Faute lourde : à ne pas prendre à la légère

Juridique par Michel Pourcelot

Être licencié pour une faute lourde peut entraîner des conséquences financières, mais la charge de la preuve revient alors au plaignant et c’est aux juges du fond d’apprécier les éléments apportés. Cette faute lourde peut être distincte de celle ayant conduit au licenciement, comme par exemple une faute grave.

C’est ce qu’a rappelé la Cour de cassation le 25 janvier 2017 dans une décision publiée au Bulletin (Cass. soc., 25 janvier 2017, n°14-26.071). En l’espèce, un conducteur de poids lourd avait conduit sans permis valable, faute de renouvellement de son certificat médical d’aptitude. Le chauffeur avait continué à conduire pendant un mois malgré l’obligation de produire un permis valable à son employeur à chaque remise de bulletin de paie mensuel. Il avait fini par régulariser sa situation, mais l’entreprise ayant découvert le fait l’avait alors licencié pour faute grave. Et lui avait réclamé 2 500 euros de dommages-intérêts pour avoir exposé délibérément l’employeur aux conséquences gravissimes de la conduite d’un véhicule poids lourd de l’entreprise par un conducteur dépourvu de permis valable.

C’est le nombre de types de fautes pouvant donner lieu à un processus de licenciement : faute simple, grave ou lourde.

La Cour de cassation a d’abord souligné que le salarié avait été licencié pour une faute grave et que la demande de dommages-intérêts ne s’appuyait pas sur d’autres faits distincts que ceux présentés dans la lettre de licenciement. Elle a donc pour ce motif cassé l’arrêt de la cour d’appel, qui n’avait pas retenu l’existence d’autres faits susceptibles de caractériser une faute lourde. La Haute juridiction a également rappelé que la faute lourde était principalement caractérisée par l’intention de nuire à l’entreprise. La cour d’appel n’ayant pas constaté cette intention, elle a ainsi violé l’article L. 1222-1 du Code du travail. Elle a aussi violé l’article L. 4121-1 du même code en considérant que l’employeur avait satisfait à ses obligations, et donc à son obligation de sécurité, en se bornant à demander au salarié de lui présenter son permis de conduire à la remise de chaque bulletin de paie sans tirer aucune conséquence de la non-présentation du permis de conduire

 

Nota bene : Les congés payés versés malgré la faute lourde
L’indemnité compensatrice de congés payés (ICCP) doit désormais être versée même en cas de licenciement pour faute lourde, depuis la décision du Conseil constitutionnel de mars 2016 qui a jugé inconstitutionnelle, pour rupture du principe d’égalité devant la loi, une disposition du Code du travail qui prévoyait le contraire. La modification a été reprise dans la loi Travail.

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante