Éducation : les militants FO mobilisés pour la défense du Bac

InFO militante par Chloé Bouvier, L’inFO militante

Conférence pour le rétablissement du baccalauréat national dès 2022, le 4 février 2022 à la Confédération Force Ouvrière. Organisée par la Fédération nationale de l’enseignement de la culture et de la formation professionnelle FO. Photos : F. Blanc

Quelque 150 militants de la FNEC FP-FO et du SNFOLC se sont réunis avec aussi des militants d’autres organisations syndicales, le 4 février au siège de la Confédération à Paris. Objectif : exiger l’abrogation du nouveau baccalauréat, initié par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Cette réforme accentue la mise en concurrence des établissements, dégradent les conditions de travail des personnels et angoissent les élèves, ont souligné les personnels dans leurs nombreuses interventions à la tribune.

C’est une demande ancienne et qui s’impose avec encore plus de force en ce début d’année : le nouveau baccalauréat, initié par le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, doit être abrogé. Le 4 février, c’est ce que les militants FO mais aussi d’autres organisations syndicales ont exprimé. Ils étaient 150 au siège de la confédération à participer à la conférence organisée par la fédération FO de l’Éducation, la FNEC FP-FO et son syndicat des lycées et collèges, le SNFOLC. Des militants FO mais aussi du SNES et SUD, ainsi que des associations de professeurs spécialistes comme l’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public (APPEP), l’Association des professeurs de biologie et de géologie (APBG) et l’association des professeurs de sciences économiques et sociales (APSES)

Il s’agit de défendre le caractère national de ce diplôme, a souligné le secrétaire général de FO Yves Veyrier devant les militants. Cette défense, c’est aussi celle de la reconnaissance des qualifications professionnelles et donc des salaires. Depuis cinq ans, les réformes ont conduit à la fin des séries S, L et ES, remplacées par des enseignements de spécialités, au nombre de 3 en première et 2 en terminale. Autre nouveauté de ce bac : la mise en place du contrôle continu et des épreuves au mois de mars. Objet déjà d’une opposition forte avant sa mise en œuvre en septembre 2019, ce système a été plusieurs fois réajusté et pas seulement à cause de la pandémie !

Déjà 14 000 signatures pour la pétition intersyndicale

Au fil des sessions, les enseignants et lycéens se sont mobilisés contre ce nouveau bac, facteur de désorganisation et d’inégalités. En pleine grève illimitée pour les retraites, ils se sont retrouvés devant les établissements afin de bloquer les épreuves communes en contrôle continu, rappelle Edith Bouratchik, secrétaire générale du SNFOLC. Pour les militants, la mobilisation doit se poursuivre, d’autant plus deux semaines après la grève historique du 13 janvier qui a contraint le ministre à reporter les épreuves de spécialités de mars au mois de mai. Nous avons ouvert une brèche, à nous de le faire reculer !, martelait Édith Bouratchik, sous les applaudissements.

A à la tribune, le constat s’est fait unanime : les enseignants ont montré leur opposition à ce nouveau baccalauréat. Dans mon établissement, je ne vois pas un seul collègue en faveur de cette réforme, témoigne une militante d’Amiens. Même ceux qui soutenaient la réforme, ou attendaient de voir ce qu’elle allait donner, le reconnaissent : elle n’est pas tenable. La contestation est large : plus de 14 000 personnes ont signé la pétition intersyndicale (Bac 2022, pour le report en juin des épreuves de spécialité), toujours en cours. Dans sa déclaration finale, la Conférence appelle les personnels à signer massivement cette pétition, et à se réunir pour adopter des prises de positions, dans l’unité la plus large, et discuter des initiatives pour rétablir le baccalauréat national.

Une mise en concurrence à tous les niveaux

Ce baccalauréat qualifié de « low cost » et son caractère local accentue la mise en concurrence, que cela soit entre les élèves, les disciplines et les établissements. On le voit, certains lycées demandent aux enseignants de rajouter des points à leurs élèves, témoigne Laurent Hoffman, militant à Metz et professeur d’histoire-géographie. Ce projet libéral vide un peu plus de sa substance l’école publique au bénéfice du privé. Et la tendance actuelle est déjà lourde : les établissements privés sont devenus un véritable marché économique. Plus largement, les établissements ne sont pas tous sur un même pied d’égalité. Le ministre de l’éducation évoquait le caractère égalitaire de cette réforme. Mais, face aux problèmes de remplacement des professeurs absents, tous les élèves n’ont pas les mêmes conditions de préparation de ce bac, soulignait une militante de Créteil, listant les effectifs d’enseignants absents dans de nombreux établissements de l’académie.

