Maladies professionnelles et accidents du travail : la situation pourrait empirer

Alerte par Evelyne Salamero

La sécurité au travail est menacée par une harmonisation à la baisse des normes existantes. © Stephane LEITENBERGER / REA
Article publié dans l’action Dossier Traités de libre-échange commerciaux

Des projets internationaux menacent les législations nationales sur la santé et la sécurité au travail : une nouvelle norme Iso, le traité commercial transatlantique (TTIP)…

Plus de 2,3 millions de salariés meurent chaque année dans le monde d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, selon l’OIT (Organisation internationale du travail). Et la majorité des 317 millions d’accidents et maladies qui ne sont pas mortels entraînent des incapacités prolongées.

Cette situation pourrait considérablement empirer, les législations nationales les plus abouties et les conventions de l’OIT (Organisation internationale du travail) en matière de santé et de sécurité au travail étant aujourd’hui menacées par des projets internationaux d’envergure.

L’Organisation internationale de normalisation (Iso) cherche ainsi à finaliser pour 2016, sur proposition du membre britannique, une norme sur « les systèmes de management de la santé et de la sécurité au travail » (norme 45001), dont la philosophie première est que les travailleurs devraient être individuellement co-responsables des problèmes de santé et de sécurité de l’entreprise, au même titre que leur employeur.

… Et le programme Refit de Bruxelles

En revanche, leur représentation collective n’est envisagée que de manière subsidiaire ou optionnelle, à la discrétion de l’employeur. Pour la France, les représentants des travailleurs et des employeurs de la Commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la Sécurité sociale (CATMP) ont dénoncé la motivation commerciale et non sociale de l’initiative et se sont prononcés contre à l’unanimité, dès l’ouverture des discussions en 2013. À ce jour, le projet est toujours en cours de négociation face à l’opposition de nombreux autres pays (Allemagne, États-Unis, Canada, Australie, Inde, Japon, Argentine…) et à celle de l’OIT, qui appelle l’Iso à respecter son engagement de privilégier les conventions internationales du travail en cas de conflit avec son projet de norme.

Autre menace : le projet de partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TIPP), en cours de négociation entre les États-Unis et l’Union européenne, dont l’un des objectifs est d’harmoniser – à la baisse – les normes et les réglementations existantes.

Enfin, les effets du programme Refit de Bruxelles (Regulatory Fitness and Performance), destiné à réduire les contraintes administratives et donc les obligations des entreprises, ne sont pas à négliger. Les 24 directives européennes sur la santé et la sécurité au travail ont en effet été désignées par les PME européennes comme un des dix actes les plus contraignants et donc les plus nuisibles à leur compétitivité. 

Éclairage : La normalisation, comment et qui ?
• Sur quatre-vingt-trois experts de l’Iso qui travaillent sur le projet de norme 45001, quatre proviennent d’organisations de travailleurs.
• L’Iso se définit comme « le premier producteur mondial de normes internationales d’application volontaire ».
• Les organismes nationaux de normalisation de 166 pays constituent l’Iso.
• L’Association française de normalisation (Afnor) regroupe 3 000 entreprises. L’État lui confie des missions d’intérêt général, mais elle a aussi des activités commerciales (formation, conseil, évaluation…).

Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante