Fonctionnaires : un projet d’ordonnance prépare déjà les suppressions d’emplois

Alerte par Evelyne Salamero

Manifestation des personnels soignants et du service public à Paris le 7 mars 2017. Photographie : F. Blanc (CC BY-NC 2.0)

Le projet d’ordonnance gouvernementale visant à modifier les règles de la mobilité des fonctionnaires a fait l’unanimité des organisations syndicales contre lui lors de la réunion plénière du Conseil commun de la fonction publique, lundi 6 mars. Il a du coup été retoqué par l’instance consultative. FO explique comment ce projet prépare le terrain à des suppressions d’emplois massives.

Parmi les exigences des nombreux autres fonctionnaires qui ont rejoint la mobilisation nationale initiée par leurs collègues hospitaliers le 7 mars, figurait celle du retrait du projet d’ordonnance gouvernementale destiné à favoriser la mobilité à l’intérieur de chaque fonction publique et entre les trois fonctions publiques.

Ce projet, explique l’Union Interfédérale des Agents de la Fonction Publique FO (UIAFP-FO) vise à transformer les fonctionnaires exerçant des missions spécifiques en agents polyvalents et interchangeables.

Alors même que le thème des suppressions d’emploi de fonctionnaires ne cesse d’être remis sur le tapis dans le cadre de la campagne aux élections présidentielles, le gouvernement sortant veut modifier le statut général de la fonction publique pour, souligne FO, déplacer plus facilement les fonctionnaires dont l’emploi serait supprimé.

Le statut général : le verrou que le gouvernement veut faire sauter

A l’heure actuelle, la Fonction publique, dans ses trois versants (d’État, hospitalière et territoriale), est organisée de façon à ce que chaque fonctionnaire exerce les missions pour lesquelles il a été recruté et formé, ce qui est aussi d’ailleurs pour l’usager une garantie de la qualité du service rendu.

Si le poste occupé par le fonctionnaire est supprimé, celui-ci perd l’emploi lié à ce poste, mais il conserve son grade, c’est-à-dire son niveau hiérarchique. C’est le fameux principe de séparation du grade et de l’emploi sur lequel repose toute la structure actuelle de la Fonction publique française.

Le grade du fonctionnaire dépend de son ancienneté, son expérience, sa qualification et sa responsabilité, acquises et développées à l’intérieur du corps ministériel dans lequel il a été recruté. Voici quelques exemples de corps : le corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne, le corps des ingénieurs des travaux publics de l’État, le corps des professeurs agrégés, le corps des professeurs des écoles (instituteurs), le corps des éducateurs de jeunes enfants, le corps des auxiliaires de puériculture, le corps des infirmiers… Dans la fonction publique territoriale, le corps est appelé cadre d’emploi.

Autant dire que ce système freine encore considérablement la possibilité de faire faire n’importe quelle tâche à un fonctionnaire dont l’emploi a été supprimé.

C’est précisément ce verrou que le gouvernement cherche à faire sauter aujourd’hui, alors que ces dispositions du Statut général des fonctionnaires sont, souligne l’UIAFP-FO, un frein aux restructurations et aux suppressions massives d’emplois dont il est tant question aujourd’hui.

La mobilité forcée en catimini

Le projet d’ordonnance (article 1er) prévoit ainsi très clairement des passerelles entre au moins deux des trois fonctions publiques. Il stipule en effet que des nominations ou des promotions dans un grade pourront être prononcées pour pourvoir un emploi vacant dans l’un des corps [fonction publique d’État, NDLR] ou cadre d’emploi [terme réservé à la territoriale pour désigner les corps, NDLR] régi par des dispositions identiques.

De plus, l’article 4 de l’ordonnance modifie le titre II du statut général pour les fonctionnaires de l’État en établissant que le seul changement de service, du département ministériel ou d’établissement public par un fonctionnaire ne constitue pas un changement de la situation de l’intéressé au sens du présent article. En clair, la mobilité du fonctionnaire se réduirait à la mobilité géographique. Du coup, dénonce FO, la mobilité fonctionnelle forcée passe inaperçue !.

 

 Voir en ligne  : Photographies de la Manifestation des personnels soignants et du service public à Paris le 7 mars 2017

Evelyne Salamero Ex-Journaliste à L’inFO militante