Dans les salles de professeurs, les discours aussi ont changé s ont témoigné nombre de militants FO. Comment se fait-il qu’autant de tes élèves gardent ta matière comme spécialité en terminale ? Que dis-tu aux Secondes pour qu’ils choisissent ton enseignement de spécialités ?, assure Sylvie de l’académie d’Amiens. Et cette réforme a des conséquences sur les postes. Concernant l’enseignement des mathématiques, que fuient beaucoup d’élèves, on note la diminution du nombre de postes. On ne se bat plus seulement pour notre enseignement mais aussi pour nos heures de travail et notre métier, souffle un participant à la sortie de la conférence.

La liberté pédagogique mise à mal

La mise en place du contrôle continu a aussi chamboulé le rapport que les enseignants entretiennent avec leurs élèves. Avec la crise sanitaire actuelle et les absences des élèves, beaucoup n’ont pu prendre en compte que deux notes par trimestre. Où est le contrôle continu là-dedans ?, s’interroge Benoît, de Limoges. Cette réforme, c’est une usine à gaz qui met tout le monde sous pression. Face aux élèves stressés pour leur bac, les enseignants font face à des négociations pour chaque note. On subit une pression pour la notation des copies, témoigne Laurent, de Metz. À la fois des élèves, de leurs parents mais aussi parfois de notre propre hiérarchie qui n’a pas d’intérêt à ce que les élèves aient de mauvaises notes pour le bac. Tout cela limite notre liberté pédagogique.

Nombreux sont les profs qui constatent le stress de leurs élèves, dès la seconde. À 15 ans à peine, ils doivent choisir des enseignements qui vont peser dans leur orientation post-bac, mais sans qu’ils ne sachent vraiment ce qu’ils veulent faire comme études, s’indignent les militants. Lesquels notent que dans le même temps, l’Éducation nationale casse le service public d’orientation au profit d’initiatives issues du privé.

Beaucoup de nos collègues sont confrontés, plus qu’avant, à des élèves qui craquent et s’effondrent en pleurs devant eux. Ils ne savent pas répondre à leurs questions d’orientation. Les psychologues de l’Éducation nationale sont en sous-nombre par rapport à la demande. Eux aussi constatent davantage d’angoisse chez les jeunes. Les services pédopsychiatriques sont saturés… Et ajoutez à cela le stress dû à la procédure Parcoursup, fulmine un militant de Bordeaux.

Le nouveau bac comme élément de sélection à l’université

Car ces réformes du lycée et du baccalauréat s’intègrent dans un ensemble plus grand. Et on l’a vu récemment avec le report des épreuves de spécialité en mai qui a induit des interrogations quant aux dossiers Parcoursup. Lorsqu’on bouge un élément, il faut tout enlever car tout est lié, contextualise Muriel, venue de Tours. En effet, les notes de première et terminale, à fortiori celles des spécialités, seront prises en compte pour les formations de l’enseignement supérieur lorsque celles-ci évalueront les dossiers des candidats dans le cadre de la procédure Parcoursup. Cette procédure ne fait qu’organiser la sélection à l’université pour masquer le manque de places dans ces formations, commente une militante entre deux passages à la tribune.

Dans la loi, le bac est le droit d’entrée à l’université. Mais, avec Parcoursup, et l’austérité qui ne permet pas d’ouvrir assez des places dans les établissements publics, des considérations budgétaires prévalent sur ce droit !, s’indigne Sylvain Excoffon, de FO-ESR. Et la tendance s’accentue encore et toujours : après la licence, la sélection se fait maintenant en master. Le gouvernement va ouvrir un Parcoursup pour l’entrée en master, où, là aussi, on n’augmente pas les places alors qu’il y a davantage de candidats. Et, dans leurs dossiers, ces derniers devront faire valoir plus que leurs connaissances académiques puisqu’ils devront joindre un CV et une lettre de motivation. Bien évidemment, cette plateforme répertoriera aussi les formations privées, qui seront donc au même niveau que celles du public...

En réponse ont souligné les militants FO lors de la conférence, le 4 février, la mobilisation ne peut être qu’importante et rejoindre les luttes de l’Enseignement supérieur, mais aussi celles des écoles et collèges ou encore le combat pour la défense du statut et de la rémunération des enseignants.

 

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Chloé Bouvier

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération