La France a été le premier État moderne à inscrire la séparation de l’église et de l’État dans le marbre de sa constitution. La laïcité à la française reste encore de nos jours un exemple quasi unique dans le monde. Cette loi, voulue par le petit père Combes
et votée à l’initiative d’Aristide Briand, prend ses racines dans les tréfonds de l’histoire de France : les guerres de religion, les lumières contre l’obscurantisme, la Révolution française de 1789, l’affaire Dreyfus, la montée des idées républicaines et sociales.
De la Saint-Barthélémy (1572) à la révocation de l’édit de Nantes (1685), la France s’est déchirée et massacrée pendant plus d’un siècle. La Révolution française a mis fin aux privilèges de la noblesse, mais aussi d’un clergé qui s’opposait à l’émancipation du peuple en particulier dans le domaine de l’éducation. La première séparation date du 18 septembre 1794 quand le budget de l’Église constitutionnelle est supprimé. Mais en 1802, Napoléon signe le concordat avec le pape et rétablit le catholicisme comme religion d’État.
L’Église de France, en particulier sa hiérarchie, prend ouvertement fait et cause pour les régimes antirépublicains (royauté, empire) puis contre toutes les nouvelles idées socialistes. La bourgeoisie qui a eu très peur des révolutions de 1848, en particulier celle de juin et dès 1850 impose la loi Falloux qui proclame la liberté d’enseignement au profit de l’église. Mais à la fin du XIXe siècle, les Républicains, Radicaux et Radicaux-socialistes accèdent au pouvoir. L’affaire Dreyfus (1894-1906) va rouvrir les cicatrices entre les milieux réactionnaires-catholiques et les adeptes des avancées de la Révolution française, désormais largement influencés par le socialisme.
C’est Émile Combes qui sera un des symboles de la bataille pour la laïcité. Né dans une famille modeste du Tarn, médecin installé en Charente, radical-socialiste, Franc-maçon, il est le président du groupe de la Gauche Démocratique
au Sénat et ministre de l’instruction publique et des cultes en 1895. En tant que Président du conseil (Premier ministre) de juin 1902 à janvier 1905, il va lancer une vaste campagne anticléricale : fermeture de 3 000 écoles congrégationnistes en juillet 1902, rupture des relations diplomatiques avec le Vatican en mai 1904 et interdiction totale d’enseigner aux congrégations en juillet 1904.
De la laïcité
Les fondements théoriques de la loi de 1905 viennent essentiellement des planches et du travail en loges des Frères du Grand Orient de France, obédience majoritaire en France, largement athée ou agnostique, très influente chez les radicaux et radicaux-socialistes de la IIIe République.
Mais cette loi promulguée le 9 décembre 1905 [1] n’est pas une loi d’exclusion et de mise au ban des catholiques. Sa première phrase est : « La République assure la liberté de conscience ». C’est aussi cette introduction qui lui vaudra le soutien total des protestants et des juifs. Par ailleurs, la République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte
. La loi de séparation contient donc des dispositions libérales : respect de la liberté de conscience, du libre exercice des cultes et de l’organisation interne des religions. Désormais être adepte d’une religion ou être athée relève d’un choix individuel. Il ne doit pas non plus être demandé de service public aux différents cultes et les services publics de l’État ne doivent porter aucune marque de caractère religieux. Le Vatican menace d’excommunier les députés et sénateurs qui ont voté la séparation. La plupart s’en moque ! Ce n’est qu’en 1923 que la hiérarchie catholique française va accepter la laïcité ou du moins devoir faire avec.
En 1946, la constitution de la IVe République qualifie la France de « République laïque » et indique que l’organisation de l’enseignement public, gratuit et laïque à tous les degrés, est un devoir de l’État
.
La loi de 1905 a mis fin à des siècles de tensions. C’est un texte de pacification. Elle n’est pas un instrument de division, mais un texte qui vise à garantir l’égalité de tous devant la loi. Elle protège la liberté de conscience, celle de croire ou de ne pas croire. Le syndicalisme libre et indépendant ne peut s’épanouir que dans un cadre laïque, car lorsque l’État et les Églises se mêlent de la vie sociale ou du travail, ce sont toujours les travailleurs qui en paient le prix
.
Pour FO, la mission est claire : défendre sans relâche la loi de 1905, défendre la liberté de conscience, défendre la neutralité de l’État, défendre l’égalité de toutes et tous. C’est affirmer que la République sociale à laquelle nous croyons, celle des droits, de l’égalité, de l’émancipation, repose sur ce principe intangible : la laïcité.
Pour Force Ouvrière, la laïcité est – et doit rester – l’outil républicain permettant de tenir ensemble une société diverse, plurielle, riche de ses différences mais unie par un cadre commun.
