FO dénonce des licenciements financiers chez Néovia

Emploi et salaires par Clarisse Josselin

Débrayage du 3 juillet 2019 à Saint-Nolff. © UD-FO 56

Le groupe américain ADM entend supprimer 127 postes chez Neovia, leader de la nutrition animale, pourtant bénéficiaire. Les élus FO, qui jugent inacceptables les premières propositions de la direction, ont appelé avec la CFDT les salariés du site de Saint-Nolff à débrayer le 3 juillet.

Près de 300 salariés ont débrayé le 3 juillet durant 45 minutes à l’appel d’une intersyndicale FO-CFDT sur le site Néovia de Saint-Nolff, dans le Morbihan, contre la suppression de 127 postes. C’était la première mobilisation d’ampleur dans l’histoire de l’entreprise. Le groupe Néovia est l’un des leaders mondiaux de la nutrition animale. Présent dans 26 pays pour un chiffre d’affaires de 1,7 milliard d’euros, il compte 8 950 collaborateurs dans le monde, dont 1180 en France.

Il a été cédé en février dernier par InVivo, premier groupe coopératif agricole français, au groupe américain ADM. Le 18 juin, quelques mois à peine après son acquisition, le repreneur a annoncé la suppression de 127 postes dans les fonctions support, dont 61 CDI chez Néovia SAS (sur 357) et 26 CDI dans la filiale Sermix. S’ajoutent des CDD, des postes d’apprentis et des postes vacants. Ces emplois seront délocalisés vers les centres ADM en Pologne, Allemagne, USA et Suisse.

Les élus FO dénoncent des licenciements purement boursiers. Il y a eu 106 millions d’euros d’Ebitda l’an dernier et les prévisions sont à la hausse, explique Erwan Mahévo, délégué FO chez Néovia SAS. De son côté, la fédération FGTA-FO dénonce la mise en application d’une politique ultra-libérale pour réduire les coûts sans penser au savoir-faire perdu dans une entreprise bénéficiaire.

Une prime de 8 000 euros pour les départs volontaires

Selon l’accord de méthode signé par FO, la négociation du PSE doit être bouclée pour le 10 septembre chez Néovia SAS, un peu plus tard chez Sermix. Les élus FO jugent les premières propositions patronales inacceptables et même ridicules pour une entreprise internationale. Elles s’élèvent à 8 000 euros pour les départs volontaires, quelle que soit l’ancienneté, et 4 000 euros pour la formation. Le congé de reclassement est limité à 8 mois et payé à 70% du salaire brut.

On ne peut pas laisser faire ça, il y a déjà eu un plan social dans les Yvelines avec de meilleures conditions de départ, dénonce Erwan Mahévo. La direction estime qu’ici on est mieux formés et avec de plus gros salaires. Je me suis emporté. Je travaille à la comptabilité, mon boulot part en Pologne, et je ne touche pas un gros salaire. J’ai quitté la salle et tout le monde m’a suivi.

Les négociations ont repris le 9 juillet et n’ont permis qu’une petite avancée sur la formation. FO revendique notamment 15 mois de salaire pour le reclassement (18 mois pour les plus de 50 ans) et une prime de départ volontaire de 70 000 euros.

Absence de vision stratégique

Erwan Mahévo rappelle que Néovia a reçu plusieurs millions d’euros d’aides publiques pour la construction d’un laboratoire et de la maison de l’innovation. Je fais le tour des politiques, on ne peut pas toucher de l’argent public et derrière supprimer des emplois et ne même pas mettre d’argent dans le PSE, tempête-t-il. Il rappelle aussi que le groupe ADM n’a pas de problèmes financiers. Ils nous ont achetés 1,6 milliard d’euros cash, sans faire d’emprunt, souligne-t-il.

Contrairement à Sermix, Néovia SAS n’a encore jamais connu de plan social. On s’est bien développés il y a trois ans, la question à l’époque était plutôt le manque de bâtiments pour accueillir tout le monde, on a un gros sentiment de gâchis, poursuit-il.

L’élu FO dénonce aussi le manque de vision stratégique du repreneur. Des postes sont supprimés dans la recherche alors que c’est elle qui nous différencie de nos concurrents, explique-t-il. On voit déjà arriver les chasseurs de tête qui s’intéressent aux bons éléments. On ne parle qu’à des financiers, ils ne nous comprennent pas quand on parle d’innovation. Ils ne voient qu’à court-terme.

Craintes d’une deuxième vague de licenciements

Erwan Mahévo redoute que ce plan social ne soit qu’une première étape avant une deuxième vague de licenciements. On a des usines partout dans le monde et ADM veut s’organiser par régions, poursuit-il. On risque d’être démantelés pour alimenter des pôles régionaux d’activité. Et après, on nous reprochera de ne pas être rentables.

La FGTA-FO rappelle de son côté que jusqu’au rachat par ADM, Néovia dégageait de larges bénéfices et se développait à l’international grâce à des acquisitions externes. Les dirigeants d’ADM remettent en cause ces orientations stratégiques et envisagent des restructurations des usines Premix et du laboratoire Upscience d’ici peu.

La prochaine réunion de négociation est prévue le 17 juillet.

Clarisse Josselin Journaliste à L’inFO militante