Chlordécone aux Antilles : comme une odeur d’amiante

Revue de presse par Michel Pourcelot

Un dossier du journal Le Monde sur un pesticide très toxique, le chlordécone, massivement employé dans les bananeraies et utilisé jusqu’en 1993, a souligné que la quasi-totalité des Guadeloupéens et des Martiniquais étaient contaminés (étude de Santé publique France), conduisant la presse métropolitaine a se pencher quelque peu sur ce qui apparaît comme un scandale sanitaire. Aperçus.

Le Parisien
Les bananes empoisonnent les Antilles. 95 % des Guadeloupéens et 92 % des Martiniquais sont contaminés à la chlordécone, un insecticide longtemps considéré comme indispensable à la culture des bananes pour en éradiquer le charançon du bananier. Cette substance interdite depuis 1990 a pu être utilisée aux Antilles jusqu’en 1993, les planteurs français convainquant quelques ministres qu’ils ne disposaient pas d’un alternatif efficace contre les coléoptères ravageurs. Une tournure qui ressemble comme deux gouttes d’eau polluée au débat sur le glyphosate. Voire l’amiante...

Le Monde
Ce produit, Firmin l’a toujours manipulé à mains nues, et sans protection. Quand on ouvrait le sac, ça dégageait de la chaleur et de la poussière, se rappelle-t-il. On respirait ça. On ne savait pas que c’était dangereux. Il enrage contre les patrons békés, du nom des Blancs créoles qui descendent des colons et détiennent toujours la majorité des plantations. Ils sont tout-puissants. Les assassins, ce sont eux, avec la complicité du gouvernement. La France n’en a pas fini avec le scandale du chlordécone aux Antilles, un dossier tentaculaire dont les répercussions à la fois sanitaires, environnementales, économiques et sociales sont une bombe à retardement. Surtout pour les victimes. Comme pour l’amiante.

Libération
Le chlordécone a été utilisé aux Antilles de 1972 à 1993 pour éradiquer le charançon, un coléoptère coriace friand de bananes. Interdit en France en 1990, mais utilisé jusqu’en 1993 par dérogation aux Antilles, sous la pression du lobby bananier, le produit a pollué toutes les Antilles. Les plantations de bananes étant situées en amont des terres agricoles, il a contaminé les cultures de patates douces et d’ignames en aval, puis l’eau des rivières et leurs élevages d’écrevisses, les crabes en bord de mer, les bovins, le lait de vache, jusqu’au sang de 90% des femmes enceintes. Une nouvelle fois, « les eaux glacées du calcul égoïste » n’ont pas épargné ces îles tropicales.

Top Santé
Et « Les conséquences de cette utilisation massive sont encore catastrophiques 25 ans après ». Une enquête de Santé Publique France sera dévoilée en octobre à l’occasion d’un colloque prévu en Martinique pour aborder la question de la dépollution. Les premières informations sont révélées dans un article du Monde : les Antillais présentent des niveaux d’imprégnation 13 à 14 fois la norme dite acceptable , et certaines personnes suivies jusqu’à 185 fois. Ces chiffres ne concernent pas seulement les employés agricoles ayant été en contact avec la chlordécone, mais bien toute la population des Antilles. Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés...

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante