Coronavirus : l’appel des hospitaliers d’Angers en partie entendu

Coronavirus / Covid19 - Pandémie par Clarisse Josselin

© Sébastien ORTOLA / REA
Article publié dans l’action Coronavirus / Covid19 - Pandémie

Le syndicat FO du CHU d’Angers a publié le 1er avril une lettre ouverte adressée aux autorités sanitaires et signée par plus de cinq cents salariés de l’hôpital. Ces derniers exigeaient en urgence du matériel de protection et des tests de dépistage pour faire face à l’épidémie de Coronavirus. Depuis, des masques sont fournis à l’ensemble du personnel et des dépistages se mettent en place. FO demande désormais la réquisition des usines textiles pour fabriquer des masques en quantités suffisantes.

 Si les collègues vont au front, ils ne sont pas de la chair à canon, réagit Emmanuel Dubourg-Davy, secrétaire général du syndicat FO, largement majoritaire au CHU d’Angers. Sur le plan des revendications, on se rend compte que la bagarre que nous menons est utile et a déjà permis d’obtenir des avancées sur les masques et sur les dépistages.

Le syndicat a adressé le 1er avril une lettre ouverte au ministre de la Santé, au préfet du Maine-et-Loire et au directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) des Pays de la Loire. Le courrier a été signé par plus de cinq cents personnels de l’hôpital, tous métiers confondus : infirmiers, aides-soignants, agents de service, médecins, sages-femmes, ambulanciers, brancardiers, laborantins, manipulateurs radio, agents de blanchisserie... Nous demandons des actes, pas des paroles de réconfort, prévenaient-ils. C’est nous qui faisons face aux patients. Nous avons besoin de moyens maintenant. Votre politique qui consiste à ne pas nous donner le matériel nécessaire […] et à ne pas prendre les mesures nécessaires est criminelle.

Dans cette lettre ouverte, les signataires exigent notamment des masques pour l’ensemble des personnels, des tests de dépistage et des produits médicamenteux en quantité suffisante. C’est inacceptable de ne pas nous dépister systématiquement lorsqu’un de nos collègues est déclaré positif au Covid-19 et que nous l’avons côtoyé. Qu’attendez-vous ? Que nous soyons dans la situation de l’AP-HP où d’ores et déjà plus de 1 000 agents sont contaminés ?, indiquent-ils encore. Selon Emmanuel Dubourg-Davy, il y a désormais plus de vingt cas de Covid-19 avérés au service gériatrie de l’hôpital et des personnels sont également touchés dans d’autres services.

Les masques sont devenus obligatoires pour tous

Les salariés exigent aussi que dans les établissements hospitaliers, sanitaires et médico-sociaux, tous les CDD soient titularisés immédiatement pour garantir que tous les effectifs soient maintenus, pour maintenant et pour demain.

Si la région n’est pas encore touchée par la « vague » de l’épidémie, le CHU d’Angers accueille depuis quelques jours des patients venus du Grand Est et de la région parisienne, en délestage. En réanimation médicale pure, nous avons triplé nos capacités en passant de 34 lits à 110 lits, explique Emmanuel Dubourg-Davy. Mais en regard, il faut des infirmiers compétents en réanimation. Pour cela, la direction a fait appel au volontariat chez les infirmiers, avec une formation à la clé.

Elle rappelle aussi les anciens infirmiers de réanimation, en remontant jusqu’à dix ans en arrière. Les personnels travaillent douze et le plus souvent treize heures d’affilée, avec des prises en charge lourdes, remarque le militant, évoquant aussi les procédures dégradées liées au manque de médicaments et de matériel. On est dans une médecine de guerre, appuie-t-il.

Malgré tout, les revendications du personnel commencent à être entendues, notamment sur la question des masques. Au départ, les masques ce n’était pas pour tout le monde, ils étaient interdits même dans certains accueils ou services faute de stocks suffisants, explique le secrétaire général du syndicat FO du CHU. Juste après la publication de la lettre, nous avons reçu une note d’information disant que les masques devenaient obligatoires pour tous dès lors qu’il y avait contact entre deux personnes. C’est un revirement considérable.

Les sur-blouses à usage unique envoyées en blanchisserie

Cependant, les envois de la réserve nationale s’avèrent insuffisants et les personnels doivent composer avec des niveaux de protection variables. Il y a une fabrication maison de masques, poursuit-il. On utilise aussi des stocks de 2001 et de 2009, mais sur certains la mousse s’effrite. Le chef de l’État a promis des masques pour fin avril mais ils ne sont encore ni fabriqués, ni livrés. Or, c’est maintenant qu’on en a besoin. Et on n’est pas encore dans la vague de l’épidémie. C’est pourquoi FO demande la réquisition d’usines textiles pour fabriquer des masques ainsi que des sur-blouses.

Nous ne comprenons pas pourquoi l’État n’a pas encore donné son feu vert, insiste-t-il. On en est à envoyer nos sur-blouses en papier à usage unique à la blanchisserie pour les retraiter un peu, on n’a pas d’autre choix.

Emmanuel Dubourg-Davy se félicite de la mise en place progressive de prêts de matériel médical de la part d’établissements privés.

Autre avancée sur les revendications, une tente de dépistage pour des tests sur les soignants a été montée. Un système de drive-in a été mis en place. Mais pour l’instant, c’est réservé aux soignants qui ont les trois symptômes marqués, la toux, la fièvre et les difficultés respiratoires, dénonce le militant. On demande le dépistage de tout le monde dans les services touchés et le confinement des malades. Sinon qui sera présent demain pour aller travailler ?

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante