Christine Heuzé, la défense de l’enseignement agricole public

InFO militante par Valérie Forgeront, L’inFO militante

Elle est depuis 2017 la secrétaire générale de FO-Enseignement agricole. Sans cesse, Christine Heuzé se bat pour l’octroi de moyens à ce domaine de l’enseignement public et qu’il ne soit pas délaissé, au bénéfice du privé.

C’ est en 1984 que Christine Heuzé découvre l’école d’agronomie de Rennes en tant que « jeune volontaire » (ancêtre des emplois-jeunes). La jeune femme, bretonne et fille d’instituteurs, reprend ensuite ses études, un DEA de géographie, tout en étant contractuelle à temps partiel au sein de l’école. Elle ne quittera plus cet établissement, devenu en 2020 l’Institut Agro de Rennes-Angers, relevant de l’Institut national d’Enseignement supérieur pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement. Un an après les grandes manifs de 1995, devenue ingénieure d’étude, c’est la découverte du syndicalisme. Des collègues avaient créé une section FO à l’école et m’ont demandé de me présenter aux élections CAP.

Christine, aujourd’hui 59 ans, n’oubliera jamais son effarement lorsqu’un collègue, se croyant bien intentionné, lui suggère d’en discuter d’abord avec son mari. La réponse fuse avec rappel à la notion d’égalité... Et Christine décide, seule, d’être candidate. Ce sera le début d’un long parcours syndical qui l’amènera au SFOERTA-FO, ancien nom de FO-Enseignement agricole (rattaché à la FAGE-FO). Avec ses autres secteurs syndicaux de l’Agriculture, FO est deuxième au comité technique ministériel/CTM. Christine s’intéresse à tous les secteurs de l’enseignement agricole : le supérieur avec ses dix écoles (ingénieurs et vétérinaires) et les établissements techniques (des classes de 4e au BTS agricole), au total 174 établissements employant 20 000 agents, soit 60 % des effectifs du ministère de l’agriculture, indique la militante, pestant contre la mise en concurrence, totale, entre le public et le privé.

FO manifestera le 29 mars contre le campus privé Hectar

Depuis dix ans, quand un établissement public propose d’ouvrir une classe, l’administration lui demande d’en fermer une, en échange. L’État ne donne pas la priorité au public, qui ne bénéficie pas d’investissements suffisants. De fait, le choix des familles se porte souvent, par défaut, sur les établissements privés, et elles payent cher. L’enseignement technique agricole public a perdu près de 200 postes en cinq ans et dans le supérieur les moyens ne sont pas non plus à la hauteur. Illustration par les écoles vétérinaires, dont le nombre d’élèves croît cependant de 20 % par an.  Il faudrait former 1 000 vétos par an jusqu’en 2030, or on n’en forme que 500. Parallèlement, le privé prend ses aises. Une école vétérinaire privée ouvrira à Rouen en septembre, les études coûteront 15 000 euros par an aux étudiants !, indique la militante. En région parisienne, c’est un immense campus privé, Hectar, qui vient d’ouvrir, lancé par Xavier Niel et une ancienne conseillère du chef de l’État, et dirigé par le patron de Blablacar. Il dispense des formations sur le numérique, génère des starts-up et entend former, entre autres, les chefs d’entreprises agricoles de demain. Or,  l’enseignement public a tous les talents et compétences pour de telles formations et faire face aux défis technologiques, détaille Christine, s’élevant contre ce projet qui va pomper les crédits publics sur le numérique. Le syndicat FO manifestera le 29 mars contre ce campus qui a déjà reçu des subventions publiques et participe du mouvement Agri French Tech, initié l’an dernier par le gouvernement et doté déjà d’une enveloppe de 200 millions d’euros.

Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération