Chez Castorama, l’audience de la grève illustre le malaise salarial

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

Entre 30 % et 40 % des salariés des magasins mobilisés se sont mis en grève à l’appel de Force ouvrière le 26 novembre. Le syndicat de l’enseigne dénonce la dégradation du pouvoir d’achat des salariés alors que pour les NAO, la direction de Castorama a proposé dans un premier temps une mesure de hausse n’allant pas au-delà de 2,2 % soit bien en deçà de l’inflation actuelle. Si, grâce à la mobilisation elle a un peu revu sa copie, il n’empêche qu’alors que les négociations se poursuivent, le syndicat FO, demeure particulièrement vigilant. Il n’exclut pas une nouvelle mobilisation si les propositions ne sont pas satisfaisantes.

À l’appel de Force Ouvrière, de nombreux salariés de Castorama se sont mobilisés le 26 novembre pour dénoncer la dégradation de leur pouvoir d’achat. Dans les années 2000, le salaire d’embauche était de 11 % supérieur au Smic. Aujourd’hui, il est au Smic, indique Jean-Paul Gathier, délégué syndical central FO au sein de l’entreprise. Alors que l’inflation est toujours aussi forte, les propositions salariales de la direction dès l’ouverture des NAO ont attisé la colère des salariés, lesquels les ont massivement rejeté. A cela rien d’étonnant. On nous proposait une hausse de 2,2 % pour les employés et 0,7 % pour les cadres. C’est très loin de rattraper l’inflation qui dépasse les 5 % sur l’année, pointe le militant. FO demande une augmentation de 10 % pour tous les salariés, précise le communiqué de la section Commerce et VRP, publié le 23 novembre.

Les « offres » salariales de la direction exaspèrent d’autant plus que les salariés de Castorama comparant leur situation salariale avec celle de leurs homologues chez de Leroy Merlin, soulignent la différence. Qui n’est pas en leur faveur. Chez nous, le salaire d’embauche est à 1 680 euros contre 1 825 euros chez eux. Et avec une progression dans la grille salariale, décrit ainsi Jean-Paul Gathier. De son côté, la direction de Castorama refuse la comparaison, mais admet des problèmes de recrutement. Pour le moins souligne le délégué FO. En effet, Il y a aussi les mauvaises conditions de travail et les horaires à rallonge qui jouent dans ces difficultés à recruter.

Une première victoire

Au sein de l’enseigne, le mécontentement est profond. Illustration avec les 30 % et 40 % de salariés des magasins participant à la mobilisation qui se sont mis en grève. Un chiffre important, se réjouit le délégué syndical. D’autant que le mouvement concernait un grand nombre de magasins, de Mérignac à Hénin-Beaumont en passant par Brest ! Sur les sites, ce sont les salariés dits « de base » qui expriment un ras-le-bol concernant les salaires faibles et les conditions de travail difficiles souligne David Malezieux secrétaire adjoint de la section fédérale Commerce & VRP de la fédération FEC-FO. Les salariés qui ne parviennent pas à joindre les deux bouts ont demandé à FO, 3e organisation dans l’entreprise, de les accompagner dans leur mobilisation.

Une première victoire est d’ores et déjà actée. Dans le cadre des NAO, la direction avait proposé de fondre la prime dite d’été, chaque année indexée sur l’inflation calculée au 1er janvier, dans la hausse de rémunération proposée. Cela revenait à faire disparaître cette prime et sans que les salaires, eux-mêmes, ne soient réellement augmentés. Aucun salarié ne voulait de ça, tempête Jean-Paul Gathier. A l’issue de l’action du 26 novembre, la direction a retiré cette proposition. Toutefois, le syndicat FO demeure vigilant. La direction a revu sa proposition salariale à la hausse, soit une augmentation de 2,5 %, ce qui reste peu. Une dernière réunion est prévue le 13 décembre. Le délégué central n’exclut pas une nouvelle mobilisation si les propositions mises sur la table ne sont pas à la hauteur.

Un taux de turn-over qui en dit long

Et le syndicat n’oublie pas non plus la question des conditions de travail, lesquelles se dégradent. Depuis plus de 20 ans, les métiers changent et se densifient, observe Jean-Paul Gathier. On nous demande de faire plus. Des tâches se sont ajoutées, notamment autour de la vente en ligne. Que ce soient pour les livraisons ou le click and collect, les vendeurs doivent enregistrer ces achats et préparer ces commandes, en plus des missions qu’ils effectuaient auparavant. Les demandes de diagnostics et de devis liés aux énergies sont également apparues. Enfin, on nous incite à être plus rapides. On a demandé par exemple à une collègue de 60 ans d’aller plus vite dans la mise en rayon. Or, c’est un travail physique : les objets sont souvent lourds et peu faciles à manier. Face à cela, le turn-over au sein de Castorama dépasse les 30 %. Et ce taux grimpe à 60 % concernant les personne qui travaillent dans l’enseigne depuis moins de 2 ans, pointe le syndicaliste.

Pour l’entreprise, la politique visant à ne pas augmenter les salaires s’accompagne d’une volonté de déployer le travail le dimanche, remarque David Malezieux. En maintenant les salaires à un faible niveau, la direction est sûre de trouver des volontaires pour travailler ce jour-là. Si les salariés travaillant le dimanche voient leur salaire majoré, cette majoration est prise sur l’enveloppe des augmentations. Et celle-ci ne grossissant pas, les augmentations salariales demeurent faibles. On fabrique des travailleurs pauvres, analyse le militant. D’ailleurs ces problématiques concernent Castorama mais touchent l’ensemble des enseignes de bricolage.

Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération