La liberté de la presse n’a jamais été aussi menacée selon RSF

International par Clarisse Josselin

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Reporters sans frontières a dévoilé le 26 avril son classement mondial de la liberté de la presse. En un an, la situation s’est aggravée dans près des deux tiers des pays, notamment des démocraties. En France, l’indépendance des journalistes reste fragile, selon l’organisation.

« La banalisation des attaques contre les médias et le triomphe d’hommes forts font basculer le monde dans l’ère de la post-vérité, de la propagande et de la répression, notamment dans les démocraties », s’inquiète Reporters sans frontières (RSF). L’organisation indépendante a présenté son classement mondial de la liberté de la presse le 26 avril, lors d’une conférence de presse au siège de l’AFP, à Paris.

Cela fait quinze ans que RSF publie chaque année cette liste répertoriant 180 pays. Les scores sont calculés à partir d’un questionnaire et d’un relevé des violences commises contre les journalistes. Et selon elle, « jamais la liberté de la presse n’a été aussi menacée » qu’en 2016.

Obsession de la surveillance

En première position arrive la Norvège, « qui est également le pays où les gens sont les plus heureux », a souligné le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire. La dernière place revient à la Corée du Nord. La Syrie, à la 177è place, reste le pays le plus meurtrier au monde pour les journalistes. Une vingtaine de pays figurent dans la liste noire où la situation est très grave.

Aucun continent n’est épargné par cette dégradation. Selon RSF, l’arrivée au pouvoir de Donald Trump aux États-Unis ou la campagne du Brexit au Royaume-Uni ont offert une caisse de résonance aux discours anti-médias fortement toxiques, favorisant la désinformation et les fausses nouvelles. Ces deux pays ont chacun reculé de deux places.

RSF déplore aussi « l’obsession de la surveillance » et « le non-respect du secret des sources » dans des pays considérés hier comme vertueux, à l’instar du Royaume-Uni ou la Nouvelle-Zélande. Elle pointe également les attaques contre les médias en Turquie, en Hongrie, en Pologne ou en Russie.

En France, une campagne présidentielle d’une rare violence

La France, qui remonte de la 45è à la 39è place, est l’un des rares pays d’Europe à progresser. Elle avait brutalement chuté l’an dernier avec l’attentat perpétré en 2015 contre Charlie Hebdo. Cependant, sans ternir compte de cette tragédie, elle enregistre son plus mauvais score depuis 2013. RSF estime qu’en France, « les journalistes doivent se mobiliser pour défendre leur indépendance dans un climat de plus en plus violent et délétère ».

Christophe Deloire a dénoncé, lors de l’actuelle campagne pour l’élection présidentielle, une critique des médias « extrêmement simpliste et parfois outrancière », allant jusqu’à des menaces de mort prononcées à l’encontre de journalistes de Médiapart et du Canard enchaîné, « inadmissibles dans une démocratie ».

Concentration des médias et conflits d’intérêt

RSF s’inquiète par ailleurs d’« affaires liées à des financiers utilisant à des fins d’influence les médias qu’ils possèdent » et une « concentration de la plupart des grands médias [qui] n’a jamais été aussi avancée ».

Si l’organisation salue l’adoption en 2016 d’une loi sur l’indépendance des médias, elle déplore que le Conseil constitutionnel ait ensuite annulé des dispositions du texte protégeant les sources des journalistes. RSF appelle le législateur à proposer au plus vite un nouveau texte instaurant un cadre réellement protecteur de ces sources.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante