La colère bouillait depuis quelque temps déjà au sein de Veolia Eau Île-de-France. Elle a finalement explosé le 14 février dernier, sous forme d’une grève reconduite sur trois jours. Cela fait longtemps que nous protestons contre le niveau des rémunérations alors que, sur les 15 dernières années, Veolia Eau Île-de-France dégage un bénéfice annuel de 15 millions d’euros
, explique Patrick Favreau, délégué central de FO. D’ailleurs, 2021 a été une année record avec 21 millions d’euros de bénéfice net.
Or, rappelle-t-il, cette richesse, ce sont les salariés qui l’ont créée en travaillant dur, parfois le week-end ou en horaire décalé quand il y a des urgences. Il est normal qu’ils aient un retour, qu’ils bénéficient du fruit de leur travail
. Les salariés en grève revendiquent, entre autres, des primes et une indemnité mensuelle de 300 euros.
Nous sommes la vache à lait de Veolia
Les revendications sont d’autant plus compréhensibles à la lumière de la situation de Veolia Eau Île-de-France. Nous sommes la vache à lait de Veolia,
À cela, s’ajoutent des contextes particuliers selon les territoires. Si Veolia Eau a signé en tout 4 300 contrats de délégation de service dans toute la France, beaucoup sont déficitaires
, souligne Patrick Favreau. La direction s’appuie donc sur les bénéfices engrangés par Veolia Eau Île-de-France.
Durant les trois jours qu’a duré la mobilisation, on comptait en moyenne 300 grévistes chaque jour, sur les 1 300 salariés que compte Veolia Eau Île-de-France, précise le délégué syndical. Et jusqu’à 400 grévistes qui ont manifesté devant le siège du groupe à Nanterre, le 14 février, 1er jour de la grève.
Autour d’un quart, voire d’un tiers de salariés grévistes, cette proportion importante illustre le malaise dans l’entreprise alors que les salariés sont aussi mobilisés contre la réforme des retraites. Et, C’est difficile de demander aux salariés d’assurer une grève de plusieurs jours, d’autant plus dans un contexte d’inflation et de baisse du pouvoir d’achat
, souligne Patrick Favreau.
Une mobilisation qui paye
FO, majoritaire chez Véolia Eau Île-de-France, est le seul syndicat à être allé au bout du processus de négociation. Le 17 février, l’organisation a signé en effet un protocole de fin de conflit garantissant aux salariés une prime Macron, dégressive en fonction du niveau de salaire. Ceux qui gagnent moins de 33 000 euros annuels auront 300 euros net versés trimestriellement. Cette somme sera de 163 euros pour ceux qui ont un salaire annuel entre 33 000 et 50 000 et de 100 euros pour ceux qui gagnent plus de 50 000 euros
, explique le délégué FO.
Autre victoire, et non des moindres, FO a obtenu que les salariés qui demeuraient à la classification la plus basse passent à la classification supérieure. Ce qui représente 800 euros annuels bruts supplémentaires. Cela concerne 54 salariés. Nous étions le seul établissement à avoir autant de salariés à la première classification
, précise-t-il. Enfin, le syndicat a obtenu le paiement d’une journée de grève pour les travailleurs qui se sont mobilisés pendant au moins deux jours. Pour nos adhérents, nous allons prendre en charge une deuxième journée de grève,
Le combat pour les salaires continue
Malgré cette issue victorieuse après une grève de trois jours, FO Veolia Eau déplore toutefois l’impossibilité de discuter des salaires et cela tient à la structure de Veolia Eau Île-de-France : nous sommes regroupés en unités économiques et sociales au sein de Veolia Eau
, explique Patrick Favreau. De fait, pour les établissements, cela limite les négociations salariales puisque les salaires se négocient au niveau national.
Alors que le groupe Véolia a réalisé un chiffre d’affaires de 42 milliards d’euros en 2022 et affiche un bénéfice net de 1,16 milliard d’euros (soit +30% sur un an), la direction n’a concédé qu’une augmentation des salaires de 2%. Un chiffre bien en deçà de l’inflation actuelle alors que, dans le cadre des NAO, nous exigeons une hausse de 6%
, indique le militant.
Face à cette situation, le syndicat FO Véolia Eau a déposé un appel à la grève illimitée le 28 février. De nouveau en région parisienne mais aussi en Lorraine ou à Narbonne. Et sur plusieurs sites du groupe, des employés ont débrayé quelques heures. Dans le sud-ouest, la grève, massive, a concerné près de 80% du site bordelais. À Montpellier, une trentaine de salariés en grève ont manifesté devant le siège social du groupe. Le mécontentement et les tensions sur les salaires perdurent chez Veolia Eau.