Contre la réforme des retraites, la mobilisation jusqu’au pied des pistes de ski

InFO militante par Chloé Bouvier, FO UNCP, L’inFO militante

© Laurent COUSIN/HAYTHAM-REA
Article publié dans l’action Réforme des retraites, FO dit stop !

Avec leurs métiers physiques et leurs carrières hachées, les saisonniers des remontées mécaniques seraient touchés de plein fouet par la réforme des retraites. Alors comme des millions de travailleurs, ils sont mobilisés depuis janvier contre le projet du gouvernement. Le 31 janvier, 50 stations avaient déposé un préavis de grève et de nombreux salariés ont débrayé, à l’appel de FO notamment, pour s’opposer à la réforme. Le 7, les saisonniers étaient aussi dans l’action.

Une mobilisation incroyable, se réjouissait Erick Becker au lendemain du 31 janvier, journée nationale d’actions contre la réforme de retraites. Le secrétaire général FO du syndicat des remontées mécaniques et saisonniers (FO-RMDS) notait que, à l’échelle nationale, plusieurs milliers de saisonniers et permanents sont descendus dans les rues en France. Une mobilisation marquée par une forte médiatisation, remarque-t-il. Cela a sans doute amplifié le mouvement dans un secteur où il est peu courant de se mettre en grève ou de débrayer.

En tout, une cinquantaine de stations avaient déposé un préavis de grève, bloquant temporairement les activités dans une période prisée par les vacanciers et les skieurs. Seules les grosses stations étaient concernées. Les plus petites sont déjà en difficultés économiques avec les conditions climatiques actuelles, et notre but n’est pas de fragiliser ces entreprises. À Tignes, dans les Alpes, cinq ou six remontées n’ont pas pu être exploitées sur la quarantaine de la station, du jamais vu.

La mobilisation s’inscrit dans la durée

FO-RMDS, premier syndicat dans les remontées mécaniques avec 53 % des voix, avait déposé, avec une autre organisation syndicale, un préavis de grève illimité pour le 31 janvier. Si les remontées ont fonctionné normalement dès le lendemain, précise Erick Becker, ce préavis visait à respecter les délais légaux pour permettre aux saisonniers de participer à la journée de mobilisation contre la réforme des retraites, le 7 février. Une 3e journée marquée d’ampleur dans les stations avec l’organisation de nombreux débrayages, à la demande des salariés. Et avec explication des débrayages à la clientèle... Pour FO, cet élément de communication est à prendre en compte alors que les sondages soulignent le soutien massif des citoyens à la mobilisation.

Une pénibilité du travail et des carrières hachées

Avec la pénibilité des métiers et les carrières hachés, les saisonniers seront parmi les plus touchés, si la réforme est adoptée, estime Erick Becker. Dans ces métiers physiques et qui exigent souvent de porter des charges lourdes ou d’être réactifs pour secourir des personnes, travailler jusque 64 ans apparaît comme inconcevable. On va maintenir des seniors en permanents alors qu’ils ne pourront plus accomplir les tâches qui leur sont demandées. Et, dans le même temps, on va bloquer les jeunes dans les contrats saisonniers, analyse le militant, pointant l’aberration de la réforme.

Alors que les saisonniers se retrouvent déjà lésés par la réforme de l’assurance chômage, Erick Becker y voit un enjeu une problématique de taille sur laquelle il est nécessaire de se pencher. Comment prendre en compte la particularité de nos métiers, à travers la pénibilité ou l’intersaison, dans les politiques publiques ? Les saisonniers figurent aux premiers rangs des oubliés.

Les dégâts de la réforme de l’assurance chômage

Par leurs slogans, les manifestants évoquent ainsi régulièrement la réforme de l’assurance chômage. Rien d’étonnant. Pour les saisonniers, cette grève contre la réforme des retraites était aussi la seule façon d’être entendus par le gouvernement, alors que cela fait des mois que nous dénonçons la précarisation, avec la réforme du système d’assurance-chômage. Depuis le 1er décembre 2021, la durée minimale de travail pour recharger des droits et percevoir pendant six mois une allocation chômage est de six mois sur les 24 derniers mois.

Selon une étude d’impact de l’Unédic, ce passage à six mois (contre quatre) allait conduire, au cours de la première année d’application de la réforme, à retarder l’ouverture de droits de 475 000 personnes, notamment des jeunes ou des saisonniers, lesquels multiplient les contrats courts. Selon les profils et les parcours, les saisonniers pourraient avoir perdu entre 20 et 30 % du montant antérieur de leur allocation, quand ce n’est pas plus.

Le risque d’une crise de l’attractivité

Face à ces réformes, les métiers saisonniers n’attirent plus. Nombreux se sont reconvertis ou sédentarisé entre 2022 et 2023, témoigne Erick Becker. Et ce alors que, selon Pôle emploi, les saisonniers du tourisme font partie des métiers les plus recherchés. Lui craint pour les années à venir. On perd des compétences que beaucoup de saisonniers ont acquises au fil des années. Cela prendra du temps de former les nouveaux. Mais si ceux-là sont découragés par nos métiers avant même d’y mettre les pieds, on va dans le mur.

Chloé Bouvier

FO UNCP Transports et logistique

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération

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