont un tiers adressé aux donneurs d’ordres.

Enfin, la fraude aux prestations sociales est principalement l’œuvre de professionnels de santé envers l’Assurance maladie. Logiquement, il n’y a que la branche famille de la Sécurité sociale pour laquelle la fraude est avant tout l’œuvre de particuliers. Mais celle-ci est de plus en plus repérée car elle est peu sophistiquée et l’efficacité des contrôles a considérablement progressé.

Là est toute la question : l’augmentation des résultats est-elle le signe d’une hausse de la fraude ou d’une plus grande efficience des services de l’État et de la Sécurité sociale ? Le gouvernement ne semble pas avoir la réponse à cette question, mais reconnaît que la lutte contre la fraude fiscale a reposé sur moins de contrôles fiscaux qu’en 2014. On peut donc s’interroger sur ce qu’auraient été les résultats si les moyens humains et budgétaires de Bercy n’avaient pas drastiquement baissé depuis plusieurs années.


Définitions : Deux types de fraude

InFOgraphie :
F. Blanc

La fraude fiscale consiste, pour un particulier ou une entreprise, à se soustraire à la loi ou à utiliser des procédés illégaux pour échapper à tout ou partie de son impôt.
La fraude sociale se divise en deux catégories :
 La fraude aux cotisations consiste, pour un employeur, un auto-entrepreneur ou un travailleur libéral, à ne pas s’acquitter du versement des cotisations sociales dues.
 La fraude aux prestations consiste à percevoir une prestation indue, sur le fondement de déclarations mensongères ou d’omissions volontaires.