Un salarié, élu membre suppléant de son CSE d’établissement et DS d’établissement, souhaite bénéficier d’un congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale (CFESES) de treize jours, il transmet une demande à son employeur.
L’employeur a refusé la demande du salarié en raison du quantum de jours de formation CFESES demandé. L’employeur considérait que le salarié n’étant pas animateur de stages et sessions de formation, il ne pouvait prétendre au bénéfice des 18 jours de CFESES.
La Cour de cassation a apporté de multiples précisions sur le quantum du CFESES et les conséquences d’un refus injustifié de l’employeur d’octroyer 18 jours à son salarié (Cass. soc., 12-6-24, n°22-18302).
La Cour rappelle que le CFESES est de droit pour le salarié pouvant en bénéficier.
Quid du quantum de CFESES pour un salarié élu au CSE et DS ?
La durée totale des CFESES pris dans l’année par un salarié ne peut excéder 12 jours. Elle ne peut dépasser 18 jours pour les animateurs des stages et sessions et pour les salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales (art. L. 2145-1 ; L. 2145-7).
Il s’agit de maxima individuels qui se combinent par ailleurs avec un maximum global évalué au niveau de l’établissement.
Qu’entend-on par animateur des stages et sessions
et salarié appelé à exercer des responsabilités syndicales
.
La loi est silencieuse sur le sujet.
Selon une circulaire du 3 novembre 1987 (Circ. DRT n°87/11), peuvent bénéficier des 18 jours de formation, tous les salariés :
– exerçant une fonction d’animation des stages de formation dans le domaine économique, social et syndical ;
– et de tous ceux auxquels les organisations syndicales envisagent de confier une responsabilité, ou qui exercent déjà une telle responsabilité, dans le cadre de l’entreprise ou hors de celle-ci.
En l’espèce, l’employeur refusait d’octroyer 18 jours de CFESES à un salarié élu suppléant au CSE d’établissement et DS d’établissement.
L’employeur évoquait une lecture combinée
des articles L 2145-1 et L 2145-7. Par ailleurs, il balayait la circulaire DRT n°87/100 du 3 novembre 1987 au motif qu’elle serait dépourvue de portée normative.
La Cour de cassation censure le raisonnement de l’employeur en rappelant les dispositions de l’article L 2145-1 du code du travail.
Selon cet article, les salariés appelés à exercer des fonctions syndicales bénéficient du CFESES prévu à l’article L 2145-5. La durée totale des congés pris à ce titre dans l’année par un salarié ne peut excéder dix-huit jours.
La Cour précise que : Cette disposition est propre aux salariés appelés à exercer des fonctions syndicales, auxquels les dispositions de l’article L 2145-7 [les 12 jours] ne sont pas applicables
.
C’est donc à bon droit que la cour d’appel a jugé que le seul fait d’être élu suppléant au CSE d’établissement et DS d’établissement ouvrait droit au bénéfice des 18 jours de CFESES et a, en conséquence, ordonné à la société d’autoriser le CFESES de 13 jours demandé par le salarié.
Le salarié et le syndicat (intervenant à l’instance) pouvaient-ils demander des dommages et intérêts pour entrave au droit syndical pour refus injustifié de l’employeur d’un CFESES de 13 jours ?
Le non-respect des dispositions des dispositions sur le CFESES n’entre pas dans l’entrave au droit syndical prévue par l’article L 2146-1. Le salarié et le syndicat sont déboutés sur ce point.
L’employeur est-il tenu de consulter le CSE lorsqu’un désaccord s’élève quant à la durée du CFESES ?
La Cour répond étonnement par la négative par une lecture littérale de l’article L 2145-11 qui n’envisage le refus de l’employeur que lorsque l’absence du salarié est susceptible de générer des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l’entreprise.
Il faut comprendre de cet arrêt que c’est uniquement dans le cas où le CFESES est refusé par l’employeur pour le motif énoncé à l’article L 2145-11 (absence générant des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l’entreprise) que le CSE doit être consulté.
Le CSE n’a donc pas à être consulté lorsque le refus d’octroyer le CFESES concerne uniquement le nombre de jours de congé de formation demandé.
Rappelons qu’en l’espèce, le litige, portant sur le quantum du nombre de jours dont disposait le salarié, avait conduit l’employeur à refuser son CFESES, sans avoir à demander l’avis du CSE.
Reste une question : quid de la procédure prud’homale à un litige portant sur le quantum du CFESES ?
En effet, c’est dans l’article L 2145-11 sur la possibilité de l’employeur de refuser le CFESES en raison des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l’entreprise que se trouve (en alinéa 3) la spécificité procédurale tenant à la procédure accélérée devant le CPH (=passage direct devant le BJ).
Ainsi, en suivant le raisonnement de la Cour, la divergence portant sur le nombre de jours de congés de formation semble ne pas bénéficier de la procédure accélérée au fond (bien que ce point n’a pas été soulevé en l’espèce).
Le salarié est-il en droit d’obtenir des dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait du refus abusif de l’employeur de son CFESES ?
Oui, le seul constat que l’employeur n’a pas donné de suite favorable à une demande de congé qu’il aurait dû accorder de plein droit suffit à caractériser un manquement, au préjudice du salarié, à son droit de formation.
Il importe peu que l’employeur ne soit pas de mauvaise foi : en l’espèce, l’employeur se prévalait d’une divergence d’interprétation de la loi et arguait s’être rapproché immédiatement du salarié pour obtenir des précisions car sa demande.
Le syndicat peut-il obtenir des dommages et intérêts en raison de l’atteinte portée à l’intérêt collectif de la profession pour refus de l’employeur d’octroyer un CFESES à un salarié ?
La Cour répond par l’affirmative : le refus d’un congé de dix-huit jours à des salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales porte préjudice à l’intérêt collectif de la profession
.
N’hésitez pas à vous prévaloir de cette décision pour demander un CFESES de 18 jours.