J’ai rétréci le Code du travail

Revue de presse par Michel Pourcelot

Le chef du gouvernement a indiqué partager « l’orientation » du rapport Combrexelle sur « La négociation collective, le travail et l’emploi » lors de sa remise le 9 septembre. 48 heures avant le chef de l’État avait présenté ce document comme la « base » de la réforme du droit du travail, objet d’un projet de loi « discuté et voté par le Parlement avant l’été » prochain. La presse n’a pas attendu pour en débattre. Aperçus.

L’Express
Cacher sa joie semble être le mot d’ordre au Medef. Pas facile car l’organisation patronale a « de quoi se réjouir de l’évidente réforme du droit du travail qui se dessine, avec, comme piste privilégiée, le fait de donner plus de place aux accords collectifs. Mais l’organisation patronale se garde bien ces jours-ci de trop intervenir dans le débat : sans être totalement muette, elle reste assez en retrait sur les réseaux sociaux, et n’a fait paraitre aucun communiqué sur le sujet ». La messe aurait déjà était dite ?

Libération
Avec des ouailles dument chapitrés. « En trois mois, deux rapports et un livre auront imposé la réforme du code du travail comme seul horizon du débat ». Un terrain bien préparé : « Ces deux rapports vont baliser le débat. "Cela va servir à donner une apparence moins méchante au rapport Combrexelle et présenter le gouvernement comme pas si libéral", décrypte Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO. "C’est vrai. Tout cela nous va bien, cela nous permet d’avoir une position centrale, un peu plus modérée", reconnaît un proche de Hollande ». De plus, « comme l’a répété lundi le Président, il ne s’agit plus d’arracher des pages au code du travail, mais juste de donner plus de place à la négociation sociale ». Ou de poids à l’une des parties ?

Capital
Comment : il suffit « tout simplement que l’accord d’entreprise prime sur l’accord de branche, le code du Travail ou même le contrat de travail. Une révolution ». Ou une contre-révolution ? Celles des pots de fer contre les pots de terre.

La Voix du Nord
Un « abandon de la République sociale » pour le « leader de FO, qui avait déjà comme la CGT exprimé ses craintes d’une "dérégulation" du droit social ».

La Marseillaise
Bref, « ceux qui représentent la grosse majorité des salariés aux dernières élections professionnelles, à commencer par la CGT et FO, ne veulent pas entendre parler de l’accord d’entreprise pas plus que d’une coupe en règle du Code du travail. Pour Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, « Selon l’entreprise - avec une présence syndicale ou pas, une implantation différente, la taille de l’entreprise-, vous pourrez avoir des droits différents pour les salariés. Le salarié citoyen ne sera plus égal devant la loi, il n’aura pas la même loi, pas le même code du travail selon l’entreprise ». Une balkanisation de plus.

Les Echos
De plus, la simplification si vantée entraînera la complexification car, selon Pascal Lokiec, professeur à l’université de Paris-Nanterre, « le contrôle du respect des règles va devenir quasi impossible avec un droit à la carte qui, de ce fait, ouvrira grand la porte au dumping social ! Il faut ajouter une donnée pour comprendre ce qui se trame. Le Code du travail n’est pas ce carcan que l’on décrit ici et là. La plupart de ses dispositions peuvent d’ores et déjà être aménagées par accord collectif, y compris d’entreprise. Mais ce jeu n’est possible, en principe, qu’en faveur des salariés. Si le but est de rendre le Code plus intelligible, pourquoi ne pas réduire le nombre de dérogations au principe de faveur, qui sont une formidable source de complexité ? C’est l’inverse qui est proposé : ce qui, actuellement, ne peut être fait qu’en faveur des salariés pourra l’être, de façon quasi générale, en leur défaveur ! ». L’inversion des normes, c’est donc la nouvelle règle. Une règle d’airain.

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante