Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements

InFOéco n°98 du 5 janvier 2015 par Pascal Pavageau

En juillet 2014, le gouvernement a décidé de mettre en place un Comité de suivi des aides publiques aux entreprises. De longue date, Force Ouvrière revendique régulièrement un tel suivi public, de façon à pouvoir disposer de données fiables sur le montant et la nature des aides consenties aux entreprises.

Nous avons obtenu d’une part que ce comité de suivi ne soit pas lié au « Pacte de responsabilité » et d’autre part qu’il soit adossé au Commissariat à la stratégie et à la prospective (CGSP) en partant du « comité de suivi du CICE », celui-ci donnant satisfaction [1].

Le Premier ministre a ouvert ce Comité le 4 novembre 2014. Pour Force Ouvrière [2], l’élargissement du « comité de suivi du CICE » aux parlementaires constitue un point positif que nous demandions dès sa création en 2013. Le lien avec les évaluations parlementaires existantes ou à venir sur les différents dispositifs d’aides pourra ainsi être réalisé facilement.

Nous avons notamment proposé que cette nouvelle instance s’intitule « Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements ». Cette dénomination, retenue par le gouvernement, montre qu’il convient d’affecter toute aide publique à des engagements concrets et donc à une conditionnalité.

Ce Comité reste piloté par le CGSP. La première séance de travail s’est déroulée le 17 décembre 2014. Celle-ci a permis de faire un premier bilan des huit études et rapports existants depuis dix ans sur ces sujets.

Déjà 110 Mds € d’aides publiques aux entreprises en 2013, plus de 135 Mds en 2017 :

Il n’existe pas de définition légale de ce que recouvrent les « aides aux entreprises ». Il a été retenu, comme Force Ouvrière le revendiquait, une définition large de cette notion : seront prises en compte toutes les interventions économiques publiques en faveur des entreprises (seules les aides juridiques et matérielles ne sont pas intégrées).

Cette approche élargie permet d’intégrer :

 les aides financières de l’État, des Collectivités territoriales, des opérateurs publics (Banque publique d’investissement, Caisse des dépôts et de conciliation, Investissements d’avenir, réseaux consulaires, etc) ;
 les dépenses et les exonérations fiscales (y compris toutes les niches en faveur des entreprises) ;
 les exonérations de cotisations sociales ;
 toutes les interventions publiques sur différents niveaux économiques bénéficiant directement aux entreprises : investissements, financements de politiques, aides à l’exportation, aides à la recherche ou à l’innovation, etc.

Selon cette base, l’état des lieux (antérieur à la prise en compte du CICE) sur l’année 2013 montre que 110 Mds € d’aides publiques ont bénéficié aux entreprises (dont 6,5 Mds € de la part des collectivités).

Cela représente en particulier 764 interventions économiques différentes de l’État. 73% de ces aides s’effectuent par des exonérations ou dépenses fiscales et sociales. 11% par des subventions.

En coût budgétaire, en ajoutant les aides du Pacte de responsabilité (y compris CICE), les aides publiques aux entreprises représenteraient selon une hypothèse basse (ne tenant pas en compte des aides supplémentaires qui pourraient être attribuées par les collectivités ou décidés par le gouvernement et le parlement, ni des impacts des mesures fiscales dites « de simplification ») plus de 135 Mds € en 2017.

Non seulement le montant des aides publiques aux entreprises est déjà énorme mais il ne cesse de croitre, avec, en face, aucun effet en faveur de l’emploi notamment !

Une évaluation des exonérations de cotisations sociales dès 2015 :

Force Ouvrière a également obtenu que ce nouveau comité poursuive l’évaluation spécifique du CICE.

Sur le programme de travail 2015, nous avons demandé de débuter par les exonérations de cotisations sociales (environ 31 Mds € aujourd’hui, hors Pacte de responsabilité, donc autour de 41 Mds € en 2017) et par une évaluation Crédit d’impôt recherche (CIR, plus importante niche fiscale qui représente presque 6 Mds € chaque année sur le budget de l’État) [3].

Cette proposition de travaux a été retenue. Nous avons donc proposé que l’évaluation des exonérations de cotisations sociales, qui débutera en février (puis une réunion mensuelle), s’effectue en repartant des critères (s’il y en avait) affectés par le texte législatif ou règlementaire à ces exonérations de façon à mesurer si un impact est mesurable sur ceux-ci (notamment s’il s’agissait d’agir en faveur de l’emploi…).

Il est certain qu’une telle évaluation, remontant dès les premières exonérations imposées dans les années 80, permettra des enseignements importants sur l’efficacité (ou, plutôt, sur l’inefficacité) de ces différentes mesures. Le financement de la sécurité sociale en pâtit gravement et leurs effets sur l’emploi sont à dénicher…

Globalement, ce type d’évaluation doit permettre de mesurer la pertinence et les résultats par rapport aux objectifs affichés à l’origine d’une aide publique. Pour Force Ouvrière, cela doit pouvoir conduire à l’arrêter, ou à la réorienter en mieux conditionnant son attribution et en contrôlant strictement son utilisation.

 Voir en ligne  : InFOéco n°98 du 5 janvier 2015 [PDF]

Pascal Pavageau Ex-Secrétaire général de Force Ouvrière

Notes

[1- Voir inFOéco « CICE : une mesure qui a déjà perdu tout crédit » n° 92 du 29 septembre 2014

[2- FO est représentée à ce Comité par Philippe Guimard, assistant confédéral, et Pascal Pavageau, secrétaire confédéral

[3Sur le CIR, cette évaluation devrait s’effectuer en lien avec la Commission nationale d’évaluation des politiques d’innovation fin 2015. Force Ouvrière revendique de nombreuses évolutions du CIR, notamment plus de contrôles, plus de conditionnalité préalable et un élargissement vers le « développement » une fois la recherche aboutie (passer d’une CIR à un CIRD en faveur de la Recherche et du Développement).

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