Air France : quatrième grève pour les salaires ce 30 mars… Avant celles des 3 et 7 avril

Transport aérien par Valérie Forgeront

Photographie de Mathieu Marquer (CC BY-SA 2.0)

Mais combien faudra-t-il de journées de grève avant que la direction d’Air France accepte de rouvrir une négociation salariale ? Après une grève le 22 février puis une autre le 27 février puis une autre encore le 23 mars, une nouvelle journée d’action est programmée ce vendredi 30 mars assortie d’un rassemblement à 10h devant le siège de la compagnie sur le site de Roissy. Représentant toutes les catégories de personnels (pilotes, personnels au sol et navigants commerciaux) les dix organisations de l’intersyndicale annoncent d’ores et déjà deux autres grèves les 3 et 7 avril… A moins, bien sûr, que la direction entende enfin la revendication : une augmentation générale des salaires à hauteur de 6%.

La grève de ce 30 mars (de 1h à 24h de grève selon les salariés) est la quatrième journée de protestation des personnels d’Air France depuis le 22 février dernier. Comme les trois précédentes grèves, celle-ci est à l’initiative de l’intersyndicale toujours composée de dix organisations (dont FO pour les navigants commerciaux/PNC et personnels au sol) représentant les trois catégories de personnels : pilotes, hôtesses et stewards, personnels au sol.

Cette nouvelle grève pour les salaires ne sera pas la dernière. D’ores et déjà les organisations annoncent deux autres dates : les 3 et 7 avril. Nous allons durcir le rythme des mouvements indiquait l’intersyndicale le 26 mars en prenant pour slogan tous ensemble sous-entendu toutes les catégories de personnels unies dans la même revendication salariale. Ce qui est le cas depuis le début du mouvement en février. Un autre syndicat (l’Unac, représentatif chez les navigants commerciaux) non membre de l’intersyndicale appelle cette fois lui aussi aux grèves des 3 et 7 avril.

Face à cette situation de blocage, la direction d’Air France joue toujours la surdité. Pire, depuis quelques jours, elle tente le jeu de la division s’irrite Christophe Malloggi, le secrétaire général de FO-Air France. Le P-DG de la compagnie, M. Jean-Marc Janaillac, a ainsi envoyé récemment deux courriers, l’un aux pilotes, l’autre aux navigants commerciaux et personnels au sol.

Tentative de division et mépris…

Dans le courrier destiné aux pilotes M. Janaillac indique qu’il n’y a pas de compagnie sans eux et que la direction va rencontrer leurs représentants syndicaux. Dans le second courrier adressé aux autres catégories de personnels, le patron d’Air France tient un discours moins caressant remarque Christophe Malloggi. Il explique que la situation de l’entreprise s’est certes redressée mais que répondre positivement à la revendication salariale mettrait en péril l’avenir de la compagnie et ses investissements. Pour les personnels indique FO-Air France au-delà de la tentative de division l’envoi de ces deux courriers est interprété par beaucoup comme du mépris.

Les salariés rappellent toutefois que le groupe Air France-KLM a affiché de bons résultats sur 2017. En ce début d’année, la direction du groupe a annoncé en effet qu’Air France-KLM avait réduit sa dette en 2017 et affichait un bénéfice d’exploitation en hausse de 42% à 1,48 milliard d’euros (dont 588 millions d’euros pour Air France) contre 1,04 milliard un an plus tôt.

Alors que le mardi 27 mars les deux syndicats représentatifs de pilotes étaient reçus par la direction dans le cadre du préavis sur ce dossier des salaires, le slogan de l’intersyndicale (reçue elle aussi dans le cadre du préavis le mercredi 28 mars) restait le même ce qui traduisait la volonté des organisations de rester unies pour défendre la même revendication : l’augmentation générale des salaires à hauteur de 6% en 2018.

+0,55% seulement sur douze mois

Tous les salariés d’Air France ont droit à cette revalorisation qui permettrait de rattraper l’inflation insiste l’intersyndicale. Décidé en 2011, un gel des salaires a eu lieu dans la compagnie sur la période 2012-2017. Par ce gel qui a duré six ans, tous les salariés ont perdu 6% de pouvoir d’achat.

En n’apportant aucune réponse concrète à notre revendication, la direction campe sur ses positions et cherche la division. Cette tentative n’aboutira pas prévient l’intersyndicale. La direction a même tenté d’amadouer les salariés en proposant des « ajustements » individuels de salaires, estimant que les pertes de pouvoir d’achat étaient différentes selon les salariés. L’intersyndicale a rejeté cette tentative de division.

Depuis quelques jours la direction évoque une augmentation de 2,4% dont 1% d’augmentation générale en 2018 (et 1,4% en augmentations individuelles). Cette affirmation ne correspond pas à la réalité, indique FO-Air France. Les 1% annoncés se décomposent en +0,6% au 1er avril et +0,4% au 1er octobre. Donc sur douze mois cela ne fait que 0,55% d’augmentation.

Le coup des mesures individuelles fourre-tout

Cette augmentation générale pour 2018 relève d’une décision unilatérale de la Direction. Décision qui elle-même découle de l’accord issu de la négociation annuelle obligatoire (NAO). Or cet accord signé le 1er février dernier par les seuls syndicats CFDT et CFE-CGC a été contesté par plusieurs syndicats, dont FO, affichant à eux tous une représentativité de plus de 50% des suffrages aux dernières élections. Ils ont fait valoir leur droit de retrait (le 7 février pour FO). L’accord est donc devenu caduc.

La direction a voulu conserver les termes de l’accord en décidant d’une augmentation générale des salaires de seulement 1% sur 2018… Cela explique que l’intersyndicale demande l’ouverture de nouvelles négociations salariales.

Les augmentations individuelles proposées par la direction sont-elles recevables ? Pas vraiment fulmine FO-Air France. Le syndicat rappelle en effet que cette enveloppe englobe l’ancienneté, les promotions et les évaluations individuelles. Or, ces éléments répondent à des logiques différentes. L’ancienneté reconnaît la durée de notre parcours dans l’entreprise et la montée en compétence qu’elle entraîne. L’évaluation individuelle reconnaît la performance mesurée sur l’année au regard d’objectifs fixés.

Bilan ironise le syndicat FO, les salariés qui auront atteint ces objectifs bénéficieront d’une augmentation individuelle variant de +0,4% à +0,9%. Succès assuré à la réception du bulletin de paie d’avril.

Accentuer encore la pression

Ces derniers jours enfin, la direction a cherché à minimiser la portée des journées de grèves sur l’organisation des vols. L’intersyndicale rappelle que le 23 mars dernier plus de 56% des vols ont été impactés. 42% des vols long-courrier ont été annulés ou affrétés. 59% des vols moyen-courrier ont subi le même sort.

Les syndicats accentuent donc la pression espérant que la direction accepte de revenir à la table de négociations. Enfin.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

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