En Polynésie, la CSTP-FO aux côtés des salariés pour la défense de leurs droits

Les articles de L’InFO militante par Valérie Forgeront, L’inFO militante

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Vu de la métropole, évoquer Tahiti c’est à coup sûr fantasmer sur une vie de rêve... Cependant, dans l’archipel de Polynésie, dans le Pacifique sud, l’actualité sociale bat vite en brèche les poncifs. Et la confédération syndicale des travailleurs de Polynésie Force-Ouvrière, la CSTP-FO, qui doit tenir son IXe congrès le 24 février prochain, en sait quelque chose, engagée chaque jour dans la défense des salariés.

Comme dans l’Hexagone, les travailleurs, avec la CSTP-FO, luttent pour leurs droits et donc contre le projet de réforme des retraites. Des manifestations ont eu lieu ces derniers jours. Comme dans l’Hexagone, ils cherchent aussi à améliorer leurs conditions de travail, leurs salaires et à revaloriser les emplois. Ils ont dû ainsi récemment exiger par la grève un meilleur budget pour le centre hospitalier (CHPF) de Taaone. Après d’âpres négociations, un protocole d’accord a été signé le 20 janvier.

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De même, depuis la crise Covid, FO a accompagné des salariés luttant contre la pratique d’employeurs voulant imposer des congés payés pendant le confinement. Après une longue procédure, une affaire dans une entreprise de Papeete vient d’aboutir. Par son arrêt rendu le 8 décembre dernier, la Cour d’appel est on ne peut plus claire : l’entreprise n’avait pas à imposer ces congés. Elle a condamné l’employeur à payer des dommages et intérêts à deux salariés pour 19 jours de congés imposés au printemps 2020.

Dans un archipel célèbre pour son monoï, produit à base de fleurs de tiaré et dans lequel prend part aussi l’huile de coprah, issue de la noix de coco... Un autre exemple de combat syndical. Une affaire illustre, s’il le fallait, la dureté des relations entre salariés et employeurs. La CSTP-FO est ainsi aux manettes pour défendre seize salariés qui ont fait un mois de grève et luttent toujours pour défendre leurs droits.

Que l’employeur applique la décision de justice !

L’affaire commence mi-2022 quand l’huilerie de Tahiti qui traite le coprah arrivant des îles de l’archipel par bateau décide que le coût du prestataire, Téhihira, avec lequel elle entretient une convention de prestation de service pour la manutention et le transport des noix de coco, du bateau à l’usine, est trop pesant. Elle s’adresse à l’assemblée territoriale et obtient une subvention de 30% visant à la soutenir dans l’achat de coprah. L’huilerie qui est une sorte d’ovni juridique, étant société commerciale mais avec un seul client : le pays explique la CSTP-FO, décide toutefois de mettre fin aux services de Téhihira. Mais, précise FO, elle rassure les seize salariés concernés de cette entreprise : leurs contrats seront repris par la société TRE, laquelle va être le nouveau prestataire. Cependant, pour les salariés concernés, les ennuis commencent. Quand TRE, qui a racheté des biens matériels de Téhihira (camions, engin élévateur, ...) et occupe le même local, reprend les salariés, ces derniers découvrent que c’est en CDD, avec une baisse du taux horaire et sans ancienneté, alors que certains affichaient dix-sept ans dans l’entreprise précédente.

Colère des salariés qui, soutenus par FO, se mettent en grève le 16 décembre dernier exigeant que le passage de leurs emplois de Téhihira à TRE soit bien qualifié comme un transfert de leurs contrats, donc avec le même niveau de salaire, le même type de contrat et leurs acquis d’ancienneté. Ce que confirmera la justice le 17 janvier, soulignant le transfert de plein droit de ces contrats depuis le 14 novembre. Le juge (du tribunal de travail, Ndlr) a donné raison aux salariés, indique la CSTP-FO qui était représentée chez Téhihira. Les mandats syndicaux ont été transférés chez TRE précise-t-elle. Mais l’affaire ne se résout toujours pas tandis que le juge a prononcé une exécution provisoire, concrètement l’application immédiate et dans les règles de l’art de ces transferts. L’employeur ne s’y soumet pas. Et parallèlement, il mène une action au civil sur la question de licéité de la grève.

FO a demandé qu’une astreinte soit ordonnée contre l’employeur

Quand celle-ci prend fin, le 16 janvier, les salariés se rendent pour leur travail, au port, prêts aux tâches de manutention et de transport du coprah. Mais l’employeur ne veut pas les reprendre et a recours à d’autres salariés en CDD. On est donc repartis en référé pour obtenir une astreinte précise Bénédicte Renaud de la Faverie, juriste, permanente syndicale à la CSTP-FO et qui suit cette affaire dans laquelle l’employeur multiplie les pourvois en appel. FO demande qu’une astreinte d’un million de francs pacifique (environ 8346 euros) soit prononcée contre l’employeur par jour de retard dans la non-reconnaissance et le transfert des contrats. Si les salariés (quatre des seize ont refusé) ont pu reprendre le travail, chez TRE le 27 janvier, ils sont employés pour l’instant aux conditions de TRE. Et ce moins-disant social a un lourd impact. Ces salariés à temps partiel perçoivent un salaire autour de 800 euros/mois, ils ont perdu environ 500 euros/mois indique la militante.

La justice doit se prononcer ce 30 janvier concernant l’astreinte demandée par FO. Quant à la licéité de la grève, question portée devant la justice par l’employeur, la décision du tribunal sera connue le 6 février.

Le 31,comme en métropole, les salariés de Polynésie seront dans les rues pour dire non à la réforme des retraites, comme ils l’ont été le 19.

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Valérie Forgeront Journaliste à L’inFO militante

L’inFO militante Le bimensuel de la Confédération