Loi Travail : pour FO le recours au 49-3 est « dramatique »

Emploi et Salaires par Clarisse Josselin

Le gouvernement, réuni en conseil des ministres extraordinaire le 10 mai, a autorisé l’exécutif à recourir à l’article 49-3 pour faire adopter le projet de loi Travail aux forceps. FO dénonce un acte anti-démocratique et appelle à poursuivre la mobilisation.

Faute de majorité sur les bancs de l’Assemblée nationale et avant même que le débat ne débute sur les amendements déposés par les députés, un conseil des ministres extraordinaire a autorisé le 10 mai Manuel Valls à recourir à l’article 49-3 de la Constitution pour faire adopter en force le projet de loi Travail. Cette arme constitutionnelle, que Manuel Valls n’a jamais écartée, permet au gouvernement de faire adopter le texte sans vote.

Un député a dénoncé « une régression historique du droit du travail par la remise en cause de la protection des salariés » et « un anéantissement de notre modèle social. »

Le Premier ministre a engagé la responsabilité du gouvernement en milieu d’après-midi. Les Républicains et l’UDI ont déposé une motion de censure dans la foulée. En cas d’adoption d’une motion de censure par la majorité absolue des députés, le gouvernement devrait démissionner. Sinon, le texte sera considéré comme adopté.

Le secrétaire général de Force Ouvrière Jean-Claude Mailly, interrogé sur BFM-TV], a dénoncé un « passage en force » sur « un projet de loi régressif. » « Le 49-3 n’est pas illégal, mais on n’y a pas recours quand on est attaché à la démocratie », a-t-il ajouté. En fin de matinée, il avait estimé sur France Info qu’un recours au 49-3 serait « dramatique » et accusé le gouvernement d’être « autoritaire. » « Si c’était vraiment un texte de progrès social, il n’y aurait pas de problème de majorité » a-t-il ajouté.

Lignes rouges

La menace du 49-3, une arme déjà utilisée l’an dernier par le gouvernement pour imposer la loi Macron, a plané sur l’Assemblée nationale dès la reprise des débats le 9 mai. La ministre du Travail Myriam El Khomri avait rapidement suspendu le vote des amendements en recourant à la procédure de « réserve des votes ».

Dans la matinée du 10 mai, quinze députés de la majorité avaient été reçus à Matignon pour tenter de trouver un compromis sur l’article 2, le plus décrié, qui remet en cause le principe de faveur. Le rapporteur du projet de loi, Christophe Sirugue, avait proposé qu’un accord d’entreprise soit soumis à l’avis de la branche avant d’être signé. Mais le Premier ministre refusait dans tous les cas, semble-t-il, de revenir un tant soit peu sur l’inversion de la hiérarchie des normes. Il a d’ailleurs « assumé » dans son discours à l’Assemblée « une vraie opposition sur la philosophie même du texte. »

FO exige toujours le retrait du projet de loi Travail. La remise en cause du principe de faveur, la possibilité pour les syndicats minoritaires d’organiser un référendum et la facilitation des licenciements économiques constituent autant de « lignes rouges ».

FO a déposé un « référé-liberté » contre le gouvernement

Une nouvelle mobilisation nationale est organisée le 12 mai. Les organisations syndicales opposées au projet de loi Travail devaient se retrouver en début de soirée le 10 mai pour organiser la suite de la mobilisation. Les routiers, qui craignent une baisse de la rémunération des heures supplémentaires, ont déjà lancé un appel à la grève à compter du 16 mai.

Sur le terrain judiciaire, la confédération a déposé le 9 mai, auprès du tribunal administratif, un « référé-liberté » contre le gouvernement. Elle l’accuse de ne pas avoir respecté la procédure de concertation préalable avec les organisations syndicales et patronales représentatives et de ne pas leur avoir fourni de document d’orientation (article L1 du code du travail). Elle demande la suspension de l’examen du texte pour mettre en place cette concertation.

Sur la question du référendum, FO prend au mot le gouvernement, alors que sept Français sur dix se disent opposés au projet de loi Travail. « Le gouvernement veut imposer la procédure référendaire dans l’entreprise parce qu’il n’y aurait pas de majorité, a déploré Jean-Claude Mailly dans Le Parisien daté du 10 mai. Mais s’il n’y a pas de majorité sur la loi Travail, au lieu d’utiliser le 49-3, pourquoi le gouvernement n’arrête-t-il pas les travaux parlementaires pour organiser un référendum auprès des Français ? »

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

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