Pour les salariés de la Fondation Bon Sauveur dans la Manche, la mobilisation du 7 novembre pour les salaires prend la forme d’une deuxième étape. Cette institution de droit privé à but non lucratif gère des structures relevant des secteurs sanitaire, médico-social et social. Force Ouvrière, premier syndicat au sein des établissements, a déposé un préavis de grève reconductible. Nous n’avons eu aucune réponse de la direction, bien que nous ayons déposé ce préavis depuis plus de dix jours
, constate amèrement Frédéric Cousin, délégué syndical FO Bon Sauveur.
La revendication de cette grève est unique : l’augmentation des salaires. Cela fait trois ans que nous n’avons pas signé d’accord dans le cadre des négociations annuelles obligatoires !
, dénonce le militant. L’année dernière, la direction ne nous a même pas présentés d’accord, arguant qu’il n’y avait, de toute façon, pas les moyens financiers nécessaires. Nous exigeons l’ouverture de négociations sur le sujet.
La continuité d’une mobilisation précédente
Il nous faut créer un rapport de force, c’est comme ça que cela marche
, martèle Frédéric Cousin. Il se souvient ainsi de la dernière mobilisation au sein de la Fondation, en juin dernier. À l’initiative du collectif du 5 mai, né d’une pétition qui avait rassemblé près de 300 signataires, les préavis de grève avaient été déposés par FO. Après deux rassemblements, les salariés avaient obtenu quelques avancées, notamment le versement d’une prime de 500 euros et le financement de formations en interne. Mais loin encore d’une augmentation des salaires.
Or, la revendication salariale actuelle se comprend d’autant plus que l’État a annoncé bloquer toutes négociations nationales jusqu’à la fusion des conventions collectives CCNT 66 et CCNT 51, qui n’interviendrait pas avant 2025. Alors que Force Ouvrière s’oppose fortement à ce projet de fusion, dénonçant le risque d’une convention unique au rabais, les salariés voient leurs fiches de payes grignotées par l’inflation. Au mieux, l’État nous a annoncé que la hausse de 3,5 % pour la fonction publique sera reportée sur nos salaires. Mais avec seulement +1,5 % en 2022, et 1,5 % en 2023. Nous sommes loin, très loin du compte
, alors que la hausse de prix à la consommation s’établit à 6,2% sur un an en octobre 2022 (selon les données provisoires).
La tentation d’un fonctionnement lucratif
La salariale est d’autant plus importante que l’insatisfaction se voit renforcée par une dégradation permanente des conditions de travail dans ce secteur par manque d’effectifs
, pointe l’UNSFO (Union de la Santé privée FO) dans un communiqué de soutien. Ce n’est plus à prouver, les secteurs du sanitaire et du social souffrent d’un manque d’attractivité important. Chez les soignants, dans le public, on compte 15 % à 30 % de postes vacants. En cause : les mauvaises conditions de travail et les rémunérations trop basses. C’est encore pire dans le secteur du privé. A diplôme égal, avec autant d’ancienneté et pour le même métier, les soignants du public gagnent 500 euros net mensuels en plus
, illustre Frédéric Cousin.
Dans ce contexte, la direction de la Fondation travaille à d’autres modes d’organisation, dans le but d’optimiser les effectifs (et évidemment les coûts). Il a été évoqué que nous pourrions passer en 12 heures, contre le système en 3x8 actuel, explique le délégué syndical. Mais c’est impossible de travailler 12 heures d’affilée dans notre secteur de la psychiatrie et de handicap mental.
Il déplore également que la fondation ait de plus en plus un fonctionnement lucratif. Au sein de la direction, plus personne ne vient du soin. Certains viennent de la gendarmerie ou du secteur des banques. Ça veut dire beaucoup.