Volkswagen : des salariés d’une plateforme téléphonique vendus à la découpe

Sous-traitance par Nadia Djabali

Un sous-traitant de Volkswagen (B2s) cède ses salariés à trois prestataires. © Romain BEURRIER/REA

Les 140 salariés d’un sous-traitant de Volkswagen ont été repris par trois prestataires. Ils continueront de faire le même travail, au même endroit : dans les locaux de Villers-Cotterêts du constructeur allemand.

Les plus anciens ont d’abord signé chez Volkswagen-France, puis sont passés chez Gedas alors filiale du constructeur, puis chez T-Systems, puis chez B2s. Et tout ça en faisant du sur place puisque les cent quarante salariés ont toujours travaillé à Villers-Cotterêts dans les locaux historiques de Volkswagen-France.

Leur job : répondre quand un particulier ou un professionnel client du constructeur automobile téléphone pour récupérer des pièces de voiture ou pour une homologation de véhicules de la marque venant de l’étranger. On appelle cela de la sous-traitance sur site. Employés depuis 5 ans chez B2s, la valse des employeurs a connu ces derniers temps un regain de vitalité : depuis le 3 avril 2017, tous les salariés ont été dispatchés vers trois entreprises différentes, Webhelp, Euro CRM et Dekra.

Un appel d’offre tous les cinq ans

Ces trois prestataires ont remporté l’appel d’offre lancé par le constructeur allemand dont la politique est de renouveler ses fournisseurs tous les cinq ans. Pourquoi trois entités ? Pour faire baisser les coûts, répond d’emblée Thomas Vial-Guillon, délégué syndical central chez B2s. Un téléconseiller coûte deux fois moins cher chez un prestataire.

Du coup certains salariés ont connu plusieurs conventions collectives. À l’origine ils dépendaient de celle de la métallurgie, puis ils sont passés à celle de Syntec pour arriver à celle des prestataires de service. Et certains pourraient bien repasser chez Syntec.

Le CE informé le 17 mars

Un va-et-vient qui provoque le tournis et surtout des inquiétudes sur les salaires et le peu d’avantages sociaux acquis au cours des années. Aujourd’hui, les salariés voudraient bien arrêter ce plan quinquennal de changement d’employeur qui les force à se réadapter sans cesse aux nouvelles équipes encadrantes.

D’autant que le transfert vers les trois prestataires ne s’est pas effectué sans accrocs. le CE a été officiellement informé du changement d’employeur que le 17 mars dernier ; et ni cette instance ni le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail n’ont eu le temps de finir leurs consultations.

Nous ne sommes ni des pigeons ni des jambons, ont scandé les salariés au cours de deux débrayages qui ont émaillés la fin du mois de mars.

Des représentants du personnel mis sur la touche

Quant aux salariés protégés (délégués syndicaux et représentants du personnel), ils attendent une décision de l’inspection du travail avant d’être transférés dans une des trois boîtes. Pour le moment ils émargent toujours chez B2s mais ont été mis à disposition. Traduction : ils restent chez eux. L’inspection du travail n’a pas donné de délai et obtenir un avis rapidement risque d’être compliqué, s’inquiète Thomas Vial-Guillon. Or, il faut absolument organiser très rapidement des élections sur les sites pour que les droits des salariés ne soient pas bafoués.

Des salariés en pleurs

Lorsque Webhelp est arrivé à Villers-Cotterêts, bureaux, systèmes informatiques et téléphoniques ont été remplacés durant le week-end. Le lundi on a retrouvé des salariés en pleurs, se souvient le délégué syndical. Ce qu’il n’accepte pas : la façon dont l’affaire a été gérée par Volkswagen, B2s et les trois repreneurs. Nous avons été vendus à la découpe, s’indigne-t-il. Et face à la rapidité avec laquelle s’est déroulé le transfert des contrats, certains salariés n’excluent pas de porter l’affaire devant la justice.

Nadia Djabali Journaliste à L’inFO militante