Finances publiques : l’austérité restera au menu des collectivités territoriales

Service Public par Valérie Forgeront

La baisse du déficit public en 2015 n’implique pas de desserrer l’étau de l’austérité à l’avenir avertit le gouvernement. Le plan de baisse des dotations de l’État aux collectivités territoriales sera ainsi maintenu en 2017… Au risque de constater une nouvelle fois un recul des investissements publics initiés par les entités locales.

Le déficit public (État, collectivités, sécurité sociale) a été ramené à 3,5% du PIB (produit intérieur brut) en 2015 se félicite le gouvernement commentant les derniers chiffres de l’Insee.

Après un déficit à 4% en 2014, le gouvernement tablait sur un déficit à 3,8% en 2015. Pour le ministre des Finances, Michel Sapin, cette annonce d’un recul plus important que prévu du déficit traduit le « sérieux budgétaire ».


Les dotations globales de fonctionnement de l’État aux collectivités font les frais de la politique de réduction à marche forcée du déficit public. (InFOgraphie : F. Blanc)

C’est ce sérieux « qui nous a permis d’atteindre ces bons résultats » explique ainsi le ministre estimant que les « efforts portent leurs premiers fruits ».

Ancien ministre de l’Economie et actuellement commissaire européen, Pierre Moscovici a salué ce résultat comme un « signal positif ». Début mars, il invitait la France à « faire des efforts supplémentaires », concrètement de nouvelles réformes structurelles, afin de « ramener son déficit public sous le seuil de 3% du PIB en 2017 » ainsi que le prévoit les traités européens.

La France -régulièrement sommée par l’Europe d’intensifier ses efforts en matière de réformes et de réduction de ses dépenses- programme ainsi de réduire son déficit public à 3,3% du PIB en 2016 puis à 2,7% en 2017.

Un effort de près de quatre milliards par an

Reste que cette marche forcée vers un abaissement du déficit se fait dans la douleur au plan social et cela notamment à travers le gel de prestations (pensions, allocations…) ou encore des rémunérations des agents publics.

En effet, si le recul du déficit à 3.5% a été atteint grâce à une légère embellie de la croissance (1,2% contre les 1% prévus en 2015) due notamment à la baisse prononcée des prix du pétrole, il l’a été aussi et surtout grâce à une réduction drastique des dépenses publiques. Entre 2014 et 2015, celles-ci ont ainsi été abaissées de 0,5 point à 56,8% du PIB.

Or, cette austérité appliquée aux dépenses se poursuit à travers le plan d’économies de 50 milliards à réaliser sur la période 2015-2017 dans le cadre du Pacte de responsabilité en échange des cadeaux au patronat (CICE et allègements de cotisations sociales). L’État participe à cet « effort » pour 18 milliards, les collectivités locales pour onze milliards, l’assurance maladie et la protection sociale pour 21 milliards.

Les collectivités territoriales dont les comptes sont déjà fragilisés -particulièrement ceux des départements par l’explosion des dépenses sociales (RSA, APA…) insuffisamment compensées par l’État- participent à cet effort global d’économies à hauteur de 3,7 milliards par an, cela à travers une baisse des dotations de l’État.

Les investissements en recul de 4,6 Mds

Or, ces collectivités qui sont à l’origine de 75% de l’investissement public ont dû ainsi réduire leurs dépenses et notamment celles touchant à l’investissement.

Celles-ci ont en effet reculé de 10% (-4,6 milliards) en 2015 souligne l’Insee indiquant que si les comptes des collectivités ne sont plus dans le rouge cela est dû « particulièrement » à cette baisse des investissements.

Le gouvernement estime lui que tout va bien et que les collectivités ont « mis de l’argent de côté pour pouvoir financer leurs investissements ». Rien n’est moins sûr.

A partir de 2011 les collectivités ont subi un gel de leurs dotations et dès 2014 une baisse de ces dotations. « La ponction de 12,5 milliards entre 2014 et 2017 équivaut à près de la moitié (43%) de l’épargne brute totale des collectivités » indiquait ainsi le Sénat fin 2014. Le gouvernement choisit néanmoins de maintenir cette baisse des dotations.

Nouveaux risques pour l’investissement

Le 25 mars dernier, le ministre des Finances, M. Sapin et le secrétaire d’État au Budget, M. Eckert assuraient que « les voyants sont au vert » pour les collectivités qui pourraient donc supporter une nouvelle baisse de dotation pour 2017.

Pour Philippe Laurent, le président de la commission des finances de l’association des maires de France, les investissements menés par les collectivités pourraient connaître un « effondrement encore plus massif » en 2016 que l’an passé.

« Depuis plusieurs années, le gouvernement a décidé de sanctionner les collectivités territoriales pour un déficit public dont elles ne sont pas responsables en diminuant drastiquement leurs dotations » s’insurgent de leur côté les Territoriaux FO.

Ils rappellent toutefois que cette austérité initiée par l’État n’est pas une raison pour admettre que « des élus locaux s’appuient sur la baisse des dotations pour mener une politique de destruction des acquis des agents, de non-remplacements de départs en retraite, de licenciements des non-titulaires, d’augmentation du temps de travail… »

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

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