Alors qu’ils se présentaient volontiers aux médias comme exemplaires en matière de télétravail, les employeurs du secteur bancaire français ont dû revoir leur copie, après s’être retrouvés qualifiés de mauvais élèves
du reconfinement. C’est sans doute sous la pression du gouvernement mécontent du battage médiatique engendré par notre mobilisation, qu’ils sont revenus sur la leur objectif d’ouvrir le plus possible leurs réseaux
au présentiel indique Mireille Herriberry, la secrétaire fédérale de la section FO Banques et Sociétés Financières. Mais, le moins que l’on puisse dire, c’est que les employeurs ont essayé, cherchant à se jouer des textes gouvernementaux.
Ainsi, début novembre, sous l’œil des caméras, ils ont fait visiter, à la ministre du Travail des bureaux quasi vides. Des chiffres avaient alors été avancés, indiquant jusqu’à 100% de télétravail dans le secteur… Mais la réalité était toute autre. Si les services de ressources humaines ou de back-office avaient ont bien basculé en télétravail, ce n’est pas vraiment le cas dans les réseaux bancaires, où l’on est loin de la situation du premier confinement. Pour ce deuxième, en effet, ce fut plutôt
tout le monde sur le pont
, s’indigne Mireille Herriberry.
Un présentiel pas toujours essentiel
En effet, la déclaration médiatisée d’un télétravail à 100% dans le secteur mérite une nuance subtile. Ce 100% correspond à l’ensemble des postes que les employeurs, et eux seuls, ont estimé être télétravaillables. Ce qui ne signifie donc pas que 100% des postes des banques ont basculé en télétravail. Toutefois, les employeurs ne contrevenaient pas aux demandes de la ministre du Travail qui rappelait, le 6 novembre, que tous ceux qui ont des tâches télétravaillables doivent télétravailler cinq jours sur cinq
. Le ministère avait par ailleurs précisé que la mise en place du télétravail ne constitue une obligation pour l’entreprise que si ses activités le permettent
.
Les employeurs ont bien compris l’intérêt que leur secteur ait été placé dans la catégorie services essentiels
, souligne Mireille Herriberry. De plus, la conservation du lien social
entre salariés, préconisé par le ministère du Travail, n’a pas manqué d’être utilisée pour justifier d’un présentiel, pas toujours si essentiel que cela.
Le 2 novembre 2020, FO Banques s’inquiétait : alors que la plupart des tâches pourraient être traitées à distance en cette période particulière de re-confinement, la majorité des agences bancaires restent ouvertes au public, sans réduire comme il se devrait les interactions sociales des salariés des banques
.
Dès le début du confinement, le Le représentant national de FO-LCL (Le Crédit Lyonnais), Philippe Kernivinen, alertait lui aussi : ce qui pose problème ce sont les agences. Là où certains réseaux ont réduit l’accueil en agence, chez nous on envoie des SMS aux clients pour leur rappeler que les agences sont bien ouvertes
. Avec de telles pratique s’alarmait le militant, on expose les salariés, les clients, et leurs entourages au risque d’une infection
.
Plus largement, FO Banques soulignant que la protection de la santé des salariés, la continuité sécurisée de l’activité ou la contractualisation d’accords sont les seules réponses possibles et responsables dans la période de crise que nous traversons
n’a pas cessé de lutter pour la mise en place de mesures d’hygiène, de sécurité et d’adaptation des conditions de travail dans le secteur soulignant que la protection de la santé des salariés, la continuité sécurisée de l’activité ou la contractualisation d’accords sont les seules réponses possibles et responsables dans la période de crise que nous traversons
.
Face à ces inquiétudes syndicales, la Fédération française des banques (FFB) s’était empressée d’indiquer que l’ensemble du secteur bancaire a mis en place les mesures et les procédures de sécurité individuelles et collectives, en stricte conformité avec les préconisations faites par les autorités sanitaires, qui permettent aux salariés d’exercer leur activité dans le respect total de leur santé
. Si des défaillances dans la délivrance de matériel de protection (gel, gants, masques), comme par exemple à Marseille, ont été évoquées, y compris dans la presse, il s’agissait, heureusement, de cas isolés
note Mireille Herriberry, pointant de nouveaux motifs d’inquiétude qui arrivent à grands pas.
Les actionnaires reviennent par la fenêtre
Ainsi, s’indigne-t-elle, en guise de remerciements pour leur présence en pleine pandémie, les salariés du secteur bancaire voient aujourd’hui leurs emplois menacés par le retour des exigences boursières, cela alors même que de gros profits ont été réalisés malgré la Covid-19
. L’objectif visé, résume-t-elle n’est autre que la valorisation boursière qui ne profite qu’à l’actionnaire
. Début novembre, des suppressions d’emplois ont été annoncées dans le secteur bancaire, dont 640 dans la branche française de la Société générale, qui affichait pourtant un bénéfice de 862 millions d’euros au troisième trimestre 2020. HSBC France prévoit de son côté la suppression d’un poste sur trois dans sa banque de financement, d’investissement et de marchés, soit 235 postes sur 678.
La politique salariale dans le secteur bancaire n’a quant à elle rien de satisfaisant. Ainsi s’irrite Mireille Herriberry, qui demande un retour aux NAO (négociation annuelle obligatoire), cela fait des années que les mesures collectives ont laissé la place aux mesures individuelles. Il faut une négociation collective, tant au niveau des branches
avec le patronat du secteur, soit l’AFB.