Fonction publique : le gouvernement préfère la prime plutôt que le salaire

Emploi et Salaires par Valérie Forgeront

Salaires bloqués, prime non garantie, effectifs en berne, atteinte au salaire différé... les fonctionnaires doivent combattre sur tous les fronts.

Les fonctionnaires souhaiteraient être un peu surpris par les initiatives gouvernementales. Ce n’est toujours pas le cas. En effet, l’État ne répond pas à la demande de hausse générale des salaires indiciaires. Les 5,2 millions d’agents ont cependant perdu 10% de pouvoir d’achat en dix ans. Gelé depuis 2010, le point d’indice (base de calcul des salaires des agents) le restera jusqu’en 2017, a indiqué le Premier ministre en détaillant la répartition des coupes à opérer pour assurer le plan d’économies de 50 milliards d’ici à 2017. Par le gel de leurs salaires, les fonctionnaires prendront donc leur part, même s’ils ont déjà largement souffert, notamment à travers la perte des effectifs. Après le constat des 150 000 postes supprimés dans la fonction publique entre 2007 et 2012, la Cour des comptes vient de compléter le tableau pour 2013. Les créations d’emplois ont été moins nombreuses que prévu dans les ministères prioritaires (éducation, justice, police) et les suppressions de postes ont été plus fortes dans le reste de la fonction publique d’État, 7 172 suppressions effectives contre les 2 200 programmées. Contestant notamment la perte chronique d’effectifs depuis près de dix ans et le mépris salarial qui perdure plus que jamais envers les fonctionnaires, les agents publics, à l’appel de FO notamment, ont organisé une journée d’actions le 15 mai dernier.

APRÈS LA PFR, L’IFSE…

Le gouvernement a-t-il compris le message ? Pas vraiment. Il annonce l’arrivée en 2015 d’une mesure (calquée sur celle prévue pour le privé) consistant à alléger les cotisations sociales des fonctionnaires percevant entre un et 1,3 Smic. Cela à travers une réduction de la retenue pour cotisation retraite. La mesure devrait concerner 2,2 millions d’agents (État, territoriale et hospitalière), soit 100% des agents de catégorie C (la plus basse), 70% des agents de catégorie B et 20% des agents de catégorie A. Pour les fonctionnaires FO (UIAFP FO), « cette mesure n’est pas une bonne réponse aux revendications salariales ». Par ailleurs, relève FO, en tenant compte de l’enveloppe budgétaire consacrée aux récentes mesures indiciaires pour les agents de catégorie C et de celle dédiée à cet allégement, « la valeur du point d’indice pouvait être augmentée d’au moins 0,5% ». Le gouvernement a préféré ignorer cette possibilité. De la même manière, il reste sourd à la demande d’intégration des primes dans le salaire. En revanche, par un décret du 22 mai dernier, les agents se voient affublés d’une nouvelle prime, l’IFSE, en remplacement de la PFR (la prime de fonctions et de résultats) créée en 2009. La proposition d’IFSE, « l’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise », avait cependant été rejetée cet hiver par sept syndicats, dont FO. L’IFSE, qui sera appliquée à une partie des agents en 2015, puis généralisée en 2017, accorde certes moins de place à la notion de « mérite ». Néanmoins, cette prime est assise sur la notion de « fonction occupée », ce qui signifie qu’« elle est déconnectée du grade et de l’ancienneté de l’agent », s’inquiètent les fonctionnaires FO, s’élevant contre ce « nouveau système antistatutaire ». Une fois de plus assise sur le principe de l’individualisation des rémunérations, cette prime fait fi du principe de carrière des agents et par ailleurs elle n’est assortie d’aucune garantie de versement au-delà de la première année.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante