Mesures contre la pandémie : tour d’horizon international

Coronavirus / International par Evelyne Salamero

Banque centrale européenne © FELIX SCHMITT/The New York Times-REDUX-REA
Article publié dans l’action Coronavirus / Covid19 - Pandémie

Le coronavirus a atteint à des degrés divers plus de cent cinquante pays de tous les continents. Plus de 1,7 milliard de personnes sont appelées à rester confinées chez elles dans plus de cinquante pays, que ce soit dans le cadre de confinements obligatoires (ce qui est le cas dans au moins 34 pays comptant au moins 680 millions d’habitants), de recommandations ou de couvre-feu, selon un décompte réalisé le 23 mars par l’AFP. De nombreuses frontières ont été fermées aux voyageurs. Les mesures économiques se multiplient. Dès le 13 mars, la CSI (Confédération syndicale Internationale) appelait les gouvernements et les employeurs à mettre en place « de toute urgence » des plans de relance économique et à « adopter des mesures pour protéger la santé et les revenus des travailleurs et de leurs familles ».

Alors que la Chine n’avait plus enregistré un seul nouveau cas de coronavirus depuis trois jours dimanche 22 mars au soir, c’est aujourd’hui le reste du monde qui est en alerte maximum face à l’épidémie.

Ce 23 mars, les populations de cinquante pays, soit 1,7 milliard de personnes sont confinées à des degrés divers. Au moins 34 pays ont décidé un confinement obligatoire, général ou partiel en fonction des zones les plus touchées de leur territoire. Ailleurs, les mesures prises vont des recommandations au couvre-feu en passant par les fermetures de lieux publics. À elle seule, l’Inde a confiné au moins 700 millions de personne, soit la moitié de sa population. Plusieurs pays de tous les continents ont fermé leurs frontières aux voyageurs, y compris dans l’Union européenne intra-muros, laquelle avait déjà fermé ses frontières extérieures le 17 mars pour une durée de trente jours.

Parmi les pays ou territoires ayant instauré un confinement obligatoire, on compte notamment la France, l’Italie, la Grèce, l’Argentine, la Californie, l’Irak, le Rwanda, le Népal. La Colombie et la Nouvelle-Zélande l’ont annoncé pour les 24 et 25 mars.

L’Europe, épicentre de la pandémie

La situation est particulièrement tendue en Europe, qui est devenue l’épicentre de l’épidémie selon l’OMS (organisation mondiale de la santé).

L’Italie, où l’épidémie a fait plus de 5000 morts, a annoncé le 22 mars un durcissement du confinement mis en place depuis le 8 mars, avec cette fois l’arrêt de toute activité de production autre que celle « strictement nécessaire, cruciale, indispensable pour garantir les biens et les services », a indiqué le Premier ministre Giuseppe Conte.

En Espagne, deuxième foyer de contamination en Europe après l’Italie avec 2000 morts, le confinement en vigueur depuis une semaine va être prolongé pour deux semaines.

La Grèce, après avoir fermé ses hôtels est passé en confinement général ce 23 mars. Le gouvernement a lancé un appel aux bénévoles pour combattre l’épidémie. L’appel s’adresse aux soignants, mais aussi aux personnels administratifs et techniques. Si le nombre de cas reste pour l’instant faible en comparaison avec d’autres pays (624 contaminés avérés et 17 décès dimanche 22 mars), la population a toutes les raisons d’être inquiète : pour l’heure, 120 lits seulement sont disponibles pour des patients contaminés et réclamant des soins intensifs ont indiqué les autorités. Les services hospitaliers du pays ont en effet particulièrement souffert des plans de rigueur budgétaires imposés ces dix dernières années par la fameuse troïka (Commission européenne, banque centrale européenne et Fonds monétaire international).

Europe, États-Unis : des mesures économiques d’une ampleur exceptionnelle

Mais aujourd’hui la Commission européenne a dû annoncer la suspension du pacte de stabilité qui contraint les États membres de l’Union européenne à contenir leurs déficits publics et leur en deçà de 3% du Pib et leur dette en deçà de 60%.

L’Allemagne a décidé de faire sauter tous ses verrous budgétaires de façon totalement inédite depuis la deuxième guerre mondiale. Le pays prévoit de débloquer 822 milliards d’euros pour faire face aux conséquences économiques de la pandémie et s’endetter à hauteur de 156 milliards d’euros. Ce faisant, l’Allemagne viole sa propre règle constitutionnelle du « frein à l’endettement » pour notamment financer un fonds de secours aux grandes entreprises, avec le cas échéant des nationalisations partielles et provisoires. L’enveloppe doit aussi permettre de financer en partie le recours au chômage partiel qui devrait toucher 2,5 millions de salariés allemands, selon les dernières projections.

Dans la série des mesures inédites, on peut aussi citer l’annonce par le gouvernement du Royaume-Uni d’une prise de contrôle temporaire des lignes ferroviaires du pays pour éviter les faillites à la chute de la fréquentation découlant de la pandémie. L’ensemble des recettes et des pertes liées à l’exploitation des lignes seront ainsi transférées au gouvernement pour une durée initiale de six mois.

Aux États-Unis, où 30% de la population est placée en confinement à des degrés différents, la banque centrale (Fed) a annoncé ce 23 mars ne plus fixer de limites à ses achats de bons du Trésor et de titres hypothécaires. Elle a également lancé un nouveau programme de 300 milliards de dollars pour « soutenir le flux de crédit aux employeurs, aux consommateurs et aux entreprises ».

Ces initiatives ont été prises en attendant la fin d’âpres débats au Congrès entre républicains et démocrates, ces derniers craignant que le plan de relance de l’économie que l’administration du président DonaldTrump propose bénéficie davantage aux employeurs qu’aux salariés américains. Ce plan de 1300 milliards de dollars serait assorti de mesures qui permettraient aux entreprises d’accéder à des prêts pour un montant total de 4000 milliards de dollars, ce qui représente un cinquième du PIB américain. Le congrès a néanmoins d’ores et déjà adopté un plan d’aide sociale de 100 milliards de dollars.

40% de la population mondiale ne peut pas se laver les mains à la maison

Les pays moins développés d’Afrique et d’Amérique Latine sont bien évidemment les plus vulnérables face à la pandémie. Alors que les mesures les plus drastiques se multiplient à travers le monde pour freiner le coronavirus, « trois milliards de personnes n’ont même pas les armes les plus basiques pour se protéger, l’eau courante et le savon », se sont alarmés des experts de l’ONU. L’Unicef estime ainsi que 40% de la population mondiale, soit 3 milliards de personnes, ne peut pas se laver les mains à la maison. Cette proportion monte à 63% en Afrique subsaharienne. Elle s’élève à 22% en Asie centrale et du Sud.

D’ores et déjà, plusieurs pays ont pris des mesures. L’Éthiopie, le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique, a ainsi fermé ses frontières terrestres ce 23 mars, excepté pour les biens jugés essentiels. D’autres avaient déjà pris cette décision, comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire qui ont déjà fermé les lieux publics. Le confinement est d’ores et déjà général en Tunisie et au Rwanda.

En Amérique Latine, après le Venezuela, l’Argentine et le Salvador, la Bolivie est entrée en confinement obligatoire le 22 mars et sera suivie à partir de mardi 24 mars par la Colombie. Au Brésil, l’État de Sao Paulo sera en quarantaine pendant quinze jours à compter de mardi également tandis que le Chili impose un couvre-feu nocturne à partir de dimanche…

C’est désormais dans ce contexte inédit que partout dans le monde les organisations syndicales ont à défendre les intérêts de leurs mandants, en termes de santé mais aussi de droits et de conditions de travail.

Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante