Avec FO, les dames-pipi de Paris gagnent leur combat judiciaire

Les articles de L’InFO militante par Clarisse Josselin

L’entreprise 2theloo, qui avait remporté en 2015 le marché des toilettes des monuments parisiens, a été condamnée le 23 avril 2021 en première instance pour avoir refusé de reprendre les contrats de travail de six dames-pipi, accompagnées par FO. La justice a ordonné au prestataire d’indemniser ces salariées pour réparation du préjudice subi.

Après presque six ans de procédures, les dames-pipi des monuments parisiens ont enfin obtenu gain de cause. A l’été 2015, ces onze salariées s’étaient subitement retrouvées sans salaire ni employeur suite à un changement de prestataire. Six d’entre elles, accompagnées par FO, avaient saisi la justice.

Pour leur avocat, Me Fiodor Rilov, il ne fait pas de doutes que le nouveau prestataire choisi par la Ville de Paris, la société Sarivo Point WC (filiale du groupe néerlandais 2theloo), avait l’obligation de reprendre les salariées, en application du Code du travail et de la convention collective de la propreté. Ces dames, qui s’occupaient des toilettes de Montmartre ou Notre-Dame depuis parfois 32 ans, avaient déjà connu à plusieurs reprises un changement d’employeur.

Or le nouveau prestataire a prétexté un nouveau modèle économique lui permettant d’engager librement ses salariés. Pour la fédération de services Feets-FO, il s’agissait plutôt d’ une nouvelle tentative d’entreprise vautour pour obtenir plus de profits sur le dos des salariés.

F.Blanc

Après plusieurs semaines de mobilisation à l’appel de FO, une solution avait pu être trouvée pour ces dames. Quatre d’entre elles ont été embauchées directement par la mairie de Paris, tandis que les deux autres sont parties à la retraite. En parallèle, un combat s’est engagé sur le terrain judiciaire.

10 000 euros de dommages et intérêts

Rejet en appel d’une procédure accélérée, absence d’accord sur le fond entre les conseillers prud’homaux… Après de longues années de procédures, l’affaire a pu être examinée en départage par un juge professionnel en février 2021. Dans un jugement daté du 23 avril, le tribunal des prud’hommes de Paris a estimé que les contrats de travail de ces dames-pipi auraient dû faire l’objet d’un transfert à la société SAS 2theloo France. Le juge met en avant l’accès à une même clientèle par le nouveau prestataire et la poursuite d’une activité de même nature indépendamment des règles d’organisation, de fonctionnement et de gestion.

La société a été condamnée à verser des dommages et intérêts pour préjudice moral aux salariées ayant saisi la justice. Dans la première décision transférée à la Feets-FO, le montant de l’indemnisation pour l’une de ces dames s’élève à 10 000 euros. S’y ajoutent 1500 euros pour couvrir les frais de justice. Ces montants devraient logiquement être similaires pour les autres victimes. L’entreprise 2theloo a un mois pour faire appel.

Pour Zaïnil Nizaraly, secrétaire général de la Feets-FO, ce jugement n’arrive que trop tardivement et la somme reste faible pour le préjudice subi. Mais ce jugement conforte le principe du maintien dans l’emploi des salariés victimes des changements de marchés dans la sous-traitance de services, se félicite-t-il. En effet, les enjeux de ce dossier dépassent la seule situation individuelle des salariées concernées directement. Une décision de justice défavorable aurait pu faire jurisprudence dans la branche de la propreté et remettre en cause la garantie de l’emploi des 490 000 salariés couverts.

Les « dames pipi » manifestaient place du Châtelet à Paris le 4 septembre 2015. Photo : F. Blanc

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante

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