Sans contrôle, l’usage du CICE est laissé au libre-arbitre des employeurs

Événement par Mathieu Lapprand

© Michel GAILLARD / REA
Article publié dans l’action Dossier fiscalité

Lors du lancement du dispositif, le ministre des Finances avait déclaré : « Je m’engage à ce que le CICE soit exclu du champ du contrôle fiscal. » L’État se privait donc de l’un de ses principaux moyens de contrôle. Aujourd’hui, le crédit d’impôt doit légalement faire l’objet d’une information et d’une consultation des IRP (instances représentatives du personnel), comme le stipule la loi du 14 juin 2013. Ainsi, c’est avant le 1er juillet de chaque année que le comité d’entreprise, ou à défaut les délégués du personnel, doit être informé de l’usage du CICE. Or le secteur Économie de FO indique que « selon les remontées du Comité de suivi du CICE et selon nos remontées des syndicats FO, une majorité d’entreprises n’a pas respecté cette obligation ».

La loi prévoyait également la mise en place de comités de suivi régionaux, à l’image du comité de suivi national. Or la mission d’information parlementaire constate, deux ans après le vote du texte, que ceux-ci « doivent toujours être mis en place ». Le même rapport indique que « si le comité d’entreprise n’a pu obtenir d’explications suffisantes de l’employeur ou si celles-ci confirment l’utilisation non conforme de ce crédit d’impôt, il établit un rapport qui est transmis à l’employeur et au comité de suivi régional, qui adresse une synthèse annuelle au Comité national de suivi ».

Des comités de suivi régionaux « fantômes »

Ces comités de suivi régionaux n’étant pas déployés, les employeurs peuvent donc aujourd’hui user à leur guise de ce crédit d’impôt.

Alors que le gouvernement vantait l’amélioration du dialogue social inhérente à son pacte de responsabilité, les procédures prévues d’information et de consultation des instances du personnel ne peuvent ni constituer l’unique modalité d’alerte quant aux mésusages du CICE, ni se substituer aux contrôles réalisés par les services de l’État. C’est pourquoi FO dénonce la confiance aveugle consistant à miser sur la seule bonne foi des employeurs pour respecter l’esprit du dispositif : « En l’état, le CICE consiste à arroser du sable en implorant le patronat d’une récolte abondante. »

Mathieu Lapprand Journaliste à L’inFO militante