110 ans de séparation des Églises et de l’État

Histoire par Clarisse Josselin

Manifestation devant Notre-Dame-des-Champs à Paris, en 1904, en faveur de la séparation de l’Église et de l’État.

La loi instituant la séparation des Églises et de l’État a été adoptée le 9 décembre 1905 après une difficile conquête. Un acte fondateur de la laïcité, à laquelle FO est fondamentalement attachée.

Le combat menant à la séparation des Églises et de l’État dura plus d’un siècle et divisa profondément la société française. Il est plus que jamais d’actualité après les attentats de janvier et du 13 novembre à Paris et face au développement du communautarisme.

Une première séparation éphémère est instaurée par la Convention nationale de 1794, mais elle prend fin avec le concordat de 1801 signé entre Bonaparte et l’Église catholique.

Les cultes reconnus (catholique, réformé, luthérien et israélite) sont organisés et financés par l’État. Il prend en charge le traitement des ministres du culte, participe à leur désignation et à la détermination des circonscriptions religieuses. Les autres cultes ne sont pas reconnus.

Les tensions grossissent entre l’Église catholique et les républicains inspirés par la philosophie des Lumières. Avec la loi de Jules Ferry, l’école publique devient laïque en 1882. L’éducation religieuse est abandonnée au profit de la morale laïque et des valeurs républicaines.

En 1904, le combat du président du Conseil Émile Combes contre les congrégations religieuses pousse le pape à rompre les relations diplomatiques entre le Vatican et la France.

Émile Combes accepte alors l’idée d’une séparation des Églises et de l’État, portée par Jean Jaurès et Ferdinand Buisson, président de la Libre Pensée et de la Ligue de l’enseignement. Ce dernier préside la commission parlementaire qui jette les bases d’une future loi, dont le rapporteur sera Aristide Briand.

Caricature de C. Léandre, publiée en une du journal humoristique Le Rire le 20 mai 1905.

La religion devient une affaire privée

Les oppositions sont vives mais Aristide Briand prône une loi de pacification et parvient à réunir une droite catholique craignant la persécution religieuse et une gauche radicale. Jean Jaurès, s’il n’est pas en première ligne, est un appui décisif. Il juge cette loi « juste et sage ».

Avec la promulgation de la loi de 1905, la France devient un État laïc. « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte », selon l’article 2. La loi met fin à l’opposition entre des cultes reconnus et non reconnus. Elle affirme l’indépendance réciproque des Églises et de l’État. Elle supprime tout financement des Églises par l’État. La gestion des lieux de culte est désormais assurée par des associations cultuelles qui relèvent de la loi de 1901, soumises au droit privé et à autorisation des préfets.

L’article 1er précise que « la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes ». La religion n’est pas interdite, mais elle est désormais une affaire privée.

La loi de séparation est devenue un texte fondateur de la République, installant la laïcité qui deviendra un principe constitutionnel en 1946. 


Focus : La tradition laïque du Mexique
Malgré une population très catholique, le Mexique a adopté dès 1859 les Lois de Réforme, qui établissent la séparation de l’Église et de l’État, la nationalisation des biens ecclésiastiques, la liberté de culte...
Ces principes deviennent constitutionnels en 1917.
Si la laïcité reste aujourd’hui un principe fondamental, l’Église catholique prend davantage d’importance. En 1992 elle a retrouvé une personnalité juridique et les relations diplomatiques avec le Vatican ont été rétablies cette même année.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante