Le grand livre de la vie nous en régale souvent : ces petites phrases que l’on entend, qu’on lit, qu’on nous rapporte constituent des recueils d’expressions issues de la sagesse (?!) populaire. « Les brèves de comptoir » sont un bel exemple de ces perles, récoltées au fil des discussions sur le zinc, autour d’un ou plusieurs verres, sur tous les sujets, petits ou grands, publics ou intimes, intellectuels ou triviaux.
Jean-Marie Gourio est un habitué de cet humour décalé, qu’il cultive depuis toujours avec Charlie Hebdo, Hara-kiri, les Guignols, les Nuls… Il nous livre ici, sur 900 pages, 9 000 de ces OVNI (objets verbaux non idiolectes [1]), longue liste de lieux communs, de grandes certitudes assénées, de tentatives d’explication du monde, de confessions plus ou moins volontaires, dont l’humour est accentué par l’exposition hors contexte de ces phrases.
Cette litanie mêle ainsi le grandiose et le dérisoire, à l’image des populations qui se croisent dans ces lieux de débit. Et parfois se dégagent, dans ce brouhaha de mots, des vérités teintées de poésie ou pleines de tendresse et une certaine philosophie de la vie.
En voici quelques morceaux choisis, à la façon de Cyrano :
Méthodique : « Il ne faut pas oublier de se souvenir. »
Lucide : « Ce qui est grave avec la crise mondiale, c’est qu’elle est partout. »
Candide : « Le cinéma en plein air, je ne sais pas comment ils éteignent. »
Réaliste : « Ça sert à rien d’apprendre l’orthographe si plus personne voit les fautes. »
Poétique : « Tout le temps qu’on perd et personne ramasse. »
Comme quoi, « la liberté d’expression, c’est pas pour dire n’importe quoi ».