Barémisation des indemnités prud’homales : ce n’est qu’un début…

Prud’hommes par Secteur des Affaires juridiques

Les dispositions du Code du travail relatives au plafonnement des indemnités prud’homales sont conformes aux textes européens et internationaux.

À la suite de la saisine de la Cour de cassation pour avis par les conseils de prud’hommes et de Louviers, cette dernière a statué le 17 juillet 2019 et a déclaré ce barème valide au regard de nos engagements internationaux et européens (avis n°15012 et 15013).

Pourtant, les arguments juridiques ne manquaient pas.

Elle rejette ainsi la violation de l’article 6§1 de la CESDH (droit à l’accès à la justice), au motif que le plafonnement des indemnités prud’homales limite le droit « matériel » des salariés (à savoir le montant de l’indemnité sans cause réelle et sérieuse) mais ne constitue pas « un obstacle procédural entravant leur accès à la justice ».

Elle affirme que l’article 24 de la Charte sociale européenne est déclaré non pourvu d’un effet direct en droit interne au prétexte qu’il ne s’appliquerait pas dans un litige entre particuliers, et ce, d’autant plus « eu égard à l’importance de la marge d’appréciation laissée aux parties contractantes ». La Cour de cassation avait pourtant reconnu l’applicabilité directe de certaines dispositions de la Charte (ses articles 5 et 6) dans la mesure où ces articles étaient suffisamment précis et n’avaient donc pas besoin d’être complétés par un texte interne pour être directement applicables (Cass. soc., 15 novembre 2017, n°16-24885 et Cass. soc., 12 avril 2018, n°17-60197). Ce n’est pas le cas pour l’article 24, même si le Conseil d’État a reconnu l’effet direct de l’article 24 de la Charte sociale européenne (CE, 10 février 2014, n°358992).

Le barème est considéré conforme à l’article 10 de la Convention 158 de l’OIT. Cet article garantit le droit pour un salarié dont le licenciement est injustifié à une « indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation appropriée ». La Cour considère que le terme « adéquate » doit être compris comme réservant « une marge d’appréciation aux États ». En d’autres termes, elle « botte en touche » !

Il en ressort un avis peu argumenté et peu convaincant.

Nous vous invitons à continuer à résister au plafonnement dans l’attente des recours à venir au niveau européen et international, à l’instar des conseils de prud’hommes de Troyes (29 juillet 2019 n°19/00279) et de Grenoble (CPH de Grenoble 22 juillet 2019, n°18/00267), même si ce dernier est frappé d’appel.
Tant qu’une décision claire de la Cour de cassation n’est pas intervenue, cet avis ne s’impose pas de fait aux juges du fond.

Par ailleurs, la cour d’appel de Paris devrait rendre une décision en septembre.

Continuons le combat !

Ce que dit la loi
L’article L 1235-3 du Code du travail fixe un barème d’indemnisation en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, à défaut de réintégration du salarié dans l’entreprise.

Ce barème est impératif pour le juge et ne saurait être augmenté, ou diminué, sauf dans des cas limitativement énumérés par l’article L 1235-3-1 du Code du travail.

Les nullités mentionnées au premier alinéa sont celles qui sont afférentes à :

 la violation d’une liberté fondamentale ;
 des faits de harcèlement moral ou sexuel ;
 un licenciement discriminatoire ;
 un licenciement consécutif à une action en justice en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, ou à une dénonciation de crimes et délits ;
 un licenciement d’un salarié protégé en raison de l’exercice de son mandat ;
 un licenciement d’un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles L 1225-71 et L 1226-13.

 

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