Aux origines de la vaccination

Histoire par Christophe Chiclet

Pasteur vaccinant des moutons contre le charbon à Pouilly-le-Fort (illustration du XXe siècle)

Ce n’est qu’à la fin du XVIIIe siècle que l’immunologie a fait un grand bond en avant avec la découverte des vaccins et donc de la vaccination. Sans cette dernière, les épidémies seraient encore plus dramatiques.

Cette aventure médicale commence en 1776 dans la campagne anglaise. Le docteur Edward Jenner constate que les fermières en contact régulier avec des bovins porteurs d’une maladie bénigne, nommée la « vaccine », ne contractaient pas la redoutable variole lors des épidémies mortelles. C’est cette même variole qui a tué des millions d’Indiens d’Amérique du sud au XVIe siècle. Il décide alors d’injecter au jeune James, âgé de huit ans, le pus d’une femme contaminée par la « vaccine ». Le gamin n’attrapera jamais la variole et la première campagne de vaccination antivariolique aura lieu dans une grande partie de l’Europe quelques décennies plus tard.

C’est Maxime Schwartz, directeur de l’Institut Pasteur de 1988 à 1999, qui résumera le mieux cette avancée : On dit souvent qu’Edward Jenner a inventé la vaccination et Pasteur les vaccins. Mais il a fallu attendre plus d’un siècle car les sommités médicales de l’époque étaient frileuses devant toutes innovations !

C’est le bisontin, Louis Pasteur (1822-1895), qui va faire comprendre à l’humanité l’importance de cette thérapie. Il a commencé en mettant au point un remède contre le choléra des poules et la fièvre charbonneuse des moutons. En 1881, il déclare qu’inoculer des virus affaiblis ne pouvant pas tuer va donner une maladie bénigne préservant de la maladie mortelle. Mais de là à passer sur une expérience humaine… Il en aura l’occasion quatre ans plus tard.

Le vaccin contre la rage

Un matin de juillet 1885, le jeune Joseph Meister s’en va à l’école de son village, en Alsace. En chemin, le chien de l’épicier le mord à quatorze reprises. La bête enragée se retourne contre son maître venu secourir le pauvre enfant. Les gendarmes abattent le berger allemand. Ayant entendu parler par les médecins — chez lesquels elle a conduit son fils —, d’un érudit parisien soignant les molosses enragés, la mère de Joseph vient frapper à la porte du responsable du laboratoire de chimie physiologique de l’École normale supérieure, un certain Louis Pasteur, alors âgé de 62 ans. Ainsi débute l’histoire de la vaccination moderne.

Pasteur hésite, Pasteur a peur, mais Pasteur ne doute pas. Pourtant il va passer pour la première fois de l’expérimentation animale à l’expérimentation humaine. Il écrira plus tard : La mort de cet enfant paraissant inévitable, je me décidai, non sans vives et cruelles inquiétudes, à tenter sur Joseph la méthode qui m’avait constamment réussi sur des chiens. Pasteur n’y va pas de main morte. En dix jours, le petit alsacien va recevoir treize piqûres à base d’un broyat de moelle de lapin mort de la rage. Terrorisé à l’idée d’un échec, Pasteur, qui se sait chimiste et non médecin, se réfugie dans son Jura natal le temps de voir si son pari si risqué a réussi. Le petit Joseph deviendra grand et fondera une famille nombreuse.

Une commission d’enquête internationale confirme l’efficacité du vaccin. La nouvelle fait alors le tour du monde. Face à l’afflux de dons et de candidats à la vaccination, Pasteur crée en 1888 son propre institut. À sa mort, en 1895, il aura droit des obsèques nationales de la part de la République pour honorer ce grand inventeur qui, non sans humour, aimait à dire : « le meilleur médecin est la nature. Elle guérit les trois quarts des maladies et ne dit jamais de mal de ses confrères !

Au milieu du XXe siècle, la rage ayant été éradiquée de France, le vaccin va se perdre. Quand des renards enragés venus de Pologne vont franchir le rideau de fer et arriver dans la patrie de Pasteur au milieu des années 1970, son Institut va reprendre ses travaux pour retrouver les souches nécessaires et fabriquer à nouveau le vaccin.

Désormais, on estime que près de deux millions de décès sont évités chaque année dans le monde grâce aux vaccins. Et nombre de pays du Tiers monde aimeraient disposer de moyens financiers pour faire vacciner leurs populations et donc la protéger.

Christophe Chiclet Journaliste à L’inFO militante