[Cinéma] Rétrospective Jean-Pierre Mocky

Culture par Christophe Chiclet, L’inFO militante

Fernandel avec Jean-Pierre Mocky dans La Bourse et la Vie (novembre 1965). Par André Cros (CC BY-SA 4.0)

Six villes françaises présentent neuf films [1] de ce trublion du cinéma français. Son ressort principal dès l’origine : la satire sociale largement mêlée d’anticléricalisme et d’esprit libertaire.

Jean-Pierre Mocky de son vrai nom Mokiejewski est le fils d’un juif polonais de Tchétchénie et d’une polonaise catholique. Ceci explique peut-être cela. Officiellement, il a été marié quatre fois et a eu six enfants. Ultime clin d’œil de ce cinéaste qui bouffait du curé, avec des origines juives, il eut des obsèques à l’église Saint Sulpice. Provocateur jusqu’à son dernier souffle et même après !

Il commence par être acteur de cinéma dès 1948, et élève de Louis Jouvet au conservatoire la même année. C’est là qu’il se lie d’amitié avec Belmondo. Il eut déjà un petit rôle en 1946, dans Vive la liberté de Jeff Musso, tout en étant chauffeur de taxi à Paris, pour vivre. De 1952 à 1956, il travaille en Italie où il est assistant de Visconti et de Fellini. Installé à Rome, il habite sur les bords du Tibre, dispose d’un valet de chambre et roule en Ferrari.

Rentré en France, il écrit son premier scénario en 1958, La tête contre les murs et réalise son premier film l’année suivante : Les dragueurs, issu de son expérience personnelle. Il refuse de faire partie de la Nouvelle Vague car son crédo est l’indépendance. Pour cette raison, il fonde sa propre boîte de production « Balzac Films » en 1960.

L’inclassable

Férocement indépendant, il paie peu ou pas ses acteurs car il n’en a pas les moyens, d’autant qu’il tourne comme un forcené : 70 films et 60 téléfilms dans sa longue carrière. Il a ainsi une réputation de radin dans le milieu. Pourtant les plus grands tournent dans ses films : Aznavour, Anouk Aimé dont il fut fou amoureux, Bourvil, Francis Blanche, Jean Poiret, Alberto Sordi, Philippe Noiret, Marie-José Nat, Michel Serrault, Carole Laure, Eddy Mitchell, Catherine Deneuve, Richard Bohringer, Kristin Scott Thomas, Pierre Brasseur, Michael Lonsdale, Gérard Depardieu, Michel Simon, Michel Galabru, Sim, Jacques Villeret et bien d’autres moins connus.

La musique de ses films sera réalisée par deux autres esprits libertaires : Georges Moustaki et Léo Ferré. Toujours avec cet esprit libre, il achète en 1994 sa propre salle de cinéma, « Le Bardy » dans le Xe arrondissement de Paris, pour la revendre en 2011, lui permettant de racheter « L’Action École », dans le quartier latin.

Les débuts sont durs. En 1962, avec Les vierges, il n’obtient que le soutien de François Truffaut et ses Cahiers du cinéma. Mais l’année suivante, avec Un drôle de paroissien dont Bourvil est la vedette, il réalise 2,3 millions d’entrées. En 1967, il part tourner en Angleterre Les carrossiers de la mort, avec comme acteurs Marlon Brando, Henry Fonda, Anthony Quinn et Orson Welles, rien que ça ! Fin 1968, la Cinémathèque française organise sa première rétrospective. En 1970, L’étalon fait 1,2 million d’entrées. Parmi ses chefs d’œuvre : Le piège à cons en 1979, Y-a-t-il un Français dans la salle en 1982, À mort l’arbitre en 1984, Le miraculé en 1987. Outre les grands acteurs qui ont joué dans ses films, il avait le chic pour faire tourner des « tronches » pour les seconds rôles.

Il a tourné son dernier film en 2017, Votez pour moi. Il était par ailleurs invité régulièrement au festival du film historique de Pessac.

À Paris, Bordeaux, Lyon, Rennes, Strasbourg, Toulouse, jusqu’au 31 mai et 14 juin 2022, suivant les villes. Informations : site web Allo Ciné.

Christophe Chiclet Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

Notes

[1Les dragueurs, Le témoin, Un drôle de paroissien, La tête contre les murs, La cité de l’indicible peur, Litan, Solo, À mort l’arbitre, Agent trouble.