Le licenciement pour faute grave entraîne le congédiement du salarié avec effet immédiat, sans indemnité de préavis, ni de licenciement. A la différence du licenciement pour faute lourde, la faute grave ne suppose pas l’intention de nuire à l’employeur. La faute lourde se définit comme une faute d’une exceptionnelle gravité révélant l’intention de nuire à l’employeur. Elle emporte éventuellement l’engagement de la responsabilité contractuelle du salarié.
En cas de faute grave, le salarié peut prétendre à l’indemnité compensatrice au titre des congés payés acquis non pris à la date de la rupture. L’indemnité de non-concurrence est également due même en cas de faute grave : la contrepartie financière de la clause de non-concurrence étant une condition de sa validité, le bénéfice de cette indemnité ne peut pas être subordonné à l’absence de faute grave ou lourde
(Cass. soc., 10-12-08, n°06-45544).
L’appréciation de la faute grave n’est pas laissée par la Cour de cassation aux juges du fond, contrairement à l’appréciation du caractère réel et sérieux de la cause du licenciement. Autrement dit, la Cour de cassation exerce son contrôle sur la qualification de la faute grave.
Pour l’appréciation de la gravité de la faute, les juges doivent tenir compte de tous les éléments qui leur sont soumis. Pour autant, la preuve des faits fautifs repose uniquement sur l’employeur. Autrement dit, la charge de la preuve de la faute commise par le salarié pèse sur l’employeur.
L’employeur doit fournir aux juges les preuves sur lesquels il s’est fondé pour prononcer la sanction ou le licenciement. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le juge forme sa conviction. Il peut au besoin ordonner toutes les mesures d’instruction qu’il estime utile. Au final, si un doute subsiste, il profite au salarié (art. L 1333-1 du Code du travail).
La qualification de faute grave par l’employeur dans la lettre de licenciement peut être transformée par les juges en cause réelle et sérieuse. Mais si le juge peut atténuer le degré de gravité de la faute lorsqu’un salarié a été licencié pour faute grave, il ne peut pas décider que le motif de licenciement repose sur un motif autre que disciplinaire. Le juge ne peut également pas aggraver la faute invoquée dans la lettre de licenciement.
Lorsque le juge considère que le licenciement prononcé est « sans motif réel et sérieux » (c’est-à-dire lorsqu’il considère qu’il est injustifié), le salarié peut prétendre à sa réintégration dans l’entreprise ou, à défaut d’accord des parties pour cette réintégration, au versement d’une indemnité fondée sur le barème de l’article L 1235-3 du code du travail.
Le licenciement injustifié doit être distingué du licenciement irrégulier (c’est-à-dire qui ne respecte pas la procédure de licenciement). Si le juge constate une irrégularité de forme dans la procédure de licenciement, il accorde au salarié une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire (art. L 1235-2 du code du travail). Par exemple, l’absence d’entretien préalable ne saurait avoir pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux, il n’ouvre droit qu’à une indemnité pour irrégularité de procédure.
La faute grave se définit comme la faute résultant d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié personnellement, le ou les faits incriminés doivent constituer une violation d’une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline de l’entreprise et enfin elle doit rendre impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Autrement dit, la mise en œuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs et dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire. Attention, le fait pour un employeur de laisser s’écouler un délai entre la révélation des faits et l’engagement de la procédure de licenciement ne peut avoir pour effet de retirer à la faute son caractère de gravité, dès lors que le salarié, dont le contrat de travail est suspendu, est absent de l’entreprise (Cass. soc., 9-3-22, n°20-20872).
Dans la plupart des cas, l’employeur prononce une mise à pied conservatoire le temps de la procédure de licenciement.
Ainsi, la faute grave ne peut être prononcée lorsque l’employeur a accepté que le contrat de travail se poursuive pendant la durée du préavis, même sous un contrôle particulièrement strict. La faute grave ne peut également être reconnue si l’employeur reconnaît expressément au salarié son droit à préavis, même s’il a été dispensé de l’exécuter. Par contre, il demeure possible de payer un préavis et des jours de mise à pied conservatoire sans que soit remise en cause la gravité de la faute commise.
Sauf dispositions particulières, la faute grave ne suppose pas une mise en garde antérieure ou un avertissement préalable.
Même lorsqu’il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut causer à celui-ci, en raison des circonstances vexatoires qui l’ont accompagné, un préjudice dont il est fondé à demander réparation.
Autrement dit, même si le licenciement pour faute grave est justifié, le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts s’il démontre que son licenciement s’est effectué dans des circonstances vexatoires (Cass. soc., 16-12-20, n°18-15532). Dans une telle circonstance, on dit que le licenciement est justifié mais abusif. Lorsque le licenciement est exercé par l’employeur avec une intention de nuire, c’est-à-dire soit de façon brutale, humiliante, contraire à la dignité, vexatoire ou injurieuse, soit par contrainte physique ou morale, le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts, ces indemnités n’étant pas plafonnées contrairement aux indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ces indemnités pour licenciement vexatoire peuvent éventuellement se cumuler avec des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de licenciement injustifié. Un comportement abusif ou vexatoire de la part de l’employeur peut autoriser le tribunal à ordonner la publication par voie de presse de la décision condamnant l’employeur.