Les fonctionnaires préparent la mobilisation du 10 octobre

Grève et manifestations par Valérie Forgeront

Conférence de presse des neuf organisations syndicales de fonctionnaires le 6 octobre 2017. Photographie : F. Blanc (CC BY-NC 2.0)

Ce sera finalement le 16 octobre. Ce jour-là, les organisations syndicales de la fonction publique et le ministre de l’Action et des Comptes publics, M. Darmanin se rencontreront pour un rendez-vous salarial. Le ministère a en effet décidé de repousser à cette date la rencontre prévue initialement le 10 octobre… Cette date reste toutefois symbolique. Ce jour-là, l’ensemble des syndicats de la fonction publique, c’est-à-dire les neuf organisations dont l’UIAFP-FO (l’Union inter-fédérale des agents de la fonction publique/État, territoriale, hospitalière) appellent à une journée nationale de grève et de manifestations. C’est inédit depuis dix ans. C’est dire le niveau de mécontentement des agents.

Le changement de date (annoncé ce 4 octobre) du rendez-vous salarial avec le M. Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics en charge de la fonction publique a particulièrement choqué les syndicats, ces derniers se rendront toutefois à ce rendez-vous fixé au 16 octobre. D’ici là, le 10 octobre, les agents se feront entendre du gouvernement par la grève et dans la rue et cela à travers un appel unitaire des neuf organisations syndicales de la fonction publique dont l’UIAFP-FO (l’Union inter-fédérale des agents de la fonction publique/État, territoriale, hospitalière).

L’ensemble des syndicats qui ont tenu conférence ce 6 octobre pour faire le point sur cette prochaine action montrent leur détermination. Le cadre unitaire est très important. Nous sommes mobilisés ensemble pour un enjeu fondamental soulignent-ils dont les fonctionnaires FO.

Alors qu’une manifestation est prévue ce 10 octobre à Paris (de République à 14h à Nation via Bastille) et que de nombreux cortèges seront organisés en province, les syndicats qui rencontreront donc le ministre quelques jours après cette mobilisation nationale comptent évoquer avec lui le dossier du pouvoir d’achat dans la fonction publique. Et pour cause. Depuis le printemps les fonctionnaires (5,4 millions d’agents) font face à des annonces qui ont toutes un point commun… Elles sont négatives, notamment pour le pouvoir d’achat soulignent les fédérations syndicales.

Pouvoir d’achat : il ne cesse de se dégrader

Annonces de suppressions d’emplois (120 000 suppressions prévues en cinq ans dont 50 000 à l’État), annonce du rétablissement du jour de carence l’an prochain, gel du point d’indice (base de calcul de l’ensemble des salaires dans les trois versants de la fonction publique) en 2018 alors qu’après six ans de gel (2010-2016) le traitement des fonctionnaires n’avait connu qu’une hausse minime depuis 2016 et qui plus est en deux temps (+0,6% en juillet 2016 puis 0,6% en février 2017), annonce d’une compensation pour l’instant bancale à la hausse de la CSG au 1er janvier prochain doublée de l’absence de gain de pouvoir d’achat contrairement à la promesse faite antérieurement par le chef de l’État… Alors que le pouvoir d’achat des agents s’est fortement dégradé ces dernières années –la perte atteint 16,15% depuis 2000 estime FO– les syndicats attendent que le gouvernement mette des propositions salariales sur la table le 16 octobre.

Selon les statistiques de l’administration (DGAFP) le salaire moyen dans la fonction publique n’a augmenté en 2015 que de 0,6%. Par ailleurs 30% des agents ont subi une baisse de leur rémunération. Autre statistique illustrant la perte de pouvoir d’achat constatée depuis des années : dans les années 1980, un agent de catégorie A (les cadres) entrant dans la fonction publique percevait environ deux fois le montant du Smic. Actuellement il ne perçoit plus que 1,25 fois le montant du Smic.

L’UIAFP-FO a fait quelques calculs afin d’illustrer cette perte de pouvoir d’achat. Si la valeur du point d’indice avait suivi l’inflation (+28,2% depuis 2000) un agent de catégorie C, par exemple du 1er grade et au 11e échelon percevrait 277,74 euros de plus par mois en terme de salaire brut. Pour un agent de catégorie B du 1er grade et au 13e échelon, ce serait 380,67 euros de plus par mois. Pour un agent de catégorie A, attaché administratif au 11e échelon, cela induirait 506,29 euros de plus par mois.

Des réformes au seul service de la baisse des dépenses publiques ?

Au-delà de la revendication salariale, les agents s’inquiètent de la qualité du « dialogue social » dans la fonction publique. Depuis ce printemps, beaucoup de ces annonces négatives ont été faites par voie de presse, ce qui ajoute au mécontentement des fonctionnaires. Ils craignent par ailleurs la volonté du gouvernement d’introduire des réformes « structurelles » lesquelles attaqueraient directement les statuts des agents.

La possibilité évoquée –notamment par le chef de l’État– de différencier la valeur du point d’indice selon le versant (État, hospitalière ou territoriale) de la fonction publique inquiète beaucoup les organisations syndicales dont FO de même que le chantier du programme « action publique 2022 » récemment lancé par le gouvernement. Ce programme vise notamment à accompagner rapidement la baisse des dépenses publiques. Un « comité d’action publique/CAP 2022 » devrait soutenir cette action.

Quid d’un vrai débat sur le service public ?

Ce comité sera composé de personnalités qualifiées françaises ou étrangères, de chefs d’entreprises, de parlementaires, d’élus locaux et de hauts fonctionnaires s’insurge FO. Le ministère de l’Action et des Comptes publiques annonce la couleur… Les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés en matière de réduction de la dépense publique impliquent de revoir profondément et durablement les missions de l’ensemble des acteurs publics que sont l’État, les opérateurs, les collectivités territoriales, les organismes de sécurité sociale.

Les fonctionnaires FO rejettent ce « programme » et constatent à regret une fois de plus que le débat de fond sur les services publics n’aura pas lieu, le prisme budgétaire l’emportant à nouveau. L’UIAFP-FO qui attend que soit tiré un bilan honnête de précédentes réformes (RGPP, MAP, réforme territoriale…) a suspendu par ailleurs sa participation aux réunions du Forum de l’action publique et a pris l’initiative de faire reporter la réunion du Forum qui était prévue le 2 octobre dernier.

Christian Grolier, Secrétaire général de la Fédération générale des fonctionnaires FO.

 Voir en ligne  : Retrouvez les lieux des manifestations de la Journée nationale d’action de la Fonction publique

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante