Nous cessons le travail pour pouvoir continuer à travailler !
. Le slogan de la grève générale de 24 heures lundi 25 juin, à l’appel notamment des principales confédérations syndicales du pays, la CGT (Confédération générale du travail) et la CTA (Centrale des travailleurs d’Argentine, autonome), résume bien l’état d’esprit des travailleurs argentins : la politique économique de l’actuel gouvernement mène le pays à la catastrophe.
Après trois années d’austérité : explosion du chômage et de la pauvreté
Suppression de nombreuses subventions publiques, notamment aux compagnies d’électricité, de gaz et d’eau, ce qui s’est traduit par des suppressions d’emplois massives et une forte augmentation des factures alors que l’inflation explosait déjà depuis plusieurs années, suppression du contrôle des changes, veto à l’application d’une loi qui limite les prix des services publics, réforme du système des retraites fin 2017… Et ce n’est pas fini. Le très libéral président argentin, Mauricio Macri, est visiblement lui aussi un fervent adepte du chamboule-tout.
Dès son arrivée au pouvoir fin 2015, ce dernier a lancé un vaste chantier de réformes avec l’objectif affiché de limiter les dépenses publiques pour réduire le déficit, d’enrayer l’inflation, tout en luttant contre la pauvreté.
Quatre mois plus tard, 100 000 travailleurs et travailleuses étaient déjà licenciées. Un an plus tard, les syndicats évaluaient le chiffre à 200 000.
Trois ans plus tard, le taux de chômage officiel est passé de 6,9% en 2015 à 9,3% et près de 33% des Argentins vivent sous le seuil de pauvreté contre 29% en 2015.
Tel est le prix qu’a déjà payé la population argentine pour que le déficit public passe de 6% du PIB en 2015 à 3,9% en 2017 et peut-être à 2,7% fin 2018.
Accord entre le gouvernement argentin et le FMI : trois ans d’austérité de plus
Pour autant le taux d’inflation officiel atteint 25%, certaines sources l’évaluant à plus de 60%. Et le peso argentin, du fait de la suppression du contrôle des changes, a totalement décroché face au dollar, se dépréciant de 35% depuis le début de l’année. Le pays reste fortement endetté (70 milliards de dollars) et les créanciers privés sur les marchés financiers refusent désormais de lui accorder des prêts supplémentaires, d’où le SOS lancé par le gouvernement au FMI pour, explique le Président argentin en substance, éviter une banqueroute.
L’accord entre l’État argentin et le FMI a été conclu le 7 juin. En échange d’un prêt de 50 milliards de dollars de l’institution financière internationale, le gouvernement argentin s’est engagé à un retour à l’équilibre budgétaire en 2020 et même à réaliser un excédent de 0,5% en 2021. Une trajectoire forcément synonyme de nouveaux sacrifices pour les travailleurs.
Un choix périlleux
Toutefois la tâche du gouvernement argentin risque fort de se révéler ardue face à une population qui dans sa grande majorité garde un souvenir plus que cuisant des collaborations précédentes entre autorités argentines et FMI. En 2001, les politiques économiques imposées tout au long des années 90 par le Fonds ont en effet précisément débouché sur la banqueroute totale du pays, en cessation de paiement face à ses créanciers. Des émeutes de la faim ont éclaté dans tout le pays, violemment réprimées (plus de trente morts parmi les manifestants). En 2006, le pays a d’ailleurs rompu toute relation avec le FMI. Mais il ne s’est jamais totalement remis de la grande crise de 2001.
Et aujourd’hui, dix-sept ans plus tard, le président Macri fait le choix de replacer le pays sous la protection de son ancien bourreau. Un choix périlleux, pour le moins. Les travailleurs argentins l’ont d’ores et déjà condamné en répondant massivement à l’appel à la grève générale des confédérations syndicales le 25 juin, la plus suivie depuis huit ans. Ils lui opposent leur refus des réformes d’ores et déjà engagées par le gouvernement du président Macri et leurs revendications, notamment celle d’augmentations des salaires.