L’Assemblée nationale fait un premier pas contre le travail low cost

Détachement par Mathieu Lapprand

La proposition de loi visant à encadrer en France le travail détaché a été adoptée le 25 février dernier par 323 voix pour, 10 contre et 148 abstentions. Elle sera soumise au Sénat en avril ou mai prochain. La directive européenne sur le détachement de 1996 permet à une entreprise de faire venir un salarié dans un autre pays européen en continuant à payer les cotisations sociales du pays d’origine. « Ce qui est en cause, c’est l’émergence potentiellement dévastatrice de pratiques d’optimisation sociale, qui se traduit par un véritable négoce de travailleurs détachés low cost », a expliqué le rapporteur Gilles Savary.

La « responsabilité solidaire » étendue à tous les secteurs

Le 9 décembre 2013, vingt et un États membres sur les vingt-huit avaient arrêté le choix d’encadrer la directive sur le détachement. Le Parlement veut rapidement traduire en droit français ce compromis européen. La future directive européenne devra en effet être confirmée par un accord avec le Parlement européen et entrera au mieux en vigueur en 2016.

La proposition de loi votée décrit le principe de « responsabilité solidaire », qui permet de poursuivre un donneur d’ordre pour des fraudes commises par son sous-traitant recourant à des travailleurs détachés. Or, réservée au secteur du BTP dans l’accord européen, cette responsabilité est étendue à tous les secteurs. Le texte prévoit une liste noire sur Internet des entreprises condamnées pour « travail illégal », et leur interdit de bénéficier d’aides publiques pour cinq ans. Des mesures spécifiques au transport international ont aussi été adoptées.

Mais alors qu’une nouvelle directive sur le « détachement intragroupes » est également en discussion, menaçant de flexibiliser encore davantage le travail en Europe (FO Hebdo n°3106), cette loi n’est qu’un premier pas : si elle freinera quelques abus, elle ne mettra toutefois pas un terme au dumping social inscrit dans les textes européens.

Mathieu Lapprand Journaliste à L’inFO militante