Fraude aux prestations sociales : fantômes au rapport

Actualités par Michel Pourcelot

Gilles ROLLE/REA

Une mission parlementaire sur la fraude sociale cible les prestations sociales, en arguant de potentielles fraudes générant des milliards de pertes.

C’est à la demande du Premier ministre en mai dernier que deux élues de la majorité se sont lancées dans un rapport sur la fraude sociale. Elles l’on partiellement dévoilé le 3 septembre 2019 avant même son achèvement qui tarde. Le but officiel de cette mission parlementaire, dite Grandjean-Goulet, était la fraude sociale dans son ensemble, mais demandant explicitement une « évaluation robuste et objective du coût pour nos finances publiques de la fraude aux prestations sociales ». Ce qu’ont fait deux parlementaires en focalisant sur ces prestations sociales. Non sans sous-entendre un système inefficace et propice au piratage à tout va, y compris par des faux centenaires grugeant des milliards. On peut supposer que le Rua (revenu universel d’activité) sera censé régler de tels dysfonctionnements en fusionnant joyeusement le tout…

L’attaque des morts-vivants

A défaut de proposer une estimation chiffrée solide, l’une des deux rapporteuses a ainsi pu écrire sur twitter : « 66,9 millions de personnes en France, 84 millions de personnes ‘réputées en vie’ pour le système social français. 21 000 centenaires selon l’Insee, 3 millions dans le RNIPP » (Répertoire national d’identification des personnes physiques, tenu par… l’Insee depuis 1946). L’Insee a eu beau répondre que le RNIPP était un registre et n’avait rien à voir avec un recensement, le mal était fait. D’autant que les deux parlementaires ont agité une potentielle énorme fraude fiscale animée par des centenaires fantômes qui utiliserait leur numéro dans ce registre. Ce à quoi l’Insee a répondu le 5 septembre : « Le RNIPP n’est porteur d’aucun droit, il ne suffit pas d’être enregistré dedans » pour toucher des prestations sociales.

Le même jour, la Sécurité sociale répondait elle aussi, chiffres à l’appui : 15.000 centenaires seulement avaient touché une pension l’an dernier et non pas par des millions. A des années-lumière de la bande-annonce présentée par les deux parlementaires. Face à cette grande marée centennale, elles souhaitent, s’inspirant de la loi Eckert (banque et assurance), l’établissement de « preuve de vie » de la part des assurés des caisses de Sécurité sociale.

Elles appellent même à un secrétariat d’État à la lutte contre la fraude sociale, qui existe d’ailleurs en Belgique, avec un secrétaire d’État à la Lutte contre la fraude sociale, à la Protection de la vie privée et à la Mer du Nord. Plus étayée, la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) a publié en janvier 2019 ses chiffres pour l’année 2017. Concernant les fraudes aux prestations sociales, la DNLF en a détecté pour un montant de 294,65 millions d’euros dans la branche famille, et respectivement 277,7 millions et 14,57 millions pour maladie et retraite. Soit un total de 586, 92 millions pour 540 milliards de prestations. Ce qui relativise quelque peu.

Michel Pourcelot Journaliste à L’inFO militante